C’est un signe assez évident que nous sommes rendus là, collectivement : il y a unanimité quasi complète des partis politiques sur l’élargissement de la loi 101 aux entreprises de compétence fédérale.

Et ce, tant à Québec qu’à… Ottawa ! Qui l’eût cru ?

L’ensemble des formations à l’Assemblée nationale se sont en effet rangées, cette semaine, derrière la nécessité d’appliquer la Charte de la langue française à toutes les grandes entreprises installées au Québec, sans exception.

Et pour y arriver, il faut imposer la loi 101 aux entreprises de compétence fédérale, les seules de plus de 50 employés qui peuvent encore la contourner au Québec.

Pensez à VIA Rail. À Purolator. À la Banque royale. Ou à la Banque de Montréal, qui n’a pas de certification de francisation, ce qui est tout de même assez ironique quand on y pense…

Or pour forcer ces entreprises à se conformer à la Charte, le gouvernement Legault doit, dans un monde idéal, procéder de concert avec le fédéral. D’où la motion unanime du Parlement québécois adressée au « gouvernement du Canada » pour qu’il s’engage formellement « à travailler avec le Québec afin d’assurer la mise en œuvre de ce changement ».

Le Bloc est pour.

Le NPD est pour.

Le Parti vert est pour.

Et pour la toute première fois, le Parti conservateur, maintenant dirigé par un chef véritablement soucieux des compétences du Québec, est pour lui aussi.

Manque donc un seul chef pour que tout le monde chante à l’unisson : Justin Trudeau. Il n’a pas encore dit non, mais il a semblé jusqu’ici peu enclin à assujettir les secteurs de compétence fédérale à la loi 101.

PHOTO ADRIAN WYLD, ARCHIVES LA PRESSE CANADIENNE

Dans le gouvernement de Justin Trudeau, c’est à Mélanie Joly, ministre du Développement économique et des Langues officielles, qu’incombe le mandat de moderniser la Loi sur les langues officielles.

Pourtant, voilà une mesure peu contraignante qui pourrait améliorer les choses. Une mesure qui aurait le mérite de prouver l’intérêt réel des libéraux fédéraux pour le sort du français au Québec.

Il y a plus de 300 entreprises fédérales au Québec, mais à peine un tiers a fait l’effort d’obtenir volontairement la certification de l’Office québécois de la langue française (Telus, Bell, Banque Nationale, Banque Scotia, etc.).

Or une étude de l’OQLF publiée l’an dernier a révélé qu’une proportion moins importante d’employés utilise le français de façon prédominante comme langue de travail dans de nombreux secteurs de compétence fédérale, comparativement à la moyenne des entreprises du secteur privé.

Plus grave, entre 2006 et 2016, l’utilisation prédominante du français au travail a diminué dans tous les secteurs de compétence fédérale analysés.

Dans un tel contexte, difficile de rester les bras croisés si on est à la tête d’un parti à la Chambre des communes. D’autant que l’ensemble des formations a appuyé une motion, la semaine dernière, qui reconnaît que la situation du français est toujours fragile et que l’usage du français est en déclin au Québec.

Bien sûr, c’est à Québec que l’on appliquera les mesures qui contribueront à la préservation du français. Mais le fédéral a un rôle à jouer, notamment pour les secteurs qu’elle chapeaute. Assujettir les entreprises qui relève de sa compétence à la législation linguistique du Québec serait donc la moindre des choses.

Justin Trudeau a reconnu dans son discours du Trône qu’il a la responsabilité de protéger et de promouvoir le français à l’extérieur du Québec, ce qu’a toujours fait le PLC, mais aussi au Québec, ce qui est nouveau.

Appuyer l’Assemblée nationale dans ce dossier démontrerait qu’il ne s’agit pas d’une conversion électoraliste sans lendemain.

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