«Vous aimeriez paraître dix ans plus jeune en quelques jours? Alorè peut le faire pour vous. C'est comme un facelift dans une bouteille. Obtenez votre échantillon gratuit maintenant.»

En août dernier, alors que Lise travaillait à l'ordinateur, une fenêtre publicitaire est apparue à l'écran pour lui offrir un échantillon d'un produit de beauté supposément très efficace pour 5,99 $, incluant les frais postaux.

Pourquoi pas ? Il n'y a pas grand-chose à perdre, se dit la dame. Elle remplit le formulaire de commande. Mais juste au moment où la transaction s'achève, la fenêtre se ferme et s'ouvre à nouveau. Ce n'est pas clair si la transaction a été bien conclue. Lise remplit donc le formulaire à nouveau.

Le 3 août, elle reçoit non pas une, mais deux confirmations d'achat, l'une de 6,36 $ pour le produit Alorè, l'autre de 6,38 $ pour Lorelia, un produit semblable. Les deux produits lui parviennent plusieurs jours plus tard.

Mais la cliente sursaute en ouvrant son relevé de carte de crédit qui compte un achat de 100,10 $ pour Alorè et un autre de 102,75 $ pour Lorelia. Elle appelle immédiatement l'émetteur de sa carte de crédit qui l'informe qu'un autre montant de 202,85 $ pour Lorelia et Alorè va aussi apparaître sur sa prochaine facture.

«Je me retrouve avec des frais de 400 $ avant même d'avoir le temps de réagir, proteste Lise. C'est insensé!»

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De nombreux internautes sont tombés dans le panneau. On trouve des dizaines de plaintes de consommateurs sur des sites internet comme Scambook (www.scambook.com) et RipoffReport (www.ripoffreport.com). D'ailleurs, le Better Business Bureau (www.bbb.org) décerne un «F» à l'entreprise Lorelia Skin Cream, sa pire note.

C'est toujours la même histoire. Les clients donnent leur numéro de carte de crédit, pensant payer l'expédition de leur échantillon gratuit. Mais en passant la commande, ils se retrouvent abonnés à un service de livraison mensuel.

Sur son site web, Lorelia explique en petits caractères que les clients doivent retourner le produit dans la période d'essai de 14 jours, autrement c'est comme s'ils donnaient leur consentement à ce fameux abonnement. Tordu.

Mais ce n'est pas tout. La fameuse période d'essai est calculée à partir de la date de la commande, et non pas celle de la réception du produit. Dans le cas de Lise, les produits ont été livrés plusieurs jours plus tard, ce qui fait en sorte que la période d'essai était écoulée avant même qu'elle puisse vraiment les tester.

De son côté, l'entreprise ne perd pas son temps. Dès le 14e jour, elle facture le produit qui était pourtant présenté comme un échantillon gratuit. Lise, qui avait commandé le 3 août, a donc été facturée le 16 août. Mais comme les relevés de carte de crédit arrivent plus tard, Lorelia a souvent le temps de facturer un deuxième mois avant que le client ne s'en aperçoive, comme dans le cas de Lise.

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Si je vous raconte la mésaventure de Lise, c'est pour vous démontrer à quel point la «rétrofacturation» est une arme efficace pour les consommateurs québécois.

Malheureusement, la rétrofacturation n'est pas encore tout à fait entrée dans les moeurs, même si le mécanisme est écrit noir sur blanc dans la Loi sur la protection du consommateur (LPC) depuis décembre 2007.

Les Québécois qui achètent un produit sur internet ont le droit de demander l'annulation du contrat si le commerçant n'envoie pas le produit ou ne respecte pas l'entente. Quand le fournisseur refuse, le client peut exiger que l'émetteur de sa carte de crédit lui «rétrofacture» le montant.

Malheureusement, les entreprises se font parfois tirer l'oreille. Quand Lise a demandé à Lorelia d'annuler sa commande, l'entreprise a mis fin à son abonnement, mais a refusé de lui rembourser ses 400 $. L'émetteur de sa carte de crédit a aussi refusé de la rembourser, sous prétexte que les clauses du contrat figurent sur le site web de Lorelia.

Peut-être, mais la loi est plus exigeante que ça. Selon la LPC, le commerçant doit fournir au client une copie du contrat dans les 15 jours suivant l'achat. Ce contrat doit indiquer le nom du client, son adresse, la date de l'achat ; le nom de l'entreprise, son adresse et numéro de téléphone; une description détaillée des biens vendus, le prix du bien incluant tous les frais connexes (taxes, droits de douane, frais de transport, etc.), le coût total de l'achat, les modalités de paiement, etc.

Ces renseignements doivent être présentés de façon claire et compréhensible, et être portés expressément à la connaissance du client, précise le site web de l'Office de la protection du consommateur (OPC) qui explique en détail les rouages de la rétrofacturation.

Or, Lise n'a jamais reçu de contrat, à part une confirmation de commande qui ne comprenait aucune indication claire sur le véritable prix du produit. Selon la loi, elle peut donc exiger l'annulation et la rétrofacturation de l'achat.

Mais attention, il faut agir vite et suivre les règles à la lettre.

Les consommateurs qui n'ont pas reçu de contrat après avoir commandé un produit sur internet disposent de 30 jours après l'achat pour demander l'annulation directement au commerçant. Le client doit aviser l'entreprise verbalement ou par écrit et lui retourner le produit.

Si le commerçant ne rembourse pas dans les 15 jours suivants, le client dispose ensuite de 60 jours pour faire une demande écrite de rétrofacturation à l'émetteur de sa carte de crédit en fournissant toute une série de renseignements. Pour connaître la marche à suivre, consultez le site de l'OPC.

Tant qu'à y être, pourquoi ne pas déposer une plainte à l'OPC et lui envoyer une copie de votre demande de rétrofacturation? Ça ne peut pas nuire.