Le formulaire de déclaration de naissance du Québec demande le nom de la «mère biologique» et celui de «l'autre parent».

C'est bien sûr pour laisser la place aux nouveaux modèles familiaux, supposant parfois une «co-mère».

Mais Raymond Villeneuve y voit un exemple parmi d'autres de la relative absence du père dans les mesures sociales québécoises.

Quand il s'agit de familles monoparentales, les documents gouvernementaux présument qu'on parle de mères.

Les services, la formation offerte aux parents de jeunes enfants sont pratiquement tous destinés aux mères. On postule l'égalité des parents mais, en pratique, on se soucie surtout du soutien à la mère.

Pour toutes sortes de raisons historiques valables, certes. Mais le fait est qu'il reste à réconcilier la paternité contemporaine et la politique familiale, histoire de tenir compte des nouvelles réalités.

Ce qui veut dire prendre acte de l'engagement radicalement différent des jeunes pères dans les familles. Et encourager une participation égalitaire.

M. Villeneuve, qui dirige le Regroupement pour la valorisation de la paternité, dit néanmoins que les choses sont en train de changer profondément, sous l'impulsion des pères eux-mêmes.

Le discours politique change. Diverses petites initiatives laissent entrevoir une nouvelle perception. Même le ministère de la Condition féminine s'intéresse à la paternité et cherche à obtenir des données sur la nouvelle réalité - car la paternité a été moins étudiée. Chose parfaitement logique puisque l'égalité n'est pas un sujet féminin... Mais chose tout de même nouvelle.

«Quand on voit le financement accordé aux maisons d'hébergement pour femmes et les minuscules ressources pour les pères, on se dit qu'il y a du chemin à faire», dit Manuel Prats, de la Maison Oxygène.

«Je sens un vent de changement, quand même. Les gens voient que, si on aide un gars à se reprendre en main, il devient un meilleur père, et ça aide toute la famille. On insiste d'ailleurs pour inviter les mères, pour leur montrer comment sont accueillis les enfants, ici. On espère ouvrir d'autres maisons au Québec, après Baie-Comeau. Il y aura Drummondville, on vise Sherbrooke. On avance...»