Que pensent les petits-enfants des ministres du premier gouvernement péquiste, élu il y a 40 ans aujourd'hui, de l'état du Parti québécois, du projet souverainiste et de la relation des jeunes de leur génération avec la politique ?

Pour obtenir quelques réponses à ces questions, je me suis entretenu hier matin à La Presse avec trois d'entre eux : Flavie Payette-Renouf, petite-fille de Lise Payette, Philippe Léger et Hadrien Parizeau, petits-fils de Marcel Léger et de Jacques Parizeau.

En gros, ils croient encore au Parti québécois et à l'indépendance du Québec, mais il faudra du temps et beaucoup de travail pour recréer, autour de cette option, l'engouement populaire qui a porté René Lévesque et son équipe au pouvoir en 1976.

Disons d'emblée que Flavie (28 ans, réalisatrice), Philippe (21 ans, étudiant en journalisme à l'UQAM) et Hadrien (26 ans, étudiant en science politique à l'UQAM) sont des indépendantistes convaincus et impliqués au sein du PQ. Ils posent toutefois un regard sans complaisance sur ce parti malmené depuis quelques années et sur le mouvement souverainiste désuni.

Extraits d'une conversation à bâtons rompus avec trois jeunes souverainistes allumés, mais lucides.

Que représente, pour ces jeunes descendants des pionniers du PQ, le 15 novembre 1976, une date élevée au rang de mythologie au Parti québécois, mais qu'ils n'ont pas vécue, évidemment, puisqu'ils sont nés dans les années 80 et 90 ?

Pour Flavie Payette-Renouf, l'élection du PQ, en 1976, représente un « vent d'espoir et d'air frais » et « un moment où tous les espoirs étaient permis », notamment pour les femmes, dont le sort allait passablement s'améliorer grâce au gouvernement Lévesque.

Philippe Léger croit pour sa part que ce fut comme une deuxième révolution tranquille au Québec. « C'est un des seuls moments où toute la société civile s'est réunie derrière un projet, dit-il, et une des seules fois où le mouvement souverainiste avait le vent dans les voiles, à part quelques semaines en 1995. »

Le PQ peut-il recréer un tel moment et rallumer la flamme ?

« Le jour où on va recommencer à faire rêver les gens, on va voir ça monter », avance Hadrien Parizeau, reprenant une phrase maintes fois entendue au PQ ces dernières années.

Il ajoute toutefois : « Les gens y croient, mais ils se disent : "Je ne suis pas sûr que ça va arriver de mon vivant ou je ne suis pas sûr que c'est si important que ça". C'est à nous de vendre notre projet. »

Le PQ doit retrouver son « idéal » s'il veut ramener les jeunes, ajoute Philippe Léger, sans quoi « il sera difficile de faire embarquer plus de monde ».

« Je crois qu'on ne peut pas embarquer un peuple à prendre une décision quand il ne veut même pas prendre la décision et qu'il ne veut pas d'un autre référendum, dit Philippe Léger. Je ne pense pas que l'indépendance du Québec soit pour tout de suite, je ne pense pas que les Québécois soient prêts et que les indépendantistes soient prêts à tenir et gagner un référendum. »

Pour y arriver, il faudra être patients, disent Flavie, Philippe et Hadrien.

« C'est sûr que pour ma grand-mère, c'est un deuil de penser qu'elle ne verra pas l'indépendance de son vivant, dit Flavie Payette-Renouf, mais pour nous, c'est mieux de prendre quelques années [...] plutôt que de se casser la gueule. »

Hadrien Parizeau, dont le grand-père, Jacques, a déjà dit que le mouvement souverainiste était devenu « un grand champ de ruines » après la défaite électorale de 2014, a appuyé Alexandre Cloutier lors de la dernière course à la direction du PQ. Il se dit aujourd'hui à l'aise avec la position référendaire du nouveau chef Jean-François Lisée (pas de référendum dans un premier mandat) à condition, dit-il, que le PQ prépare le référendum en parlant ouvertement de souveraineté et en mettant à jour les études sur le sujet.

Nos trois invités s'entendent pour dire que la relance du PQ passe par la réunification des forces souverainistes, ce qui nécessite la fin des divisions et le retour des jeunes au sein du PQ.

« Est-ce que les jeunes Québécois comprennent bien que le PQ de 76, c'était une coalition de gens de gauche comme de droite, qui avaient une priorité en commun ? J'ai l'impression que les jeunes ont du mal à faire des compromis. » - Flavie Payette-Renouf

La jeune réalisatrice de 28 ans, comme Philippe Léger et Hadrien Parizeau constatent que les jeunes magasinent à la carte et rejettent les partis politiques qui ne défendent pas toutes leurs priorités. Le trio réfute toutefois l'impression largement répandue que les jeunes forment une génération décrochée politiquement.

Selon eux, la crise étudiante du printemps 2012 a fait la preuve que cette jeunesse est capable de se mobiliser.

« Mon grand-père a été très impressionné par cette mobilisation des jeunes, mais aussi par les "casseroles", parce que c'était des jeunes familles qui manifestaient », dit Hadrien Parizeau.

« Ma grand-mère, elle, a été rassurée, reprend Flavie. Elle était heureuse de voir qu'il y avait une relève. »

Flavie, Philippe et Hadrien sont tombés dans la marmite à la naissance. Ils sont politisés et impliqués, ce qui n'est cependant pas le cas de tous leurs contemporains, reconnaissent-ils.

Récemment, une étudiante qui passait une entrevue pour un poste de stagiaire pour un documentaire de Flavie Payette-Renouf lui a demandé : « C'est qui, Lévesque ? »

Anecdotique, peut-être, mais s'ils croient encore au PQ et à son option, Flavie, Philippe et Hadrien savent que la route risque d'être encore très, très longue vers la souveraineté.

Photo Alain Roberge, La Presse

Hadrien Parizeau et Philippe Léger, petits-fils de Marcel Léger et de Jacques Parizeau, entourent Flavie Payette-Renouf, petite-fille de Lise Payette, alors que les trois discutent avec Vincent Marissal.