L'Assemblée nationale devrait-elle adopter le projet de loi privé interdisant toute contestation judiciaire de l'entente entre la Ville de Québec et Quebecor sur la gestion du futur amphithéâtre? Cette mesure exceptionnelle est-elle justifiée pour favoriser le retour d'une équipe de la Ligue nationale de hockey à Québec?

LES COMMENTAIRES DOIVENT ÊTRE SIGNÉS. MAXIMUM DE 150 MOTS.

Pierre Simard

Professeur à l'École nationale d'administration publique à Québec

RÉGIS 1er!

Régis Labeaume ne respecte pas la loi, il fait la loi!  Combien de temps encore aurons-nous à supporter un maire qui monte à la tribune pour accuser un peu tout le monde de «grand talent», de farfelu, de stupide ou d'incompétent? Combien de temps aurons-nous à «subir» ce premier magistrat qui brandit la menace d'une mise en demeure à quiconque ose dénoncer ses façons de faire? Combien de temps devrons-nous endurer celui qui sollicite l'aide des élus provinciaux pour bâillonner les citoyens qui questionnent une entente conclue sous le couvert de la confidentialité pour la gestion d'un amphithéâtre qui engloutira 400 millions de dollars de fonds publics? Quand? Lorsque nos élus provinciaux mettront leur «calculette à votes» de côté et cesseront de jouer les collabos de tous ces dictateurs qui veulent imposer leur loi aux citoyens. Des élus qui comprennent qu'ils sont d'abord là pour faire respecter la loi et non la faire. Heureusement qu'il y a Amir Khadir qui, pour les mauvaises raisons, peut nous épargner la dictature de Régis 1er. Entretemps, c'est Coluche qui a raison: «Si la Gestapo avait les moyens de vous faire parler, les politiciens, eux, ont les moyens de vous faire taire.»

Gaétan Frigon

Président exécutif de Publipage inc. et ancien président-directeur général de la Société des alcools du Québec et de Loto-Québec

UNE DEMANDE ABSURDE

Régis Labeaume est un peu le Jean Drapeau du XXIe siècle. Tout comme lui, il ne tolère pas que l'on s'oppose à ses projets grandioses. En ce qui me concerne, sa demande de projet de loi privé ayant pour objet l'interdiction de toute contestation judiciaire de l'entente entre la Ville de Québec et Quebecor sur la gestion du futur amphithéâtre est d'une absurdité consommée, d'autant plus que les avocats du Ministère concerné croient que ladite entente pourrait être illégale. Bien que l'on connaisse les grandes lignes de l'entente en question, il est tout à fait normal de vouloir en connaître les détails et le comment on en est arrivé à finaliser le tout. Et pour ajouter au ridicule, c'est le Parti québécois qui s'en fait le porte-étendard. Les arguments apportés sont eux aussi d'un ridicule outrageant: «J'ai vu les détails. Alors, faites-moi confiance car je ne peux les divulguer.» Jean Drapeau avait perdu de sa crédibilité en fin de règne pour avoir agi de la sorte. Si Régis Labeaume continue à vouloir régner en dictateur, la même chose pourrait lui arriver. Mais comme les chances selon lequel le projet de loi privé ne pourra être adopté avant la fin de la présente session, en juin, espérons que l'été apportera un peu de gros bon sens à ceux qui semblent vouloir écarter le processus judiciaire normal, n'en déplaise à Gary Bettman.

Marc Simard

Professeur d'histoire au collège François-Xavier-Garneau à Québec

BRIMER NOS DROITS POUR ÇA?

Le bourgmestre de Québec demande à l'Assemblée nationale, avec l'aide du caucus péquiste dont il est un membre honoraire, de priver les citoyens de leurs droits fondamentaux pour tuer l'opposition à son rêve de ramener les Nordiques à Québec dans l'oeuf afin de «sécuriser la LNH». Cette requête témoigne d'un mépris de la démocratie indigne d'un élu et constitue un outrage aux contribuables. Le droit des citoyens de consentir aux taxes et de demander la vérification des dépenses gouvernementales remonte à la Grande Charte de 1215. Il serait grotesque qu'on les en prive pour satisfaire à la monomanie d'un édile. La chose est d'autant plus choquante que la nécessité de bâtir un nouvel amphithéâtre n'a toujours pas été démontrée de manière satisfaisante. On se demande encore si on sera capable d'y présenter assez de spectacles par année pour le rentabiliser et un certain nombre d'entre eux, pour lesquels on réduirait la taille de la salle à un «café spectacle», cannibaliseraient les autres salles de la région comme le Grand Théâtre et le Palais Montcalm. Sans compter que la LNH est une ligue mineure qui vend un sport marginal et qu'obtenir une franchise de la LNH n'a absolument rien de porteur, au contraire. Celle-ci n'attirera pas de nouvelles dépenses ni ne créera de nouveaux investissements dans la région, outre la construction de l'amphithéâtre, entièrement réalisé avec des fonds publics. Au contraire, c'est une «pompe à fric» qui siphonnera le budget loisir des consommateurs pour le redistribuer dans les goussets des propriétaires, de la ligue et des joueurs, dont la majorité ne résideront pas à Québec. On aura d'ailleurs remarqué que la ville se porte mieux, sur les plans économique et culturel, notamment, depuis le départ des Nordiques en 1995. Il est grand temps que les gouvernements cessent de subventionner, directement ou indirectement, les équipes de sport professionnel.

Daniel Gill

Professeur agrégé à l'Institut d'urbanisme de l'Université de Montréal

BÂILLONNER TOUTE OPPOSITION

Le Colisée n'a pas fini de faire couler beaucoup d'encre. Ce qui semble être une lutte de pouvoir entre certains individus, sachant que PKP est loin de faire l'unanimité, fait ressortir tout le malaise qui s'inscrit parfois autour de la gouvernance. Entre une démocratie participative et populaire qui s'en remet aux systèmes judiciaires et une démocrate dite élective qui s'en remet système parlementaire. Pour la société civile, le retour aux tribunaux demeure bien souvent l'ultime moyen pour faire reconnaître ses droits, on l'a vu dans de nombreux cas reliés à l'environnement. Par sa démarche, ce que propose le maire Labeaume, c'est de bâillonner toute opposition de la part de la société civile par rapport à une entente qui, pour certains, serait douteuse. Position discutable, compte tenu des enjeux en présence. Le cas présent, parce qu'il exige non pas la majorité, d'un parti au pouvoir, avec les intérêts qu'il représente et donc contestable, mais l'unanimité des parlementaires, nous entraîne au coeur même de la question de la démocratie moderne et de la gouvernance. Et que dire s'il fallait qu'Amir Khadir vote seul contre la proposition?

Agnès Maltais

Députée péquiste de Taschereau

PAS UNE PROCÉDURE EXCEPTIONNELLE

Le dossier du nouvel amphithéâtre soulève bien des passions. Mais quoi que l'on en pense, quiconque s'objecte au dépôt du projet de loi privé s'oppose à deux choses: 1)  à un processus transparent, une commission parlementaire, où les parties en cause, incluant les opposants au projet de loi, pourraient exprimer leur point de vue et répondre publiquement aux questions aux élus; 2) aux efforts actuellement déployés pour favoriser la venue d'une équipe de hockey de la Ligue nationale à Québec. Par ailleurs, il est important de souligner que le dépôt d'un projet de loi d'intérêt privé n'est pas une procédure exceptionnelle. L'Assemblée nationale adopte au moins une douzaine de projets de loi privée chaque année, et ce, à l'unanimité l'immense majorité du temps. Il s'agit d'un instrument législatif servant à résoudre les problèmes particuliers d'une entité comme une Ville, un groupe de citoyens ou même un seul individu. Au Parti québécois, nous croyons que le dossier de l'amphithéâtre et de la venue d'une équipe de hockey de la Ligue nationale de hockey à Québec est un enjeu important qui mérite l'attention des parlementaires de l'Assemblée nationale. Les représentations du maire de Québec, des juristes du ministère des Affaires municipales et des opposants au projet de loi permettraient aux élus ainsi qu'à tous les citoyens du Québec de juger de la validité de cette initiative législative en toute connaissance de cause.

François Bonnardel

Député adéquiste de Shefford

ÉTUDIONS LE PROJET DE LOI D'ABORD

Ce dossier en est un politique, bien sûr, mais il en est un surtout de procédures parlementaires à cette étape-ci. Objectivement, on ne peut pas être pour ou contre un projet de loi qu'on n'a pas vu. Les règles parlementaires nous empêchent de prendre connaissance d'un projet de loi avant son dépôt. Pour savoir exactement de quoi on parle, il faut pouvoir le lire. En acceptant le dépôt du projet de loi, les députés de l'Assemblée nationale permettraient aux Québécois d'enfin connaître le fond du dossier parce que les principaux acteurs devront venir en commission parlementaire, devant les élus et les journalistes, expliquer la véritable pertinence de cette loi. Les procédures parlementaires permettront à n'importe quel député de bloquer l'adoption rapide du projet de loi s'il n'est pas convenable pour les Québécois. De notre côté, on s'est engagé à prendre nos responsabilités et à protéger les intérêts des contribuables québécois. Évidemment, nous sommes en faveur d'un nouvel amphithéâtre (avec la contribution du secteur privé) et d'un retour d'une équipe de la LNH à Québec. Mais contrairement au Parti québécois, qui s'est peinturé dans le coin, les députés adéquistes n'appuient pas aveuglément leur projet de loi.