Comment réagiriez-vous si votre voiture d'occasion laissait échapper une étrange fumée bleue un mois après l'achat? Gageons que la boucane vous sortirait aussi par les oreilles.

C'est pourtant le lot de bien des automobilistes. Même si les véhicules sont plus fiables et plus durables qu'avant, les voitures d'occasion demeurent la plus importante source de plaintes en consommation (coude à coude avec les télécoms).

L'an dernier, l'Office de la protection du consommateur a reçu quelque 12 400 demandes d'information et acheminé plus d'un millier de formulaires de plainte à des propriétaires de véhicules d'occasion.

Coincé avec un citron? Un jugement1 fort bien ficelé, rendu juste avant Noël, donne des pistes pour tirer le maximum de jus de la garantie sur votre véhicule d'occasion.

Résumons l'histoire. En 2010, M. St-Cyr a payé 10 200$ pour une Pontiac G6 2006 chez H. Grégoire. Environ un mois après l'achat, le tuyau d'échappement de la voiture se met à dégager une fumée bleue.

Diagnostic du garagiste: problème de moteur majeur en raison d'un défaut dans la tubulure d'admission. Malgré les plaintes et les mises en demeure, la voiture n'est toujours pas réparée deux mois plus tard.

Il y a de quoi s'impatienter! M. St-Cyr demande alors à son garagiste de faire les réparations qui lui coûtent près de 6500$, en deux phases. Mais H. Grégoire refuse de payer la note.

Dès le départ, le commerçant répond à son client qu'il ne peut rien faire, car la garantie de bon fonctionnement est expirée.

En fait, la garantie de bon fonctionnement, obligatoire au Québec, varie selon l'âge et le kilométrage du véhicule d'occasion.

Sa durée est de six mois (ou 10 000 km) sur les véhicules de moins de deux ans (et moins de 40 000 km).

La garantie diminue à trois mois (ou 5000 km) sur les véhicules âgés de deux à trois ans (et moins 60 000 km) et elle n'est plus que d'un mois (ou 1700 km) pour les véhicules âgés de quatre à cinq ans (et moins de 80 000 km). Pour les véhicules plus vieux, le commerçant n'est pas forcé d'offrir une garantie.

Même si la Pontiac avait roulé plus de 80 000 km, H. Grégoire avait offert à M. St-Cyr une garantie d'un mois... qui venait effectivement d'expirer lorsque le problème est apparu.

D'accord, mais l'auto était quand même couverte par la «garantie légale» qui s'applique à tous les biens vendus au Québec, indique le juge de la Cour des petites créances, Alain Breault.

Il s'agit du fameux article 38 de la Loi sur la protection du consommateur (LPC) qui stipule qu'un bien doit pouvoir servir à un «usage normal» pour une «durée raisonnable», en fonction du prix payé. Comme le vendeur avait dit à M. St-Cyr que la Pontiac était une «bonne voiture», il était en droit de s'attendre à ce qu'elle roule plus qu'un mois.

Mais le commerçant contestait aussi la réclamation au motif qu'il n'avait pas pu faire l'expertise du véhicule avant les réparations, qu'il aurait pu faire les réparations à moindres coûts, et que le problème découlait de l'usure normale plutôt que d'un vice caché. Des objections classiques auxquelles les consommateurs doivent souvent répondre.

Usure normale ou vice caché? Pas toujours facile à démêler. Mais dans ce cas-ci, les problèmes à tubulure d'admission sur de nombreux modèles de General Motors étaient de notoriété publique.

Le fabricant a d'ailleurs fait l'objet d'un recours collectif qui s'est réglé à l'amiable en 2008. Toutefois, le juge a considéré que certaines réparations n'avaient rien à voir avec ce défaut de construction. Il a donc retranché 1200$ à la réclamation.

Autre question: doit-on absolument permettre au vendeur d'inspecter la voiture avant les réparations? Réponse: c'est une très bonne idée, mais ce n'est pas nécessaire.

Dans le cas de M. St-Cyr, il était embêtant de remorquer la voiture chez le vendeur, car elle faisait l'objet d'un démontage chez le garagiste. Si H. Grégoire voulait l'inspecter, il n'avait qu'à se déplacer, dit le juge.

Quelle somme le consommateur peut-il réclamer? L'indemnité doit être calculée en fonction du montant que le client a dû payer pour les réparations et non pas en fonction du coût des réparations si le vendeur les avait faites lui-même. Cet argument ne tient pas la route.

Et la mise en demeure? C'est ici que ça se corse. Le consommateur a l'obligation d'informer rapidement le vendeur dès qu'il découvre un vice caché.

Il doit aussi lui envoyer une mise en demeure pour le prévenir qu'il procédera aux réparations s'il ne règle pas le problème.

Malheureusement, M. St-Cyr a oublié d'envoyer une deuxième mise en demeure, pour la deuxième phase de travaux. Erreur fatale. La deuxième partie de sa réclamation est tombée à l'eau.

Prix de consolation: le juge lui a accordé 400$ pour couvrir ses ennuis et inconvénients, puisqu'il a été privé voiture pendant presque deux mois.

1: Pour consulter le jugement, entrez le numéro de dossier 500-32-126 036-104 dans le moteur de recherche du site www.jugements.qc.ca