Après la cinquième ou sixième question des journalistes sur le fonctionnement des référendums d'initiative populaire, Pauline Marois, mal à l'aise, a lancé, un brin exaspérée: vous avez d'autres questions, sur d'autres sujets?

N'en déplaise à Mme Marois, il y a eu d'autres questions sur cette proposition de référendum d'initiative populaire, adoptée par une large majorité de militants réunis en conseil national. Et les journalistes sont restés sur leur faim parce qu'il y a eu plus de questions que de réponses...

La bonne nouvelle pour Pauline Marois, c'est qu'elle a traversé cette importante étape du conseil national sans heurt, qu'elle en ressort non seulement indemne, mais plus forte. On verra bien ce qu'en penseront les Québécois dans les prochains sondages, mais on imagine mal, après ce love-in, un député ou des militants se relever pour lancer une nouvelle fronde.

Au cours de la fin de semaine, Mme Marois a présenté de nouveaux candidats de qualité (retenez le nom de Daniel Breton, notamment), elle a reçu l'appui de la fameuse Madame Paillé, qui songe elle aussi à se présenter, et de Marc Laviolette n'est pas allé au micro pour dire que la «madame ne passe pas». On a même vu un militant apostropher un autre acteur du SPQ-libre, Pierre Dubuc, devant tout le monde pour lui dire qu'il en avait marre des tentatives de déstabilisation de leur chef.

Les députés, les militants, les organisateurs et le personnel politique étaient tous visiblement ravis de la tournure des événements. Un peu surpris aussi.

«Bienvenue chez les apôtres de l'amour infini», m'a dit à la blague le député Stéphane Bergeron. Un de ses collègues, Maka Kotto, m'a dit avoir l'impression de «revenir à la vie».

Quant à Pauline Marois, elle affirme maintenant «avoir confiance» que la crise soit terminée et qu'elle et son parti pourront maintenant se concentrer sur les prochaines élections.

La question du leadership est apparemment réglée, mais Pauline Marois a vraisemblablement payé un fort prix pour y arriver. Elle qui s'était opposée personnellement aux référendums d'initiative populaire lors d'un conseil national en 2008 a dû plier cette fois devant son député Bernard Drainville, qui a mené la bataille en faveur de cette proposition.

Pendant que M. Drainville plaidait devant les militants en faveur de cette proposition, Pauline Marois est restée à l'extérieur de la salle, attendant que le vote soit passé pour aller s'asseoir à sa place.

L'idée de permettre aux citoyens de lancer des référendums sur des sujets d'intérêt public peut paraître séduisante, mais elle ouvre aussi la porte à ce qu'on appelle parfois la «tyrannie de la majorité».

Au début des années 2000, par exemple, bien des Canadiens souhaitaient un référendum national sur la question du mariage gai, mais Jean Chrétien, alors premier ministre, avait tranché en affirmant qu'on ne doit jamais soumettre le sort d'une minorité à la décision (souvent émotive) de la majorité.

En ajoutant «notamment sur la question de la souveraineté du Québec» au texte de la proposition et en insistant pour dire que celle-ci est un outil de plus pour la souveraineté, les promoteurs de cette idée ont accroché un lourd boulet à la cheville de Mme Marois. Jean Charest, qui voit le PQ retourner sur son terrain de prédilection (le débat constitutionnel), sautera sur l'occasion pour répéter que le PQ est obnubilé par les référendums, dont les Québécois ne veulent pas entendre parler.

François Legault, lui, en profitera pour rappeler qu'avec la CAQ, il n'y aura pas de référendum pour au moins 10 ans.

Mme Marois, qui ne voulait pas parler de «mécanique référendaire», de date, du quand et du comment, se retrouve prise avec un débat technique touchant précisément ces sujets.

En point de presse, elle a repoussé toutes les questions sur le seuil minimal de signatures de citoyens pour déclencher un référendum d'initiative populaire ou sur son effet contraignant ou non sur le gouvernement. On sentait clairement que la chef péquiste préfèrerait que l'Assemblée nationale ou le gouvernement conserve le dernier mot, mais elle ne l'a pas dit en toutes lettres.

Le flou entourant cette proposition (combien de signatures requises, peut-on exclure certains sujets, le résultat de ces référendums sont-ils contraignants) a même obligé Mme Marois à se réfugier derrière un «on verra», une expression accolée à François Legault par ses adversaires politiques.

De toute évidence, les péquistes étaient pressés, cette fin de semaine, d'adopter des propositions audacieuses de changement pour donner l'impression de faire de la politique «autrement», mais dans la précipitation, on a entendu d'autres «on verra»

Ils ont adopté, par exemple, l'idée d'une Chambre des régions, même si, pour résumer une militante, «personne ne sait exactement de quoi il s'agit».

Le PQ a aussi adopté le vote à 16 ans, une idée qui ne manquera pas de soulever des débats politico-juridiques. Sans compter qu'on accusera le PQ d'opportunisme politique (des militants sont venus au micro pour dire que le vote des jeunes de moins de 18 ans serait bénéfique lors d'un prochain référendum).

Stratégiquement, il est un peu curieux de prétendre faire de la politique autrement pour se rapprocher des électeurs en adoptant une idée rejetée par 85% d'entre eux...

Cela dit, les péquistes libérés des lancinantes questions de leadership, ont pu se concentrer sur les propositions de réformes. Certaines plairont aux électeurs, comme les élections à date fixe, l'interdiction de publier des sondages 48 heures avant un scrutin (ce qui est déjà la norme dans les grands médias...) et le projet d'adoption d'une loi antitransfuge.

Pauline Marois, pour sa part, peut se féliciter d'être encore en poste, et même plus solidement qu'avant, mais son défi premier reste le même: elle doit reconquérir l'électorat.

Le défi reste le même et il reste entier.

Pour joindre notre chroniqueur: vincent.marissal@lapresse.ca