« Guerre civile », clamait hier matin à la une le quotidien New York Post, au sujet du meurtre de cinq agents de police au Texas.

C'est une grossière exagération, typique de ce tabloïd. Mais il reste que les événements des derniers jours démontrent une fois de plus que des plaies aux États-Unis, remontant au passé esclavagiste de ce pays, demeurent béantes.

La tuerie à Dallas semble liée à la mort de deux hommes noirs abattus par des policiers cette semaine. Le principal suspect est passé à l'acte lors d'une manifestation organisée pour protester contre ces deux affaires hautement médiatisées. Il aurait dit aux autorités vouloir « tuer des Blancs, en particulier des policiers blancs ».

Son geste n'est pas qu'inadmissible et condamnable, il est également contreproductif. Non seulement il ne soulage pas la peine des familles afro-américaines endeuillées, mais il détourne l'attention des autorités et de l'opinion publique, alors que l'heure était venue de se concentrer sur la brutalité policière et son impact démesuré sur les Noirs.

En fait, son geste pourrait même pousser les policiers américains à être sur les dents encore plus qu'auparavant, ce qui est susceptible de provoquer d'autres tragédies dont les victimes seront des Noirs.

Car ils sont surreprésentés parmi tous ceux qui tombent chaque année sous les balles des policiers. Depuis le début de l'année, ces derniers ont abattu 509 personnes, dont 24 % étaient des Afro-Américains, alors qu'ils comptent pour 12 % de la population du pays.

Heureusement, les enregistrements vidéo de ces altercations se multiplient, ce qui permet aux trop fréquents dérapages des policiers d'être plus souvent documentés. D'où l'émoi suscité cette semaine par les morts d'Alton Sterling en Louisiane et de Philando Castile au Minnesota. L'agonie de cet homme a même été diffusée en direct sur Facebook Live par sa petite amie mercredi.

« Est-ce que ça se serait produit si les passagers et le conducteur avaient été Blancs ? Je ne pense pas », a déclaré le gouverneur de l'État jeudi, confirmant que la discrimination est la règle plus que l'exception au sein des forces de l'ordre.

« Chaque fois qu'un policier nous interpelle, la mort, la blessure, la mutilation sont possibles », a témoigné, dans le même ordre d'idées, le journaliste afro-américain Ta-Nehisi Coates dans son récent essai intitulé Une colère noire.

La colère n'excuse en rien la tuerie injustifiable de Dallas. Mais ce drame ne doit pas faire oublier aux forces policières américaines qu'elles doivent changer.

Le président Barack Obama l'a répété cette semaine, rappelant qu'un groupe de travail mis sur pied par la Maison-Blanche a émis des dizaines de recommandations l'an dernier en la matière, notamment afin d'améliorer la formation des policiers et leurs interactions avec la communauté en général et avec les minorités en particulier.

On parle carrément d'un changement de culture, ce qui prendra du temps, on s'en doute bien. Raison de plus pour en faire une affaire pressante.

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