Le téléphone sonne, vous répondez. Et vous grimacez: encore un vendeur! Patience, votre supplice achève. Vous pourrez bientôt signifier votre refus d'être sollicité, a confirmé Ottawa il y quelques jours. Et si l'on se fie à l'expérience américaine, ça devrait régler la majorité des problèmes.

À partir du 30 septembre, les Canadiens pourront inscrire leur numéro sur une liste d'exclusion supervisée par le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC). Les firmes de télémarketing qui n'en tiendront pas compte s'exposent à de fortes amendes. Ce n'est pas trop tôt. Les Américains ont accès à un système semblable depuis cinq ans.

Pendant longtemps, Ottawa a permis à l'industrie de s'organiser elle-même, avec les piètres résultats que l'on connaît. Désormais, les règles du jeu sont limpides, aussi bien pour les citoyens que pour les entreprises. Les premiers pourront s'inscrire facilement, par téléphone ou par internet. Après 31 jours, ils ne devraient plus être sollicités. Autrement, ils pourront dénoncer les importuns et le CRTC fera enquête. Les amendes peuvent atteindre jusqu'à 15 000$ par infraction, selon la taille de la firme. Les télévendeurs devront d'ailleurs donner leur nom et celui de l'entreprise qu'ils représentent. Et ils n'auront pas le droit de masquer leur numéro pour déjouer l'afficheur de l'abonné. Des agences malhonnêtes continueront sans doute à le faire, mais elles ne représentent qu'une fraction des appels. Dans la majorité des cas, le système devrait donner de bons résultats.

Des consommateurs s'inquiètent déjà que certains organismes considérés comme d'intérêt public (partis politiques, groupes charitables, etc.), ainsi que les entreprises avec lesquelles ils font déjà affaire, puissent tout de même les joindre. Mais les organisations exemptées devront elles aussi se constituer une liste de numéros exclus. Le consommateur qui ne souhaite pas être rappelé n'aura qu'à demander à y être inscrit.

Il faudra sans doute quelques mois de rodage, mais l'expérience américaine est très encourageante. Quatre jours seulement après la création de la liste, à l'automne 2003, 10 millions de numéros avaient déjà été enregistrés. Cinq ans plus tard, la base de données en compte plus de 157 millions. L'efficacité du mécanisme n'est sans doute pas étrangère à sa popularité: 77% des abonnés inscrits à la liste disent ne plus recevoir d'appels, ou beaucoup moins qu'auparavant, indique un sondage réalisé l'automne dernier. Ce n'est pas le silence complet, mais c'est un progrès remarquable. Il faut dire que 22 contrevenants ont déjà été condamnés à plus de 17 millions de dollars de pénalités. Assez dissuasif.

La liste canadienne a toutefois une faille importante: les abonnés devront s'y réinscrire après trois ans. Le mécanisme américain fonctionnait ainsi à l'origine, mais il a été amélioré. Depuis février, les inscriptions sont permanentes. Seuls les numéros qui ont été débranchés et attribués à d'autres clients sont éliminés. Ottawa devrait faire de même. Si vous prenez la peine de vous enregistrer, c'est que vous ne voulez plus être dérangé. Ni maintenant, ni dans trois ans.

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