Les organisateurs avaient préparé 1000 places assises et ils ont vendu 1217 billets (10 $ pour les adultes, 8 $ pour les enfants). Malgré le temps frais et la menace de pluie, il y avait une foule et une ambiance étonnantes pour le premier retour du baseball professionnel à Montréal depuis le départ des Expos.

Les Capitales de Québec et les Aigles de Trois-Rivières, de la Ligue Can-Am - une ligue indépendante qui compte trois autres clubs américains -, étaient venus disputer un match hors-concours. Le rendez-vous avait lieu au parc Ahuntsic, boulevard Henri-Bourassa, sur le nouveau terrain Gary-Carter.

Les hot-dogs cuisaient, la bière était froide, un air d'orgue nous ramenait loin dans le temps, une mascotte amusait les enfants, certains vrais de vrais avaient apporté des chaises pliantes pour être le plus près possible du jeu...

Même les gradins aménagés pour l'occasion derrière la clôture du champ gauche - les bleachers - étaient remplis de gens entassés et patients. Comme à Jonesville, a dit un vieux de la vieille...

Quand les réflecteurs ont percé la nuit, nous étions, comme par magie, de retour au baseball professionnel un soir d'été - ou presque. Le temps d'avaler un toasté pendant l'Ô Canada et d'écouter les directives de l'annonceur-maison - «le propriétaire du véhicule immatriculé XX est prié de le déplacer sous peine de remorquage» -, c'était Play Ball! et nous étions tous heureux.

Le temps de rêver

Mais qui étaient donc ces 1217 personnes agglutinées autour du terrain, prêtes à braver le froid? Avec Marc Griffin, l'ancien des Expos, nous avons eu une même pensée pour le film Field of Dreams: If you build it, they will come...

Griffin et son collègue Martin Lamarche, de Baseball Québec, tentent de fonder une équipe de la ligue Can-Am à Montréal depuis 2006. Ils ont surtout connu des refus, des déceptions ou de l'indifférence. Y a-t-il 5000 amateurs de baseball à Montréal? Bien sûr que oui, mais...

«Il nous faudrait un parc avec 3000 sièges et un budget de 1,8 million pour couvrir les dépenses. La masse salariale dans la Ligue Can-Am est de 93 000 $. Nous sommes ouverts à la Rive-Sud comme à la rive nord. Il faut de l'espace. Ici, au terrain Gary-Carter, il faudrait ajouter des gradins et aménager un stationnement. Mais faire bouger la Ville, c'est très compliqué et long.

«Je n'ai rien contre le Projet-Montréal de Warren Cromartie, qui veut ramener le baseball majeur, mais dans combien de temps? Dix, quinze, vingt ans? En attendant, pourquoi pas une équipe des ligues mineures?

«Ça serait bien pour les jeunes de notre fédération. Le baseball mineur a touché le fond du baril en 2005, mais il est en net progrès présentement. Les filles jouent de plus en plus.»

La naissance des Aigles

Les jeunes des Orioles d'Ahuntsic, dans leur uniforme blanc, orange et noir, étaient partout autour du terrain pour accueillir et guider les spectateurs, ainsi qu'accomplir toutes sortes de petites tâches, comme remettre des cartes de pointage aux spectateurs. Et vous pouviez «marquer» le match, comme vous ne l'avez pas fait depuis des années. Un 5-3 (roulant au troisième but), un 7 (ballon au champ gauche), un K (retrait sur des prises), et puis vous colorez l'intérieur du petit losange au complet pour un circuit.

Les Aigles de Trois-Rivières disputaient le tout premier match de leur histoire. Ils l'ont d'ailleurs emporté 6-1 sans que tombe une seule goutte de pluie. Ils ont un gérant québécois, Pierre-Luc Laforest, qui a fait quelques apparitions dans les ligues majeures avant de se retrouver avec les Capitales de Québec, puis avec les Aigles. Il y a un joueur québécois, Daniel Leblanc, de Trois-Rivières, les autres provenant des États-Unis ou du reste du Canada.

À la tête des Aigles, la directrice générale Marie-Christine Boucher, la trentaine, a été l'adjointe de Donald Beauchamp chez le Canadien pendant 12 ans. Elle est en poste en Mauricie depuis trois mois.

«Le temps presse, mais tout sera en place pour l'ouverture de la saison locale, le 24 mai. La vente d'abonnements saisonniers va bien, avec 500 places vendues sur un objectif de 600.

«La Ville de Trois-Rivières a investi 8 millions dans la rénovation du stade Fernand-Bédard, qui compte 3700 sièges. On en est aux dernières retouches. Il y a des gens de Trois-Rivières qui ont fait le voyage à Montréal pour le premier match des Aigles.»

Le baseball, rappelez-vous, est un sport où l'on relaxe et l'on bavarde avec les autres spectateurs. Et l'on reconnaissait des visages, des gens de baseball de Laval, de Longueuil, d'Ahuntsic et de Rosemont, qui n'ont jamais abandonné leur sport. Les jeunes qui couraient partout dans leurs uniformes multicolores peuvent les remercier.

Tout un petit monde a vécu ses 15 minutes de gloire samedi soir au terrain Gary-Carter.

Et si on recommençait?