Une dame de 71 ans se promène entre les courts de Wimbledon avec sa nièce. Elle ne reconnaît pas le All England Lawn Tennis Club qu'elle chérit.

Toutes ces couleurs un peu vulgaires...

Bon, les joueurs, on peut comprendre qu'ils ne soient pas vêtus du blanc traditionnel. Ils représentent leur pays, passe toujours.

Mais toutes ces banderoles d'un mauve un peu criard, avec les anneaux olympiques, vraiment, était-ce bien nécessaire?

Wimbledon, monsieur, c'est vert et blanc depuis toujours et pour toujours!

«Le pire, c'est les serviettes des joueurs, avez-vous vu comme elles sont petites? À Wimbledon, normalement, ils ont des serviettes grosses comme ça, épaisses... Ils ont dû manquer de budget.»

Ils ont surtout changé de commanditaire. La boutique de souvenirs a été vidée de matériel Wimbledon pour y fourguer le matériel olympique en exclusivité. Les fraises et la crème sont au rendez-vous, tout n'a pas été sacrifié, et le bar à champagne est ouvert - mais déserté pour le moment.

Tout ça n'empêchera pas Jane French d'aller voir Federer. C'est juste que... Ce n'est pas Wimbledon.

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Elle en est à ses deuxièmes Jeux olympiques. La dernière fois, c'était en 1948. Pas de tennis à l'époque. Ce sport, aussi anglais que le ping-pong est chinois aujourd'hui, fut disputé aux Jeux de 1908, à Wimbledon justement, mais on a décidé de le retirer du programme en 1924. Il est réapparu à Séoul en 1988.

«Mon père nous a amenés au stade en 1948. C'était juste après la Guerre. Londres avait été terriblement bombardé, à deux rues de chez moi les immeubles étaient rasés. D'ailleurs pendant la Guerre, je suis désolée de vous dire ça, vous me pardonnerez, mais un Canadien habitait chez nous et c'était toujours le premier à aller se cacher dans l'abri du jardin, ma mère le trouvait terriblement lâche!»

C'était avant la télé et le village des athlètes ressemblait davantage à un camp scout. «Ils étaient dans des tentes.»

Elle ne souvient que d'un truc: cette Néerlandaise qui avait gagné quatre médailles d'or en athlétisme, la vedette des Jeux, Fanny Blankers-Koen, surnommée... la «ménagère volante».

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Une qui rayonnait hier dans sa robe extrêmement orange: Aleksandra Wozniak (54e au monde). Et pour cause. Quelle raclée elle a servie à Marina Erakovic (46e): 6-2, 6-1. Domination complète.

Doublement contente, d'ailleurs: «Les Olympiques, c'est plus grand que n'importe quel tournoi du grand chelem; tu représentes le pays, ça te donne une adrénaline supplémentaire. Mais aujourd'hui, je n'avais aucune nervosité, j'ai réussi à m'imposer dès les premiers points.»

Elle se retrouvera maintenant contre Venus Williams, qui semblait en pleine forme quand elle a battu la finaliste de Roland-Garros, Sara Errani, quelques minutes plus tard.

L'autre victorieux canadien, Milos Raonic (21e), a mis un peu plus de temps à se débarrasser du 68e mondial, Tatsuma Ito (6-3, 6-4), mais il n'a jamais eu quoi que ce soit à craindre.

«J'ai joué 10 matchs dans ma vie sur du gazon, alors ce n'est pas toujours très beau, mais même si ce n'est pas de la bonne façon, chaque fois que je gagne je m'y habitue un peu plus.»

Jo-Wilfred Tsonga, 6e mondial, va lui offrir une sacrée occasion d'apprendre en deuxième ronde...

Selon toute vraisemblance, on verra aussi Daniel Nestor et Aleksandra Wozniak en double mixte.

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Les traditionalistes se demandent si les Olympiques ont leur place à Wimbledon. L'autre question demeure depuis 24 ans: le tennis a-t-il vraiment sa place aux Olympiques?

Le tennis a déjà tellement de visibilité, tellement d'argent, il y a tellement d'événements, il en est presque banal, omniprésent à la télé... qu'a-t-il besoin des Olympiques en plus? La question ne s'est pas vraiment posée ainsi, on s'en doute: les Olympiques ont besoin de sports qui font des audiences.

Pour les athlètes, la question ne se pose pas. Ce n'est vraiment pas simplement «un autre tournoi».

«Il n'y a jamais trop de grands événements, c'est la cerise sur le gâteau, représenter le Canada, dit Raonic. On n'est pas au village des athlètes, qui est trop loin, mais on passe la journée à regarder les Jeux à la télé. Mon coach me fait écouter les épreuves avec des Espagnols, je lui fais voir des Canadiens, et j'ai vu le match de water-polo du Montenegro (qu'il a quitté à 4 ans) ... Ça ne doit pas être très bon pour la vue, tout ça...»

OÙ SONT-ILS DONC TOUS? - Les médias londoniens commencent à se poser la même question que nous: où sont donc tous les gens de Londres?

En allant comme en revenant de Wimbledon, encore ce matin et cet après-midi, tout roulait comme si de rien n'était. Oui, les navettes ont une voie olympique réservée. Mais dans les rues du centre où il n'y a qu'une voie, ça roule quand même. On est devant Westminster, là!

On a pu voir un reporter de la BBC sur le quai du métro, ce lundi matin. «On se croirait le dimanche, il n'y a vraiment pas beaucoup de gens dans le Tube. On n'est jamais à l'abri d'un immense problème, mais vraiment, jusqu'ici, ça se passe à merveille.»

Photo: PC

Aleksandra Wozniak a dominé Marina Erakovic hier à Wimbledon.