La génération des baby-boomers, plus portée sur la dépense que sur l'épargne, est sur le point de lancer une nouvelle tendance socio-économique: la déconsommation.

La quoi? La déconsommation: «Phénomène de décélération du marché de consommation», comme l'indique l'Office québécois de la langue française. Lire: réduire le gaspillage; éviter les produits de luxe; privilégier le rapport qualité-prix au lieu des aspects esthétiques d'un produit.

Que se passe-t-il? Les boomers en ont-ils marre de la société de consommation qu'ils ont inventée? Non! Mais leur plaisir de consommer s'estompe face à la crainte de manquer d'argent à la retraite.

À preuve, trois boomers sur quatre ont moins envie d'acheter qu'avant, fait ressortir le livre blanc sur les baby-boomers et l'argent qui sera diffusé la semaine prochaine par l'émetteur de cartes de crédit Capital One Canada.

D'autres études montrent que la déconsommation prend de la vitesse au Québec depuis la crise du crédit de 2008, en particulier chez les baby-boomers.

Selon le Baromètre de la consommation responsable 2013, les deux tiers des Québécois (67%) ont renoncé à acheter des produits dont ils n'avaient pas besoin, tandis que plus de la moitié de la population (53%) a diminué sa consommation de manière générale. Les personnes le plus concernées sont les femmes de 45 à 64 ans.

Ne vous y trompez pas, la consommation continue de faire partie de l'ADN des boomers. Mais par la force des choses, ils deviennent des consommateurs plus raisonnables, plus réfléchis, plus stratégiques.

Alors que les boomers étaient le tremplin idéal pour le lancement de produits, on constate qu'ils ont décroché de la course au plus récent gadget. À peine 29% d'entre eux aiment être informés des nouveautés, moins que toutes les autres générations.

Autrefois reconnus pour leur fidélité aux grandes marques, la moitié (48%) des boomers sont maintenant prêts à adopter une marque moins chère, contre seulement 39% pour l'ensemble de la population.

De manière générale, les boomers éprouvent moins de satisfaction à consommer des biens que les autres générations. Ils prennent davantage plaisir au train-train quotidien et à des activités comme le jardinage, le bricolage ou la pêche.

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Mais ce sont surtout les plus jeunes boomers qui prennent le virage de la déconsommation, ceux qui sont dans la cinquantaine et qui travaillent encore.

Il faut dire qu'il existe un clivage financier important chez les boomers. «Le contexte économique qui prévaut lorsqu'on entreprend sa carrière est déterminant pour tout le reste de la vie financière», rappelle Youri Rivest, vice-président de CROP qui a participé au livre blanc.

La première vague de baby-boomers, aujourd'hui dans la soixantaine, est arrivée sur le marché du travail dans un contexte de prospérité économique, a gravi les échelons rapidement et s'est acheté une maison à bas taux d'intérêt.

Aujourd'hui, cette «génération lyrique» est à la retraite. Bénéficiant largement d'un régime de retraite (69%), elle a quitté le marché du travail très tôt, à 57 ans.

Le portrait est complètement différent pour la deuxième vague de boomers. Entrés sur le marché du travail en pleine récession, ils ont vécu la précarité d'emploi, le choc pétrolier, les taux d'intérêt à plus de 15%.

Encore au boulot aujourd'hui, ils sont beaucoup moins nombreux (48%) à profiter d'un régime de retraite. Ils ne pensent pas se retirer avant 63-64 ans, soit 6 ou 7 ans plus tard que les retraités actuels.

Les boomers non retraités sont nettement plus angoissés. Les deux tiers craignent de manquer d'argent dans le futur. Déjà, la moitié n'arrive pas toujours à boucler les fins de mois.

Il est particulièrement troublant d'apprendre que 43% d'entre eux ne remboursent pas toujours le solde de leur carte de crédit à la fin du mois. Consommateurs expérimentés, ils devraient pourtant savoir qu'en traînant des dettes sur une carte de crédit, ils paient 20% d'intérêt.

«La carte de crédit est un outil transactionnel. Nous, on veut qu'ils paient leur solde», assure Pascal Bricault, directeur de Capital One.

Très friands de cartes assorties de récompenses, particulièrement de primes voyages, les boomers devraient plutôt se concentrer sur le remboursement de leur solde en optant pour une carte à taux réduit ou en consolidant leurs dettes.

Ils devraient aussi se dépêcher de consulter un expert pour dresser un plan de retraite, ce que seulement le tiers des boomers ont fait.

Enfin, ils devraient peut-être envisager la retraite de manière plus progressive. La majorité des boomers (59%) qui travaillent encore pensent avoir besoin d'un revenu d'appoint à la retraite, mais seulement 19% veulent travailler à temps partiel.

Or, il faut oublier l'époque monolithique de Liberté 55, où tout était noir ou blanc. La société s'en va vers un modèle où il y aura plusieurs nuances de gris durant la transition du travail à la retraite.

C'est ce qu'on pourrait appeler la conciliation travail-retraite.

Impôt et gain en capital

Dans ma chronique de la semaine dernière, je vous disais qu'il serait possible d'augmenter l'impôt sur le gain en capital, mais seulement sur les profits à court terme, afin de renflouer les coffres de l'État. J'aurais dû préciser que les profits réalisés par des spéculateurs professionnels sont déjà imposés au maximum.

Toutefois, la ligne est parfois assez mince entre le spéculateur professionnel dont les profits sont considérés comme des revenus d'entreprise (imposables en entier) et le simple investisseur actif dont les profits sont considérés comme des gains en capital (imposables à moitié).