Les Québécois doivent-ils obligatoirement cotiser à un régime privé de retraite? Il y a un an, l'ex-ministre libéral Claude Castonguay proposait d'instaurer un REER obligatoire, où chaque Québécois sans régime privé y investirait 5% de ses revenus entre 30 000$ et 70 000$ chaque année. L'idée a vite été écartée par le gouvernement Charest. En plein blitz des cotisations REER, ce débat tabou doit être relancé.

Aussi impopulaire soit-il, le REER obligatoire préviendrait le choc financier qui attend la classe moyenne au Québec à sa retraite. Pour garder le même niveau de vie à la retraite, il faut entre 60% et 70% de ses revenus sur le marché du travail et les régimes publics de retraite sont loin de suffire (59% d'un revenu de 30 000$, 48% de 40 000$ et 33% de 60 000$). Or, 47% des travailleurs québécois n'ont pas de régime de retraite et seulement 50% de ceux gagnant de 35 000$ à 70 000$ par année cotisent à leur REER. Une personne gagnant de 40 000$ à 60 000$ doit épargner entre 8% et 11% de son salaire annuel de 30 à 60 ans (rendement annuel de 7%) pour maintenir son niveau de vie à la retraite en tenant compte des régimes publics. Il faut être aveugle pour ne pas voir le mur qui s'en vient...

Le climat de peur entourant le REER obligatoire n'est pas justifié. Ceux qui mettent déjà 5% de leur salaire de côté dans un REER régulier ou dans un régime de retraite collectif en seraient exemptés. En Nouvelle-Zélande, le KiwiSaver permet de retirer de l'argent en cas de maladie grave et de difficultés financières. On peut aussi prévoir un congé de cotisation et un retrait pour une mise de fonds au moment de l'achat d'une première maison. En pratique, la Régie des rentes du Québec pourrait faire un appel d'offres pour des fonds indiciels avec des frais de gestion réduits, un peu comme en Suède où les travailleurs doivent accumuler 2,5% de leur salaire depuis 2000 (moitié-moitié entre l'employé et l'employeur, un autre débat à tenir).

Comme l'épargne-retraite forcée ne gagne pas de concours de popularité, pas étonnant que l'idée ait été rejetée par le gouvernement Charest et la Coalition avenir Québec. Le Parti québécois propose un REER obligatoire avec droit de retrait comme en Nouvelle-Zélande et bientôt au Royaume-Uni, un compromis auquel l'ex-ministre libéral Claude Castonguay se rallie.

Le gouvernement Charest introduira en 2013 les régimes volontaires d'épargne-retraite, qui permettront à davantage de Québécois, notamment les travailleurs autonomes, d'avoir un régime de retraite privé. C'est un pas dans la bonne direction, mais ça semble insuffisant. Devant l'urgence de la situation, ou bien Québec bonifie les régimes publics de retraite, ou bien il incite les gens à épargner davantage. Le REER obligatoire peut avoir l'air d'une solution draconienne, mais y a-t-il vraiment une autre solution qui évitera à la classe moyenne de frapper un mur à la retraite? La question mérite réflexion.

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