Parler d'un historien grec né en 460 avant Jésus-Christ n'est pas une façon très racoleuse de commencer un éditorial sur Donald Trump, mais elle a le mérite d'être pertinente.

Le président américain accueillera en Floride, demain et vendredi, son homologue chinois Xi Jinping.

À la veille de ce sommet, certains estiment qu'on doit prendre au sérieux les risques d'un conflit entre la Chine et les États-Unis.

Pour le prouver, ils citent l'historien en question : Thucydide.

Celui-ci a étudié la guerre entre Sparte - puissance dominante à l'époque - et Athènes, puissance montante. La première se jugeait menacée par la seconde, ce qui a provoqué une guerre dévastatrice.

Depuis le 20 janvier dernier, qu'on le veuille ou non, la puissance dominante de notre époque est dirigée par Donald Trump. Xi Jinping, pour sa part, est président d'une puissance dont l'ascension est spectaculaire.

Les deux hommes ont tout intérêt à ne pas oublier que l'histoire bégaie souvent.

«Il est certain que nous assisterons à une série de confrontations entre la Chine et les États-Unis au cours des prochaines années. Ce qu'on ne sait pas, c'est si les leaders de ces deux grandes puissances pourront gérer ces confrontations afin d'éviter qu'elles mènent à la guerre», a écrit récemment l'historien américain Graham Allison.

Ce professeur de l'Université Harvard exhorte les deux présidents à ne pas tomber dans ce qu'il qualifie de «piège de Thucydide».

Ces préoccupations sont à la fois compréhensibles et inquiétantes.

D'autant plus que Donald Trump, dans ce dossier, n'agit pas comme un politicien qui fait face à une situation délicate. Il se comporte plutôt comme un éléphant dans un magasin de porcelaine.

Rappelons-nous : en campagne, il a dénoncé la Chine à de nombreuses reprises. Il a été jusqu'à l'accuser de «violer» les États-Unis (il dénonçait le déficit commercial de son pays vis-à-vis de la Chine). Il a d'ailleurs menacé Pékin d'imposer une taxe de 45% sur les importations chinoises.

Depuis son élection, il n'a pas non plus fait dans la dentelle. Il s'est par exemple rapidement entretenu avec la présidente de Taiwan, devenant le premier président américain depuis Jimmy Carter à faire fi du concept de Chine unique. Deux mois plus tard, il a promis de s'y conformer, mais le mal était fait.

On a parfois l'impression que Donald Trump prend un malin plaisir à jeter de l'huile sur le feu. Vendredi dernier, il a carrément dit prévoir une rencontre «très difficile» avec Xi Jinping.

Cette attitude pose deux problèmes. Premièrement, à trop jouer avec le feu, on risque de se brûler.

La relation entre les deux puissances doit demeurer saine et la diplomatie reste le moyen à privilégier pour y parvenir.

Les conseillers du président américain auraient tout avantage à le lui expliquer.

Le hic, c'est que Donald Trump s'est mis le dos au mur. Ce deuxième problème rend plus difficile la résolution du premier.

Il a été si belliqueux face à la Chine que s'il devient doux comme un agneau devant Xi Jinping, sa crédibilité va en souffrir. Les autorités chinoises jugeront qu'il s'agit d'une preuve de faiblesse de la part des États-Unis. Ce n'est pas non plus souhaitable.

Il nous reste à espérer que le président de la première puissance mondiale comprendra que le moment est mal choisi pour jouer à la roulette russe avec la Chine.

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