Il vous reste à peine 10 jours pour envoyer votre déclaration de revenus au fisc avant la date butoir qui a été reportée au 5 mai exceptionnellement cette année.

À l'heure où l'on se parle, près du tiers des contribuables n'ont pas encore fait leurs devoirs. Et chaque année, 10% des contribuables passent tout droit ou, pis encore, ne font carrément pas leur déclaration.

Voici une histoire d'horreur qui ramènera les brebis égarées dans le droit chemin...

C'est l'histoire d'une pénalité complètement disproportionnée: 2500$ pour un contribuable à faibles revenus qui doit à peine 12$ d'impôt. C'est plus de 200 fois le montant en retard! Ça donne mal au coeur.

D'accord, Jean-François a été très négligent. De 2009 à 2012, il n'a pas fait ses déclarations de revenus. «Je pensais que ce n'était pas tellement grave, parce que je recevais toujours un petit remboursement d'impôt», explique-t-il, penaud.

Pis: il n'a pas fait ses déclarations de TPS/TVQ de 2005 à 2012. Il faut dire qu'il faisait seulement quelques milliers de dollars comme travailleur autonome ces années-là. Mais ça ne l'excuse pas. Il le sait.

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L'automne dernier, il a reçu un avis de cotisation grossièrement exagéré de 111 000$.

Le fisc explique que ces «cotisations estimatives» correspondent à un «montant minime» pour un commerce en exploitation, soit 3600$ par année pour la TPS de même que pour la TVQ. Avec huit ans d'arrérages, ça fait un chiffre énorme.

- On fait ça pour saisir les contribuables. C'est pratique courante, raconte la représentante de Revenu Québec à Jean-François.

Mission accomplie! Jean-François se précipite chez un comptable qui met de l'ordre dans ses affaires. Au total, il doit 1230$ de taxes. C'est 100 fois moins que le montant réclamé par le fisc.

Mais évidemment, il faut ajouter les pénalités et les intérêts. Combien exactement?

- Je ne suis pas capable de calculer les intérêts qui seront mis à jour dans le prochain avis de cotisation, lui répond la dame au bout du fil en lui donnant une estimation.

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Mais peu importe le montant, Jean-François n'a pas les moyens de payer, lui qui doit faire vivre deux enfants avec un salaire de 25 000$. Revenu Québec accepte alors de patienter jusqu'en février, date à laquelle il recevra un remboursement d'impôt du fédéral.

L'hiver arrive. Les remboursements d'impôt sont remis à Revenu Québec. Jean-François reçoit un nouvel avis de cotisation pour la TPS/TVQ. Dès le lendemain, il fait un chèque de 1383$ à Revenu Québec. Ouf! Tout est réglé, se dit-il. Pas si vite...

Début mars, le téléphone sonne. «Vous n'avez pas payé vos dettes. Vous n'avez pas tenu parole», lui lance la préposée de Revenu Québec. Sûr de lui, Jean-François propose d'envoyer une preuve d'encaissement du chèque.

S'ensuit une série d'appels, de messages sur la boîte vocale, de nouvelles accusations contre Jean-François. «Revenu Québec est comme un labyrinthe!», s'exclame le contribuable.

Finalement, le chèque est retrouvé. Voilà au moins ça de gagné.

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Mais la situation se corse.

Fin mars, le contribuable reçoit un avis de cotisation pour ses impôts personnels de 2010. Revenu Québec lui colle une pénalité de 2500$, alors qu'il avait 12$ d'impôt à payer cette année-là.

Selon la loi, Revenu Québec peut imposer une pénalité de 25$ par jour, jusqu'à concurrence de 2500$, à un particulier qui ne s'est pas conformé à une demande péremptoire.

En 2012, le fisc a expédié une demande péremptoire à Jean-François, par courrier recommandé, l'exhortant à faire ses impôts, faute de quoi il s'exposait à une pénalité de 2500$. Mais Jean-François ne s'en est pas formalisé. Et vlan! 2500$.

Qu'un contribuable doive 12$ ou 12 000$, pour le fisc, c'est du pareil au même. «Le solde de 12$ ne change rien au fait qu'il a omis de se conformer à la demande qui lui avait été faite», justifie Revenu Québec.

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Mais ce n'est pas fini. Toujours à la fin de mars, Jean-François reçoit un avis de la direction des recouvrements l'intimant de payer 2012$ avant le 4 avril, sinon des frais de recouvrement de 10% seront ajoutés.

C'est l'histoire des taxes qui rebondit. Jean-François pensait avoir réglé ses dettes, mais la préposée avait sous-estimé les pénalités. Quelle gaffe!

Pour la TVQ, le fisc ajoute une pénalité de non-paiement de 15%. Pour la TPS, il faut ajouter une pénalité de 1% + 0,25% pour chaque mois entier de retard pour un maximum de 4% au total. S'ajoute également une pénalité de 250$ pour non-production de TVQ pour chacune des 8 années (2000$). Et bien sûr, il ne faut pas oublier les intérêts!

Résultat: Jean-François doit encore 2025$ au fisc pour les taxes et 1594$ pour les impôts. Grand total de 3619$. Essentiellement des pénalités.

Quel gâchis!

Démuni, Jean-François a déposé une plainte à la Direction des plaintes de Revenu Québec et au Protecteur du citoyen.

Il pourrait aussi faire une demande d'annulation de la pénalité. Revenu Québec peut annuler des pénalités si une personne a notamment vécu une situation exceptionnelle et indépendante de sa volonté qui l'a empêché de respecter ses obligations fiscales.

Le fisc peut aussi annuler les pénalités si le contribuable est dans l'incapacité permanente de payer, ce qui n'a pas été démontré pour Jean-François, selon Revenu Québec.

Bref, ce n'est pas dans la poche.

Les pénalités de Revenu Québec

Déclaration de revenus en retard (particulier): Pénalité de 5% de la somme impayée dès que vous dépassez la date limite, plus 1% par mois de retard jusqu'à concurrence de 12%, pour une pénalité maximale de 17% après un an.

Non-production de déclaration de revenus (entreprise ou particulier en affaires): Pénalité de 25$ par jour, jusqu'à concurrence de 2500$. Cette pénalité s'ajoute aux pénalités pour déclaration en retard.

Taxes remises en retard: Pénalité de 7% de la somme impayée pour un retard de 7 jours ou moins, de 11% pour un retard de 8 à 14 jours et de 15% pour les retards plus longs. Plus une pénalité de 250$ par année de non-production.

Intérêts: En plus des pénalités, il faut ajouter 6% d'intérêt sur les soldes impayés.

Frais de recouvrement: 10%