Depuis deux jours, Jean Lapierre, le chroniqueur politique le plus médiatisé au Québec, rit à gorge déployée à toutes les tribunes en parlant de la vie sexuelle du député conservateur Jason Kenney.

Ou plutôt de l'absence de vie sexuelle.

Car voyez-vous, selon M. Lapierre, le politicien n'a jamais eu de relations sexuelles avec « qui que ce soit ni quoi que ce soit ».

Pardon ?

Kenney, qui se présente comme le gardien des valeurs morales conservatrices, se serait vanté publiquement, en arrivant à Ottawa en 2006, de n'avoir jamais eu de relations sexuelles, chose qui devrait être réservée aux personnes mariées, d'après lui.

On pensera ce qu'on voudra de cette conception de la vie sexuelle hors des « liens sacrés du mariage ».

Mais à moins qu'on ait manqué des discours politiques sur le sujet par l'ex-ministre, est-ce d'intérêt public ? Évidemment non.

Jean Lapierre trouve que oui, oui, oui, hi, hi, hi, et c'est drôle, drôle, drôle.

Chez un Paul Arcand un peu médusé, Lapierre a commencé sa séquence de potinage mercredi. Rebelote à l'émission de Paul Houde. Et encore chez Dumont à TVA, où les deux ont été pris d'un fou rire du plus grand chic. Et comme si ce n'était pas assez, dans son émission avec Paul Larocque plus tard dans la journée à LCN, Lapierre a fait jouer en reprise son intervention chez Dumont.

Je n'en croyais pas mes oreilles la première fois. Dans le tumulte du direct, un dérapage, une pelure de banane vous guette...

Mais deux, trois, quatre, cinq fois ? Et on se repasse ça en boucle et en reprise dans sa propre émission ? L'homme est manifestement fier de son effet et de son « scoop ».

Jason Kenney est un fervent catholique. Et puis ? Est-il permis de rire des croyances religieuses des politiciens en ondes ?

Est-ce que la vie sexuelle des politiciens ou leur inactivité sexuelle sont devenues des sujets légitimes de discussion médiatique ? Ou, mieux encore, de franche rigolade sur les ondes publiques ?

Ou alors, Lapierre insinue qu'à 46 ans, il est très improbable que Kenney soit vraiment puceau. Et alors ? En quoi ça nous regarderait davantage ?

On en est vraiment rendu là ?

Imaginons qu'il s'agisse d'une députée. Imagine-t-on une seconde qu'il se serait permis des allusions sur la vie sexuelle d'une politicienne ? Jamais de la vie. Alors, pourquoi l'accepter pour Kenney ? Parce qu'il est conservateur ?

Dans tous les cas, le procédé est indécent, dégradant.