Après les soldes du Vendredi fou, c'était au tour des aubaines du Cyberlundi de faire saliver les consommateurs, hier. Mais cette vague de soldes qui lance le début de la saison du magasinage des Fêtes cache parfois de faux rabais.

Il est si simple pour les commerçants de gonfler leurs prix habituels pour laisser croire à des aubaines fracassantes qui deviennent un outil de marketing très puissant.

Par exemple, en surfant sur le web hier, j'ai trouvé un téléviseur intelligent DEL 4K 75 pouces de la marque Samsung en vente à 2024 $ chez un grand détaillant de matériel électronique. «Meilleure aubaine. Économisez 1500 $. Fin de solde le : 30 novembre 2017», clamait le site web.

Mais ce n'est pas la peine de vous précipiter pour profiter de ce rabais de plus de 40%. Le même téléviseur est disponible chez Costco au prix courant de 2022 $. C'est 2 $ de moins que le prix soldé. En tout temps.

Remarquez que la problématique des pseudo-rabais n'est pas propre au Cyberlundi, quoique ce nouveau happening du magasinage en ligne soit particulièrement propice à ce genre de pratiques déloyales.

Apparu au Canada il y a 10 ans, le Cyberlundi est maintenant la journée la plus achalandée de l'année pour les achats sur le web. Certains commerçants étirent maintenant leurs rabais en ligne jusqu'au jeudi suivant, dans le cadre de ce qu'il est maintenant convenu d'appeler la Cybersemaine.

Ce phénomène importé des États-Unis prend de l'ampleur chez nous. Plus de deux Québécois sur cinq prévoyaient profiter des rabais du Vendredi fou et du Cyberlundi, soit une augmentation de 20% par rapport à l'année précédente, d'après un coup de sonde du Conseil québécois du commerce de détail.

Et pratiquement la moitié des Québécois avaient l'intention de faire des achats sur le web à cette occasion, surtout des produits électroniques et des vêtements.

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Si certains commerçants offrent réellement des occasions en or, d'autres profitent de la frénésie pour appâter la clientèle avec des rabais gonflés à l'hélium.

La semaine dernière, Sears Canada s'est justement retrouvé sous la loupe du Bureau de la concurrence qui aurait reçu des plaintes selon lesquelles le commerçant en faillite aurait haussé le prix de certains produits avant de lancer sa vente de liquidation.

Ce ne serait pas la première fois que Sears trafique ses prix. En 2005, le détaillant avait été reconnu coupable d'annoncer de faux rabais sur les pneus à longueur d'année. Le Bureau de la concurrence lui avait collé une amende de 500 000 $.

Cette année, La Baie s'est aussi retrouvée dans le viseur du Bureau de la concurrence qui suspecte le commerçant d'avoir gonflé les prix habituels de certains matelas et sommiers pour laisser croire à d'importantes réductions.

Rien de neuf. En 2014, La Baie avait dû payer une amende de 32 510 $, après que l'Office de la protection du consommateur (OPC) l'eut reconnue coupable d'avoir gonflé artificiellement les prix de ses matelas pour laisser croire à des aubaines du tonnerre.

Quand je vois des commerçants qui se font pincer plus d'une fois pour la même raison, je me demande si les pénalités qu'on leur impose sont suffisamment dissuasives pour les encourager à assainir leurs pratiques.

Mais dans certains cas, l'intervention des autorités porte ses fruits. À la suite d'une enquête du Bureau de la concurrence, le géant américain du commerce en ligne Amazon a accepté de changer son modus operandi, cette année. Des deux côtés de la frontière, par-dessus le marché. Tant mieux!

Mais les chiens de garde des consommateurs n'ont pas des yeux tout le tour de la tête. Et la publicité trompeuse reste un problème endémique dans le commerce de détail, comme l'a déjà fait ressortir une vaste enquête d'Option consommateurs en 2011. L'organisme avait alors démasqué une dizaine de magasins de meubles qui faisaient miroiter de pseudo-rabais.

C'est à croire que les commerçants prennent leurs clients pour des valises... un autre produit qu'on a l'habitude de voir en solde à 70% à longueur d'année.

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Heureusement, avec l'internet, les consommateurs sont mieux outillés pour débusquer les faux rabais.

Avant de succomber à un rabais apparemment exceptionnel, il est assez simple de comparer les prix avec ceux d'autres commerçants en ligne. En quelques clics, vous aurez l'heure juste. Il n'y a rien de tel que de magasiner.

Mais encore faut-il avoir vraiment besoin du produit. Parfois, on fait des emplettes parce qu'il y a des méga-ventes, mais on s'en veut par la suite car ce n'était pas exactement ce dont on avait besoin.

Et encore faut-il avoir les moyens d'acheter. Même si vous dénichez un véritable rabais de 30%, vous ne serez pas gagnant si vous n'avez pas l'argent dans votre portefeuille. En laissant la facture traîner sur votre carte de crédit, il vous en coûtera de 20 à 30% d'intérêt à la fin de l'année.

Non, la surconsommation n'est pas une aubaine.