En 2005, Abel Yamout, entraîneur de natation libanais, a participé aux championnats de la FINA tenus à Montréal. Vous vous souvenez peut-être de cet événement sauvé in extremis par Normand Legault et qui avait connu un très beau succès. Assez beau pour convaincre M. Yamout d'envoyer ses enfants, des nageurs de compétition, chez nous et dans un monde plus pacifique.

D'abord son fils, Jamil, qui est maintenant diplômé en économie; puis sa fille, Nibal, qui sera, à compter d'aujourd'hui, en compétition aux championnats canadiens de natation universitaire au CEPSUM.

Nibal était aux Jeux olympiques de Pékin à titre de seule nageuse libanaise. Elle avait 15 ans. Les règlements ont changé, elle doit maintenant réaliser des standards olympiques et elle vise les Jeux de 2016 à Rio...

«Je vais rater ceux de Londres, mais ce n'est pas grave, il ne fait pas assez soleil en Angleterre. J'ai besoin de voir le soleil en me levant. Je me concentre sur 2016 et le Brésil.»

Maintenant âgée de 18 ans, Nibal est le genre d'athlète qu'on pourrait interviewer chaque jour avec plaisir. Pas timide, elle parle, elle rit, elle a des opinions... Elle vit rue Édouard-Monpetit avec son frère, son cousin... et sa mère, qui l'a accompagnée pour une raison particulière. «Mon frère mangeait trop de junk food, alors ma mère nous fait la cuisine. Mes parents ne voulaient pas que je fasse comme lui. Je ne sais pas cuisiner. Et ma mère a commencé à s'entraîner...»

La vie à Montréal?

«J'aime beaucoup. Tout est simple ici, beaucoup plus simple qu'au Liban. Nous sommes choyés. Je vis près de l'université et de la piscine. Je suis allée en vacances au Liban, mais j'avais hâte de revenir à Montréal.»

La vie aux J.O. de Pékin?

«Le grand luxe. Nous étions bien accueillis, il y avait des voitures et des routes rien que pour nous! J'étais accompagnée de mon père et d'un nageur libanais.»

Les études en première année universitaire (Nibal a choisi l'économie)?

«Pas de problème. Il y a des choses que j'avais déjà vues. L'enseignement est très sévère au Liban, nous avons un peu d'avance sur le Canada, je crois.»

Le calvaire de la natation

Si vous avez déjà vu l'entraînement de nageurs, vous savez peut-être qu'il s'agit d'un des sports les plus abrutissants de la planète. Ils ne font que répéter les mêmes mouvements avec des haltères et ils souffrent. Quand ils sont dans l'eau, ils ne voient que le fond de la piscine, une ligne droite et ils souffrent. Même un marathonien a au moins le plaisir de voir du paysage et des spectateurs... Comment on s'y fait, Nibal?

«On ne s'habitue jamais à la douleur et elle est toujours là. Mais on apprend à souffrir et à souffrir plus longtemps que les autres athlètes. Et quand on fait un bon temps, on est tellement heureux!»

Tes objectifs aux championnats universitaires?

«Je n'ai aucune idée du niveau de la compétition. Je ne sais pas dans quoi je m'embarque, mais je sais que ce sera dur. Une finale A serait un bel exploit pour moi.»

Nibal participera à quatre épreuves individuelles, des 100 et 200 libre et brasse, plus un relai.

Imaginons les prochaines années de Nibal. Trois ans d'économie et de compétition universitaire, et on se retrouve en 2015, à un an des Jeux de Rio, avec un diplôme en poche. Synchronisme parfait. L'année 2015 entièrement consacrée à l'entraînement pour Rio...

Nibal fait de grands yeux. «Ça serait un bon scénario...»

Et après?

«Une maîtrise ou un doctorat, mais je ne veux pas être enseignante. Je n'ai pas assez de patience. Et puis une petite famille, certainement...»

Bonne chance, Nibal Yamout, dans la piscine et dans la vie.

La compétition

Les championnats canadiens universitaires commencent aujourd'hui et le spectacle sera intéressant. Plus que celui au Centre Bell, par exemple, et beaucoup moins cher.

Quelques espoirs olympiques dans le lot, ceux qui n'ont pas abandonné les études pendant un an pour se concentrer sur les J.O. de Londres; plusieurs candidats qui seront au Bassin olympique en avril pour les qualifications.

Martha McCabe, de l'Université de la Colombie-Britannique et médaillée de bronze aux derniers championnats mondiaux... toute l'immense équipe de l'Université de Calgary, championne canadienne.

Samedi soir, grand party à la Commission des liqueurs... Nibal nous y invite tous.

Photo: André Pichette, La Presse

Nibal Yamout sera en compétition, à compter d'aujourd'hui, aux Championnats canadiens de natation universitaire, au CEPSUM.