Près d'un Québécois sur deux souhaite un changement de gouvernement à Ottawa ; à peine un quart d'entre eux pensent que Stephen Harper est le chef le mieux placé pour occuper le poste de premier ministre ; le taux de satisfaction envers le gouvernement conservateur est toujours en dessous de la barre des 50%.

Pourtant, les conservateurs remontent légèrement dans les intentions de vote et les libéraux perdent des appuis.

Conclusion : les Québécois n'aiment pas beaucoup Stephen Harper, mais ils aiment encore moins les élections. Et ils ne voient pas en Michael Ignatieff une solution de rechange acceptable.

Le changement de ton de Michael Ignatieff, qui a annoncé à la fin de l'été qu'il entendait défaire les conservateurs à la première occasion, n'aura pas été payant pour les libéraux. Au contraire.

Moins d'un an après les dernières élections, et au moment où l'économie prend du mieux, il semble que les Québécois puissent encore vivre avec Stephen Harper.

À la question «Lequel des chefs politiques ferait le meilleur premier ministre?», M. Harper a gagné cinq points depuis le mois dernier et neuf points depuis juin. Michael Ignatieff est toujours premier à cette question, mais il a toutefois perdu sept points en un mois (de 35% à 28%), alors que ce devait être sa rentrée et la fin du gouvernement Harper, claironnaient les libéraux en juin.

De toute évidence, l'événement de la pré-rentrée, la fameuse vidéo de Stephen Harper à Sault-Sainte-Marie, n'a pas nui aux conservateurs. Au contraire, on dirait bien que les Québécois aiment mieux un Stephen Harper frondeur qu'un Stephen Harper conciliant.

Autre «victoire» (sur papier, en tout cas) du chef conservateur : une forte majorité de Québécois (68% contre 25%) souhaitent maintenant l'élection d'un gouvernement majoritaire à Ottawa aux prochaines élections.

Michael Ignatieff aurait-il raté sa fenêtre en ne faisant pas tomber le gouvernement le printemps dernier ? Peut-être, mais la question pour les libéraux est maintenant de savoir s'ils doivent continuer de jouer le tout pour le tout ou s'ils ne devraient pas plutôt se replier dans l'espoir de se relancer.

Les récents sondages au Canada donnent une nette avance aux conservateurs et, au Québec, on constate maintenant l'essoufflement du phénomène Ignatieff. La querelle autour d'Outremont, suivie de la démission de Denis Coderre de son poste de lieutenant, n'aidera certainement pas les libéraux au Québec.

À 26%, les libéraux de Michael Ignatieff ne sont pas loin des 24% obtenus par Stéphane Dion l'an dernier.

À 21%, les conservateurs se rapprochent aussi de leur score du scrutin d'octobre 2008 mais, dans leur cas, c'est grâce à une remontée de quatre points en un mois et de huit points depuis juin.

Les libéraux ont perdu beaucoup d'intentions de vote chez les francophones : huit points de moins en deux mois (de 30 à 22%). Situation inverse chez les conservateurs, qui prennent huit points dans la même période (de 12 à 20%). Le Bloc québécois aussi prend des forces : un gain de trois points en général et de quatre chez les francophones depuis un mois.

Les conservateurs pourraient donc garder leurs sièges au Québec et en prendre ailleurs, surtout en Ontario.

Dans les circonstances, M. Harper n'aura peut-être pas envie d'être «sauvé» encore longtemps par Jack Layton.

Charest dans une bulle

Jean Charest voulait avoir sa seule paire de mains sur le volant.

Un peu plus de neuf mois après les élections, le voilà bien assis au volant d'une grosse voiture, bien protégé par des sacs gonflables tout autour de lui.

La démission de son ministre du Travail, David Whissell, et l'imposition intempestive du bâillon n'ont eu apparemment aucun effet sur l'électorat.

Jean Charest devrait profiter de cet état de grâce en début de mandat. S'il veut redresser les finances publiques par des décisions impopulaires, le climat politique n'aura jamais été aussi favorable.