Un entraîneur ne peut rêver d'un plus bel hommage: à l'annonce de son congédiement, ses joueurs se rebellent contre la direction de l'équipe et demandent son retour. Dans un film, de telles scènes nous émeuvent.

Mais nous ne vivons pas dans un film de Hollywood et Marc Santerre ne reviendra pas à la barre des Carabins de l'Université de Montréal.

C'était beau de voir les étudiants-footballeurs joindre tous les médias - ils m'ont joint à domicile! - et organiser une conférence de presse. On se dit qu'ils apprennent quand même des choses sur les bancs d'école.

Sauf que ces jeunes s'y sont peut-être pris de la mauvaise façon... et trop tard.

S'ils tenaient tellement à «Marc», comme ils l'appellent, les Carabins auraient fait plus d'efforts en classe et se seraient comportés impeccablement sur le terrain et en dehors. Celui que plusieurs considèrent comme leur grand frère, leur conseiller et leur confident, ne pouvait toujours les protéger.

Au cégep peut-être, mais à l'université, et dans un établissement prestigieux comme celui de Montréal, on s'attend à une plus grande maturité.

J'étais surpris d'entendre certains Carabins parler de changer d'université et de refuser de jouer pour le prochain entraîneur des Carabins. Le commentaire en dit long: est-ce que le football passe avant les études?

La grande question est là.

Maintenant que la poussière est retombée et que les émotions ont repris leur cours normal, il est temps pour les Carabins de se regarder dans le miroir et de faire un examen de conscience.

Si Marc Santerre n'est plus là aujourd'hui, c'est un peu beaucoup à cause d'eux.

Des réponses floues

La direction de l'Université de Montréal avait formé un comité pour veiller sur les Carabins. Ce comité aurait dû embaucher un spécialiste de gestion de crise. Ça lui aurait peut-être évité les événements embarrassants qui ont suivi. On imagine la surprise autour de la table de réunion d'urgence.

Marc Santerre a affirmé à mon collègue Michel Marois qu'il avait entendu des rumeurs - son possible remplacement par Danny Maciocia était même connu des journalistes - et il est allé poser des questions. On lui aurait répondu que tout allait très bien, qu'on était satisfait de son travail et qu'il ne devait pas s'inquiéter. Parlez-moi de confiance mutuelle!

Les joueurs ont été informés du congédiement par courriel. Pas très subtil non plus.

Ce comportement ressemble à celui de gens frileux, qui craignent la confrontation et qui complotent derrière des portes closes. J'imagine que la mêlée qui a eu lieu en fin de saison contre les Gaiters de Bishop - un visiteur a presque passé le K.-O. à un entraîneur des Carabins et ses joueurs ont réagi - les a terrorisés pour de bon. Et pourtant, ces choses-là arrivent dans un sport violent comme le football. Je ne les approuve pas, mais elles se produisent parfois.

On ne peut pas le comprendre quand on passe son temps assis derrière un bureau sans s'approcher de l'action et de ceux qui la vivent.

La direction des Carabins a également décidé de mettre fin à l'admirable mission humanitaire de Marc Santerre. En 20 ans au cégep du Vieux-Montréal et cinq à l'Université de Montréal, cet homme de coeur a remis sur la bonne voie des centaines de jeunes hommes qui auraient mal tourné. Ce n'est pas rien.

L'Université de Montréal a-t-elle décidé que cela n'est pas inclus dans son mandat?

Est-ce que l'Université de Montréal veut une équipe de football propre, propre et blanche, blanche à l'image de la bourgeoisie québécoise? Ou bien veut-elle refléter la réalité cosmopolite de la métropole?

Aucune autre équipe de football universitaire québécoise n'évolue dans un milieu comme le nôtre.

Voilà ce qu'on aurait dû nous expliquer. Mais la direction n'a fourni que des explications floues, incomplètes et nébuleuses.

Discipline

Cela dit et puisqu'il a été question de discipline, ceux qui sont près du milieu sportif universitaire connaissent tous des histoires de contournement de règlements, de tours de passe-passe qui font que la présence de certains joueurs dans une université est discutable. Dans TOUTES les équipes et dans certaines équipes plus que d'autres.

Rien à voir avec la NCAA où le football génère des millions qui font vivre l'université. Mais à plus petite échelle, les universités canadiennes veulent gagner et mousser leur réputation pour attirer plus de clients-étudiants.

Reprocher ensuite à un élève la faiblesse de ses résultats scolaires devient un argument facile et hypocrite, si vous voulez mon avis.

Les directions d'université, comme les athlètes, doivent se discipliner aussi et faire preuve de transparence.

Photo: André Pichette, La Presse

La conférence de presse organisée par les joueurs des Carabins en soutien à Marc Santerre est venue un peu tard.