Le slalom fiscal serait-il devenu une nouvelle discipline olympique? En tout cas, à en juger par la réaction des partis de l'opposition, la date choisie par le gouvernement Harper pour le dépôt de son prochain budget, le 11 février, pendant les Jeux olympiques de Sotchi, mérite la médaille d'or de la diversion.

Réaction prévisible, mais tout de même un peu futile. Les partis de l'opposition, qui tenaient Stephen Harper dans les câbles à cause des scandales au Sénat à la fin de 2013, reviennent à la charge en 2014 avec... des critiques sur la date du prochain budget. Stephen Harper doit être soulagé! Le pitbull s'est changé en chihuahua...

Personnellement, je serais davantage inquiet de savoir que les grandes affaires de l'État passent après les manifestations sportives, même les Jeux olympiques. Ce n'est pas comme si les médias n'allaient pas couvrir le budget ou comme si les Canadiens n'étaient pas capables de «marcher pis mâcher de la gomme en même temps», pour reprendre l'expression favorite de Denis Coderre.

En toute justice pour les néo-démocrates et Thomas Mulcair et les libéraux de Justin Trudeau, ils n'ont pas parlé que de la date du prochain budget, lundi, jour de reprise des travaux parlementaires à Ottawa. Il a aussi beaucoup été question d'économie, de création d'emplois et, surtout, de protection de la classe moyenne, cible privilégiée de tous les partis en prévision des élections générales de 2015.

Selon les adversaires politiques du gouvernement Harper, le dévoilement du budget pendant les JO servira d'abord à masquer l'insignifiance de ses mesures.

Neuvième budget conservateur

Léger, le prochain budget? Il sera assurément moins spectaculaire que celui de 2015 (le retour des surplus en année électorale, quelle aubaine pour le parti au pouvoir!), mais ce 9e budget de Jim Flaherty permettra néanmoins de mesurer le chemin parcouru par les conservateurs de Stephen Harper depuis qu'ils ont pris le pouvoir, en 2006.

Et du chemin, ils en ont parcouru. Lentement, mais sûrement, Stephen Harper continue de remodeler le Canada à sa manière. Le prochain budget ne devrait pas être différent. Il devrait, notamment, permettre au ministre des Finances de concrétiser la promesse de son parti de permettre le fractionnement des revenus des ménages (comme c'est déjà permis pour les couples retraités). Cette mesure, chère aux conservateurs, permettra aux conjoints d'additionner leurs revenus respectifs pour être ensuite imposés sur la moitié du total (Monsieur gagne 80 000$, Madame, 60 000$ = 140 000$ total, donc 70 000$ chacun).

Selon plusieurs économistes, cette mesure favorise les plus riches, imposés sur un montant moins élevé, mais il est toujours risqué pour les partis de l'opposition de critiquer ce qui est, pour plusieurs, une baisse d'impôt.

Depuis 2006, les conservateurs ont fait des baisses d'impôts et de la réduction de la taille de l'État leurs principaux chevaux de bataille, réduisant la marge de manoeuvre des partis centre gauche. Impossible de revenir en arrière en augmentant les impôts ou la TPS. Difficile de ressortir les grands projets de programmes sociaux nationaux ou de se lancer dans de nouvelles dépenses. Impensable de repousser l'atteinte de l'équilibre zéro et de ne pas promettre de s'y maintenir.

Les libéraux ne pourraient plus arriver aujourd'hui avec un livre rouge bourré de nouvelles dépenses, comme à l'ère Chrétien. Même le NPD, souvent qualifié d'incorrigible dépensier, a dû, sous la direction de Thomas Mulcair, se rapprocher du centre.

La vision Harper

Les partis de l'opposition reprochent - ce qui n'est pas totalement faux - à M. Harper de n'avoir aucun plan, aucune vision pour le Canada, mais ce dernier tient le cap, résolument, vers son but premier: réduire le fardeau fiscal des Canadiens.

Dans ses entrevues de fin d'année, Stephen Harper l'a dit clairement: le retour des surplus permettra à son gouvernement de baisser encore les impôts des contribuables. Parallèlement, les conservateurs continuent de réduire la taille de la machine étatique et de poursuivre le réalignement de la politique étrangère, comme on l'a vu la semaine dernière en Israël.

Les priorités économiques et commerciales restent aussi les mêmes, avec, semble-t-il, une détermination plus forte que jamais à «vendre» le pétrole albertain. Ce sujet, aussi, est délicat pour les partis de l'opposition. Dénoncer l'assouplissement des contrôles environnementaux, c'est une chose; donner l'impression de s'opposer au développement économique du pays, c'en est une autre.

Il en a fait, du chemin, M. Harper, depuis 2006, et le plus grand défi du NPD et du PLC d'ici octobre 2015 sera de trouver le leur.