Quand j'ai commencé à couvrir l'industrie des services financiers, il y a plus de 15 ans, on appelait des courtiers en valeurs mobilières... des courtiers, tout simplement. C'était clair. Aujourd'hui, les investisseurs ont besoin d'un lexique pour comprendre qui fait quoi dans l'industrie des services financiers.

Les courtiers préfèrent qu'on les appelle conseillers financiers, conseillers en placement, gestionnaires de portefeuille, consultants en finances personnelles, planificateurs financiers, gestionnaires privés, conseillers en gestion de patrimoine, spécialistes de la retraite et j'en passe.

Étrangement, aucun de ces titres n'a de valeur légale. Dans la loi, on utilise le terme «courtier» pour désigner la firme. Et les individus qui travaillent pour la firme de courtage sont des «représentants inscrits». Avec un titre officiel aussi peu séduisant, on comprend que les représentants s'inventent d'autres noms. Mais certains y vont fort...

Dans les grandes firmes de courtage, les courtiers prospères portent le titre honorifique de vice-président ou de premier vice-président. En réalité, ils ne sont pas plus vice-présidents que les employés de Wal-Mart ne sont associés. Ces courtiers n'ont aucun rôle administratif dans la firme, aucune portée de gestion. Mais un titre de vice-président, ça paraît bien sur une carte professionnelle!

Et je ne vous parle pas de toutes ces lettres de noblesse: CFA, MBA Ph.D, LL.B, PAA, CEO, CFO, M. Fisc, Pl. Fin, FICA, FSA, BAA, Adm. A, CGA, CMA, CA... Vous me suivez toujours?

Avec cette prolifération de titres d'emploi et de titres professionnels, je crois que la clientèle n'y voit plus clair. Tout cela porte à confusion.

Pour prévenir la fraude, les organismes de réglementation pressent les investisseurs de vérifier si leur conseiller possède réellement la licence nécessaire pour exercer son métier*. Une excellente idée. Mais en multipliant les titres, l'industrie mêle les cartes. Elle n'aide pas le grand public à s'y retrouver.

À preuve, la grande majorité des investisseurs ne se souviennent même pas du titre de leur conseiller, selon une étude menée par l'Organisme canadien de réglementation du commerce des valeurs mobilières (OCRCVM). D'autres estiment que les titres donnent une fausse impression.

Certains groupes de défense des épargnants estiment que les titres de «conseillers» devraient être réservés aux experts qui ont un véritable devoir de fiduciaire, ce qui les oblige à agir dans le meilleur intérêt du client et non seulement à s'assurer que les placements conviennent au profil de l'investisseur.

Je ne pense pas qu'il soit nécessaire d'aller aussi loin. J'ose espérer que la plupart des conseillers offrent de véritables conseils à leur clientèle, même si la plupart tirent effectivement leur rémunération de la vente de produits financiers.

Mais l'industrie devrait faire le ménage et uniformiser l'utilisation des titres, de manière à ce que les investisseurs sachent à qui ils ont affaire.

D'ici peu, l'OCRCVM exigera que tous les représentants présentent le logo de l'OCRCVM dans leurs communications avec la clientèle. «Ça s'en vient très bientôt», promet la vice-présidente pour le Québec, Carmen Crépin.

Cela donnera une meilleure visibilité à l'organisme de réglementation qui ne jouit pas d'une très grande notoriété auprès des investisseurs, peut-être en raison de son acronyme rébarbatif. De cette manière, les investisseurs sauront qu'ils peuvent se plaindre à l'OCRCVM en cas de pépin.

Mais l'OCRCVM n'ira pas plus loin. Pas question d'imposer un titre uniforme pour tout le monde. «C'est correct qu'à travers un titre d'emploi, on puisse refléter son genre de pratique. Si c'est bien fait, c'est même utile pour le client», dit Mme Crépin.

Bref, chacun reste libre de se présenter à sa guise... dans la mesure où le titre n'envoie pas un message trompeur.

Dans une note récente, l'OCRCVM a d'ailleurs pris soin de rappeler aux courtiers - oh pardon! je devrais dire aux représentants inscrits - que le titre qu'ils inscrivent sur leur carte professionnelle ne doit pas créer de confusion, ni induire les clients en erreur.

Alors, de grâce, laissez tomber ces titres pompeux et trompeurs de premier vice-président! Il y a de bien meilleures façons d'impressionner la clientèle. Des exemples? Livrer des rendements solides, fournir des conseils judicieux et offrir un service hors pair.

* Pour vérifier si votre conseiller est inscrit: Registre des entreprises et individus autorisés à exercer de l'Autorité des marchés financiers: www.lautorite.qc.ca/fr/registre-entreprise-individu-fr-conso.html

Représentant inscrit: Dans une firme de courtage, c'est celui qui peut conseiller les clients pour acheter et vendre un large éventail de produits: fonds, actions, obligations, etc. On l'appelait conseiller en placement, il y a quelques années.

Représentant en placement: Assistant du représentant inscrit, il ne conseille pas directement les clients.

Représentant inscrit autorisé à faire de la gestion de portefeuille: Jusqu'à récemment, on disait simplement gestionnaire de portefeuille. Il s'agit d'un représentant qui peut faire de la gestion discrétionnaire, c'est-à-dire acheter ou vendre des titres sans appeler le client avant chaque transaction. Cela nécessite davantage de formation.

Représentant en épargne collective: Il distribue uniquement des fonds communs de placement.

Conseiller en sécurité financière: Il distribue de l'assurance de personne (ex.: invalidité, vie).

Agent ou courtier en assurance de dommages: Il distribue de l'assurance auto ou maison.

Planificateur financier: Titulaire d'un diplôme de l'Institut québécois de planification financière, le planificateur conseille les investisseurs sur l'ensemble des sujets de finances personnelles: placements, assurances, succession, etc. La plupart du temps, il a une autre licence qui lui permet de vendre des produits financiers.