Ma blonde ne supporte pas la chaleur. Elle supporte très bien son chum, mais pas du tout le facteur humidex. Quand il fait trop chaud, elle ne se supporte même pas elle-même!

Comme tout bon couple complémentaire, j'adore la chaleur. Amenez-en des degrés! Il n'y en a jamais assez. Plus c'est torride, plus je jubile. J'ai une constitution tropicale.

Première canicule de l'été, nous sommes en juillet. Je suis servi à souhait. Notre climatiseur est en panne. La maison est un four. Ma blonde, abattue, traîne son corps de pièce en pièce, cherchant la fraîcheur. Il n'y en a point. Nulle part. Tout est moite. Même le parquet. Elle n'a même pas la force de s'en plaindre. Elle songe à devenir migrante et à prendre le premier bateau pour l'Alaska. Mais réchauffement planétaire oblige, il fait chaud même là-bas. Elle se résigne à survivre dans le bain.

Moi, pendant ce temps, je suis tout guilleret. Je m'épanouis comme un tournesol au soleil. Bien sûr, j'ai chaud. Mais j'aime ça, avoir chaud. Le temps chaleureux me fait le même effet que les gens chaleureux. Je me sens aimé quand il fait chaud. Aimé par le temps. C'est rassurant. Tandis qu'en hiver, je me sens délaissé. Il y a un froid entre le temps et moi. L'hiver est solitaire, l'été est amoureux. Voilà, chers amis lecteurs, vous savez tout de mon rapport avec la météo.

Je regarde le match de baseball et je sue plus que les joueurs. Qui a dit que le sportif de salon ne dépensait pas d'énergie? Par temps de canicule, il faut être un athlète pour avoir la force de changer de poste.

Les fenêtres sont grandes ouvertes. Et tout ce qui entre dans la maison, c'est du chaud. Des tonnes d'air chaud. C'est pas une maison, c'est une montgolfière. Je dégouline tellement, que je prends ma douche pour être moins mouillé. Faut le faire!

Minuit. Dans notre chambre, il fait 40 degrés à l'ombre de la lune. Ma blonde n'en peut plus. Elle branche un ventilateur au pied du lit. Pas un ventilateur de poche. Le gros modèle. Un ventilateur de spectacle. Comme celui qui fait lever la chemise de Michael Jackson dans Dirty Diana. On dirait qu'un avion s'apprête à décoller dans la chambre à coucher. Sauf qu'il ne décolle jamais. Le bruit est constant, toute la nuit durant. Tellement que je n'entends pas ce que disent les gens dans mes rêves. Au matin, ma blonde l'éteint. Ça fait du bien. Mais s'éteint avec lui le grand vent. Et la suffocante pesanteur pèse encore plus. Elle quitte la maison pour le bureau avec l'entrain d'une coureuse de marathon s'écrasant à la ligne d'arrivée. Bonne journée!

Deuxième canicule de l'été, nous sommes au mois d'août. Et il fait encore plus chaud. Heureusement pour ma blonde, le climatiseur est réparé. Elle ne deviendra pas une loque deux fois. Elle le met à extrême froid. La maison est un thermos. On y est très bien. Au frais. Jamais on ne croirait que le Québec est en pleine canicule. Nous sommes isolés. Protégés de la menace. Les alertes ne nous font pas peur. Toutes les fenêtres sont fermées. À la radio et à la télé, les gens se plaignent qu'il fait trop chaud. Pas chez nous. On est dans un autre pays.

Ma blonde est guillerette. Je déprime. Désolé, je n'ai jamais aimé la clim. Je ne tolère pas la température aseptisée créée par un climatiseur. C'est trop parfait. C'est comme pas vrai. Et surtout, je n'aime pas vivre dans une maison où toutes les fenêtres sont fermées. Surtout en été. Même en hiver, j'en ouvre toujours une petite quelque part. Pour moi, une fenêtre, c'est comme un esprit, faut que ça soit ouvert. Et une canicule, c'est fait pour être partagé. Si tout le monde se plaint d'avoir trop chaud, je veux avoir trop chaud aussi. Question d'être solidaire.

Quand je me promène dans ma maison climatisée, je ne me sens plus chez moi. J'ai l'impression d'être au centre commercial. On n'a jamais eu de climatiseur chez mes parents. Et l'hiver, ma mère était très économe du chauffage. Alors l'été, on avait chaud. Et l'hiver, on avait froid. Et c'était bien ainsi. L'été, c'est fait pour avoir chaud. L'hiver, c'est fait pour avoir froid. Voilà, c'est dit. Je sais que ça sonne un peu Donald Trump, ou plutôt Donald Trempe.

Si je tolère, tout de même, ces journées à l'air conditionné, c'est que la chaleur dont j'ai le plus besoin dans ma vie, c'est l'amour de ma blonde. Et comme ma blonde dépérit durant la canicule, le climatiseur devient le respirateur qui la maintient en vie. C'est un besoin essentiel. Je peux bien faire ça pour elle.

De toute façon, je ne suis pas à plaindre, si je suis trop bien dans la maison, j'ai juste à aller dehors. Souffrir avec les autres. D'ailleurs, c'est ce que je vais faire à l'instant. Bon week-end à l'air libre, tout le monde!