Le futur chef du Parti québécois, quelqu'un dont un résume souvent le nom par trois lettres, a eu hier soir une indication claire du travail qui l'attend d'ici 2018 s'il souhaite ramener son parti au pouvoir.

La très courte victoire du PQ dans Richelieu, une circonscription que le parti remporte relativement facilement depuis plus de 20 ans, hier soir dans une élection partielle, est certes la première bonne nouvelle depuis des mois pour ce parti malmené aux dernières élections, mais il faudrait souffrir d'excès d'enthousiasme chronique pour y voir le début de la marche victorieuse.

Pour la CAQ, c'est une autre victoire morale, mais en réalité, c'est surtout une défaite crève-coeur pour François Legault, qui avait bien besoin d'une victoire contre le PQ pour se positionner comme «meilleur deuxième».

Une chose était claire dès le déclenchement de cette élection partielle: les libéraux n'étaient pas, de leur propre aveu, dans la course. Lors des dernières élections générales, en avril 2014, Philippe Couillard avait un peu «poussé sa luck» en faisant un arrêt dans Richelieu en fin de campagne, mais son candidat n'avait pu faire mieux qu'une troisième place. La dernière fois que le PLQ a fait élire un député dans cette circonscription, c'était sous Robert Bourassa, en 1989. Hier soir, le PLQ a fait son habituel 25% dans cette circonscription.

Dire, comme on le dit souvent lors de partielles, que les électeurs de Richelieu avaient l'occasion de sanctionner le gouvernement ou de lui envoyer un message nous confinerait au cliché prévisible, mais vide de sens. La bataille dans Richelieu se jouait entre les deux partis qui se présentent comme la véritable solution de rechange aux libéraux en 2018, le PQ et la CAQ.

On a beau dire (surtout du côté des perdants, le lendemain d'une défaite) qu'il ne faut pas trop accorder d'importance aux élections partielles, il suffit de voir les efforts déployés par le PQ et la CAQ dans Richelieu pour comprendre que les deux partis voulaient vraiment gagner cette course. Pour les péquistes, il s'agissait de mettre fin à l'hémorragie qui vide leur parti de leurs forces vives depuis la débâcle du 7 avril dernier. L'humiliant résultat (à peine 8%!) dans la partielle de Lévis, en octobre, avait confirmé la très mauvaise tenue du PQ, relançant du coup les débats sur sa disparition lente et inéluctable.

Pour la CAQ, l'élection partielle de Richelieu était l'occasion de démontrer que le parti est en pleine croissance, qu'il peut trouver de l'espace pour accroître sa présence dans des coins autrefois interdits. Après tout, la CAQ a fait des gains inespérés en avril dans des circonscriptions voisines jadis peintes bleu-PQ, comme Borduas, Saint-Hyacinthe ou Nicolet-Bécancour.

Conserver Lévis, avec un candidat vedette, c'était certes un bon signe pour la CAQ. Rafler Richelieu aurait été un exploit. Dès hier matin, les conseillers de François Legault se préparaient mentalement à la défaite, rappelant qu'il est difficile de mobiliser les électeurs dans une partielle à trois ans des élections, surtout si ces électeurs sont principalement des parents de jeunes familles qui ont probablement autre chose à faire, un lundi soir de mars, que d'aller voter après le boulot-garderie-école-souper-devoirs-dodo quotidien.

La CAQ s'est vaillamment battue, chauffant le PQ, qui règne sans partage sur Richelieu depuis 1994 (Sylvain Simard, Élaine Zakaïb), mais encore une fois, elle semble avoir manqué de temps. La CAQ marque des points, son message touche une bonne couche d'électeurs, certes, mais elle n'arrive pas à «closer», comme disent les agents immobiliers. «Passer proche, c'est bon sur la piste de danse», comme disait le philosophe Pat Burns.

Ce n'est pourtant pas faute d'avoir essayé. Le chef François Legault a passé beaucoup de temps (dont toute la fin de semaine du 28 février) dans Richelieu et ses députés ont aussi donné un bon coup de main au candidat Jean-Bernard Émond.

Le Parti québécois aussi a mis toute la gomme dans Richelieu. En janvier, le caucus du PQ réuni à Saint-Jean a fait un détour dans la circonscription pour appuyer le candidat Sylvain Rochon. Les aspirants chefs, dont Pierre-Karl Péladeau, ont aussi fait des visites remarquées.

Mais avec une victoire aussi courte, il sera difficile pour les péquistes de triompher et d'annoncer le retour des beaux jours. L'hémorragie s'est arrêtée, mais le patient reste bien fragile.

Les péquistes pourront évidemment plaider qu'ils n'ont pas de chef, mais avec toute l'attention dont leur parti bénéficie en ce moment grâce à la course à la direction, ce résultat est certainement en deçà des attentes.

Chose certaine, aucun aspirant chef, notamment le meneur, ne pourra affirmer avoir redonné un élan décisif au PQ à la lumière des résultats dans Richelieu.