Vous pensiez qu'ils étaient morts ? Pas le moins du monde. Les fonds fiscalement avantageux sont bien en vie, même si Ottawa a interdit certains tours de passe-passe lors du budget 2013.

Et vous seriez bien fous de vous priver de ces fonds, surtout si vous êtes un investisseur à revenus élevés qui a déjà maximisé son REER et autres comptes enregistrés à l'abri de l'impôt.

Mais avant d'aller plus loin, faisons la part des choses.

Premièrement, il y a les fonds qui utilisaient des « opérations de requalification », une stratégie reposant sur des produits dérivés qui permettaient de transformer les revenus d'intérêt (imposables en entier) en gains en capital (imposables seulement à moitié) de manière à couper en deux la facture d'impôt des investisseurs. Un miracle digne des noces de Cana!

Oubliez ces fonds. Leur chien est mort. Ou presque, car Ottawa a accordé un sursis aux fonds existants qui peuvent maintenir les stratégies déjà en place jusqu'à l'échéance de leurs produits dérivés. Pour les investisseurs, c'est l'occasion de profiter de cet avantage fiscal jusqu'à la dernière goutte.

Mais l'industrie n'a pas dit son dernier mot. Au début de mai, la famille de fonds négociés en Bourse (FBN) Horizons a lancé le Horizons Canadian Select Universe Bond ETF (HBB) qui utilise un autre genre de produit dérivé pour offrir des obligations fiscalement avantageuses.

Au lieu de détenir directement des obligations, le fonds conclut un échange avec un contrepartiste, la Banque Nationale, qui accepte de lui verser le rendement total de l'indice obligataire (capital et intérêts amalgamés).

Tant et aussi longtemps qu'il conserve le FNB, le détenteur ne reçoit pas de distribution imposable. Et lorsqu'il vend, ses profits accumulés sont considérés comme du gain en capital. Le tout moyennant des frais annuels de 0,3 %. C'est un prix modeste à payer pour réaliser des économies fiscales importantes, estime la firme d'évaluation de fonds Morningstar Canada.

Structures corporatives

Parlons maintenant des fonds en structures corporatives qui existent depuis longtemps et qui n'étaient aucunement visés par le budget 2013.

Ces produits, qu'on appelle aussi « catégories », sont de proches cousins des fonds communs de placement. Principale distinction : les portefeuilles sont constitués en corporations, plutôt qu'en fiducies.

Comme les différentes catégories d'une même famille sont regroupées sous un seul parapluie corporatif, l'efficacité fiscale est plus élevée. Les dépenses réalisées dans certaines catégories (ex. : actions canadiennes) peuvent être utilisées pour réduire les revenus dans d'autres catégories (ex. : obligations).

Au final, la structure parvient à annuler les revenus d'intérêt, et le détenteur reçoit principalement des distributions sous forme de gain en capital.

Sur un portefeuille d'obligations qui verse 4 % d'intérêt par exemple, le détenteur paiera tout au plus 1 % d'impôt au lieu de 2 %, ce qui est loin d'être négligeable, explique Éric Brassard, CPA, planificateur financier et conseiller en placement auprès de Brassard Goulet Yargeau et Patrimoine Hollis.

Notez que les structures corporatives permettent aussi de réduire l'impôt sur les dividendes et les revenus étrangers, qui coûtent plus cher d'impôt que le gain en capital.

Autre avantage des structures corporatives : tant et aussi longtemps qu'il ne vend pas, l'investisseur reste à l'abri du fisc. Cela permet de différer l'impôt et de déclencher le gain au moment le plus opportun, par exemple une année où ses revenus et son taux d'imposition sont inférieurs.

Ce n'est pas tout. Comme les différentes catégories se trouvent sous un seul parapluie corporatif, l'investisseur peut aussi changer de fonds, au sein d'une même famille, sans incidence fiscale. Cela permet de rééquilibrer le portefeuille sans payer d'impôt.

Évidemment, il ne faut pas être obsédé par l'impôt. Ce n'est pas le seul critère d'investissement. Il faut se demander : est-ce que le gestionnaire est efficace ? Est-ce que les rendements potentiels sont attrayants ? Est-ce que les frais sont raisonnables ?

La beauté de l'affaire, c'est que les frais des structures corporatives ne coûtent pas plus cher que les fonds ordinaires. Enfin, pas dans les structures matures qui existent depuis longtemps comme celles de Placements CI, des Fonds Dynamique, de Fidelity ou des Placements Mackenzie, par exemple.

« Il n'y a pratiquement pas de différence de frais de gestion, assure M. Brassard. D'autres désavantages ? Honnêtement, on n'en voit pas. »

Espérons seulement que le fisc et l'État ne viendront pas bousculer ces structures corporatives. Il est vrai que changer l'eau en vin, ou les intérêts en gains en capital, peut attirer l'attention.