Troublé par les ravages de l'alcool et de la vitesse au volant chez les jeunes, le coroner Yvon Garneau recommande l'imposition au Québec d'un couvre-feu nocturne pour les conducteurs âgés de 16 à 24 ans. Des exceptions seraient prévues pour les conducteurs qui doivent se rendre à leur lieu d'étude ou de travail. Êtes-vous d'accord avec cette recommandation?

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Léo Bureau-Blouin

Président de la Fédération étudiante collégiale du Québec (FECQ)

UN MAUVAIS REMÈDE DISCRIMINATOIRE

Imposer un couvre-feu pour les conducteurs de moins de 24 ans est non seulement une discrimination grave envers les jeunes, mais également le mauvais remède au mauvais problème. Va-t-on imposer un couvre-feu pour tous les hommes, puisque statistiquement parlant, ceux-ci sont plus nombreux à avoir des accidents? Une telle mesure ferait scandale. Ce n'est pas en infantilisant les jeunes et en les empêchant de prendre de l'expérience que nous améliorerons le bilan routier québécois. Il faut plutôt mettre en place des mesures efficaces qui permettront d'améliorer le bilan routier des jeunes, mais également de toutes les tranches d'âge de la société. Pensons par exemple aux campagnes de sensibilisation de la SAAQ qui font de plus en plus leur effet, ou encore aux cours de conduite obligatoires qui forment maintenant une nouvelle génération de conducteurs plus aguerris. Ces mesures permettent de responsabiliser les conducteurs tout en évitant de discriminer un groupe d'individus. On oublie parfois que la vaste majorité des jeunes conducteurs est plus que responsable. Ensemble, trouvons les bons remèdes à nos maux et évitons de discriminer les générations montantes avec des mesures extrêmes.

Raymond Gravel

Prêtre dans le diocèse de Joliette

RESPONSABILISER, C'EST MIEUX QU'INTERDIRE

Je peux comprendre que la vitesse et l'alcool sont des ingrédients dangereux sur les routes du Québec. Par ailleurs, ce n'est pas en promulguant des lois aussi sévères soient-elles qu'on pourra résoudre ce problème persistant. De plus, il n'y a pas que les jeunes qui soient dangereux sur les routes. Combien de fois rencontrons-nous des femmes et des hommes qui ont pris de l'alcool et qui utilisent de façon irresponsable leur automobile? Allons-nous interdire à tout le monde de conduire la nuit sous prétexte qu'il y a un danger potentiel d'accidents dû à l'alcool et à la vitesse? Personnellement, j'ai toujours eu des problèmes avec les lois, les règlements, les interdits qu'on applique à la lettre, sans tenir compte du contexte dans lequel l'événement s'est produit. Une loi n'éduque pas les gens; elle ne fait que les maintenir dans un état d'abrutissement et d'infantilisme. Ne pourrait-on pas apprendre à nos jeunes, dès l'école secondaire, à se responsabiliser, en leur montrant les effets pervers de l'alcool et de la vitesse au volant? Il me semble que par le témoignage d'un autre, les jeunes seront sensibilisés à cette réalité et deviendront plus responsables, non seulement sur les routes, mais partout dans la société. Il faut miser sur la prévention, l'éducation et la responsabilisation.

Jean Bottari

Préposé aux bénéficiaires

DIFFICILE À APPLIQUER

Je ne doute aucunement que le coroner Garneau ait à coeur le bien-être des jeunes Québécois. Par contre, j'ai de la difficulté à croire que ce couvre-feu pourra être appliqué de façon rigoureuse. Déjà, les contestataires montent aux barricades en disant que ce n'est qu'une minorité de nos jeunes qui conduisent après avoir consommé de l'alcool. Pourquoi tous les jeunes devraient-ils être visés par cette mesure si cela ne concerne qu'une infime partie de jeunes conducteurs? Notre système ne fonctionne-t-il pas déjà ainsi? Cet argument ne tient pas la route, selon moi. S'il y a de nombreux vols dans mon voisinage, ma prime d'assurance ne sera-t-elle pas augmentée en conséquence, même si jamais personne n'a volé mes biens? Un  conducteur de 16 ans ne paie-t-il pas plus que moi pour assurer son véhicule, car une minorité d'entre eux sont trop téméraires au volant? Certes, nous devons agir afin de mettre un frein à ces trop nombreux et inutiles décès. Malheureusement pour le Dr Garneau, ses recommandations ne feront pas l'unanimité au sein de nos élus et de la population. D'autant plus qu'il n'y a aucune obligation pour le gouvernement d'appliquer un tel couvre-feu ou toute autre idée émanant d'un coroner. Il faudrait modifier la loi afin que de telles recommandations ne restent pas lettre morte, car, visiblement, la sensibilisation auprès de la jeune génération ne fonctionne pas.

Jean-Claude Hébert

Avocat

PROJET PILOTE

Pour ma part, je suis d'accord avec cette recommandation. Cependant, pour éviter de pénaliser les jeunes conducteurs responsables, je suggère que le gouvernement procède, pour une durée définie, à un projet pilote. Ensuite, sur la foi des données statistiques, on serait plus en mesure d'évaluer la valeur réelle d'une telle mesure.