Panama, qui était âgé «d'au moins 17 ans», a été retrouvé mort en juin dernier. Glacier, 33 ans, surnommé ainsi à cause de la cicatrice blanche sur son dos, a connu le même sort. Tout comme Starboard, Contrail, Peanut, Couplet...

Au moins 12 baleines noires ont perdu la vie dans les eaux du golfe du Saint-Laurent en 2017, pour un grand total de 17 en Amérique du Nord.

Ça peut sembler bien peu. En fait, c'est énorme. Il ne reste, dans le monde entier, que 450 baleines noires. La situation est alarmante.

Le biologiste Robert Michaud, président du Groupe de recherche et d'éducation sur les mammifères marins, étudie les baleines depuis une trentaine d'années. Il dit avoir eu «le souffle coupé» par l'ampleur du désastre de l'été dernier.

Les autorités fédérales aux États-Unis ont carrément affirmé que si on ne s'empresse pas de mieux protéger les baleines noires (aussi appelées baleines franches), elles vont disparaître dans un avenir proche. «On ne peut pas laisser ça se produire», a dit le mois dernier l'un des responsables de l'Agence américaine d'observation océanique et atmosphérique (NOAA), John Bullard.

Le sort des baleines n'étant pas, en général, un sujet qui nous préoccupe autant que l'attente aux urgences ou le décrochage scolaire, il est bon de le répéter avec insistance : «On ne peut pas laisser ça se produire.»

La bonne nouvelle, c'est que le gouvernement fédéral semble l'avoir compris. L'été dernier, le ministre des Pêches Dominic Leblanc a décrété rapidement une série de mesures temporaires pour protéger les baleines. Il a interdit la pêche dans une zone du golfe du Saint-Laurent où on avait signalé des baleines noires. Il a aussi imposé une nouvelle limite de vitesse aux navires qui se déplaçaient à cet endroit.

C'est exactement ce qu'il fallait faire de toute urgence puisque les autopsies ont démontré que les deux causes principales des décès de ces cétacés sont les collisions avec les navires et l'empêtrement dans les cordages utilisés par les pêcheurs. «J'ai été très impressionné par la réaction des autorités canadiennes», nous a d'ailleurs dit l'expert américain John Bullard en entrevue récemment.

Cela dit, une bataille a été gagnée, mais pas la guerre. En 2018, Ottawa devra rapidement promulguer une série de mesures à long terme pour éviter de vivre une deuxième année noire de suite dans le golfe du Saint-Laurent.

Là encore, le ministre des Pêches a été proactif. Il a rencontré en novembre dernier tous les acteurs concernés par ce dossier (les scientifiques, entre autres, mais aussi les représentants des pêcheurs tout comme ceux du transport maritime et des croisières). Résultat? On le saura vraisemblablement au cours des prochaines semaines.

La pression est forte, car le dossier est complexe. L'habitat de la baleine noire se modifie à toute vitesse, vraisemblablement parce que les changements climatiques l'obligent à migrer vers le nord pour trouver de la nourriture.

C'est, semble-t-il, la raison pour laquelle on retrouve désormais cette espèce dans le golfe Saint-Laurent.

Par ailleurs, la marge d'erreur est mince et les défis sont considérables. Pour réduire le danger posé par les «engins de pêche», Ottawa pourrait notamment tenter de «mettre à l'essai de nouvelles technologies» afin de réduire la quantité de cordes utilisées dans le golfe. Modifier les dates des saisons de pêche est aussi envisagé. Sans compter qu'il faut impérativement déterminer à quelle vitesse et à quels endroits les navires devront dorénavant circuler.

N'oublions pas une chose fondamentale, par ailleurs. Ce combat pour sauver cette espèce est en quelque sorte la pointe de l'iceberg. Les baleines noires ne sont pas les seuls cétacés à être en détresse dans nos eaux territoriales. Et le malheur de ces mammifères marins représente l'un des nombreux symptômes de la crise environnementale à laquelle la planète au grand complet fait face.

Rêvons un peu, puisqu'après tout, le début d'une nouvelle année est un des rares moments où on peut se le permettre sans avoir l'air trop naïf... Le gouvernement fédéral aurait tout avantage à déployer en 2018 des efforts considérables pour sauver la baleine noire à court terme, mais aussi pour la protéger à plus long terme en luttant contre les changements climatiques avec plus d'aplomb.Deux questions sur la baleine noire

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Combien de mètres la baleine noire peut-elle atteindre?

18 mètres

Quelle est son espérance de vie?

Au moins 75 ans.

Source : Pêches et Océans Canada

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