Avec certains jeunes, il suffit de les rencontrer et de parler pendant quelques minutes pour savoir que celui-là n'aura pas de mal à se débrouiller dans la vie. On n'est pas inquiet pour lui et si on était entrepreneur, on l'embaucherait immédiatement. On serait certain d'avoir un bon homme pour longtemps.

Jonathan Collin est de ceux-là. Le genre qu'on voudrait comme quart-arrière si on était entraîneur de football, ce qui tombe bien, puisqu'il est le quart-arrière des Redmen de McGill. Un joueur qui a surpris son entourage l'an dernier en s'accaparant du poste numéro un pour les sept derniers matchs de la saison qui en compte huit. Pour une recrue, il s'agit d'un exploit.

«Oui, je pense que j'ai surpris certaines personnes, mais pas moi. J'étais même déçu de n'avoir pas été le partant dès le premier match.»

Vous voyez le genre. La bonne attitude mentale...

Jonathan est de Greenfield Park, il fait 6'4, il a 21 ans, mais à l'entendre parler, on lui en donnerait quelques-uns de plus. De père francophone et de mère anglophone, il fait partie d'une famille de sportifs, avec ses deux soeurs, ses parents et même ses grands-parents maternels.

Il a appris son football au collège Champlain de Saint-Lambert et son entraîneur à McGill, Sonny Wolfe, dit qu'il possède un talent «illimité».

«J'aurais pu jouer au hockey junior à Baie-Comeau, mais à cause de mon physique, ils m'auraient demandé de me battre. Ça ne m'intéressait pas. J'ai choisi le football et, surtout, une éducation.

«Je pense que pour le football, j'ai le bon physique et un bras assez fort. Je ne suis pas le plus rapide. Je dois travailler à ma lecture de jeux, c'est normal. Et puis je dois apprendre à devenir un leader. L'an dernier, comme recrue, je ne parlais pas trop. Mais je dois prendre les commandes cette année.

«Toutes les universités du Québec m'ont approché. Il fallait écouter et deviner qui disait la vérité et qui ne disait pas tout à fait la vérité. Mon choix s'est arrêté sur McGill. Il y avait une chance de jouer rapidement et d'obtenir un diplôme dans une université prestigieuse.»

À McGill justement... Les Redmen ont été secoués par un scandale vaguement sexuel concernant l'initiation des recrues en 2006. La direction a été bouleversée, l'image de l'université salie, des têtes sont tombées, dont celle de l'entraîneur-chef et ex-Alouettes Chuck McMann.

L'équipe n'a pas remporté un seul match pendant les deux années qui ont suivi et l'an dernier, avec un nouvel esprit et un nouveau quart-arrière, elle a présenté une fiche de 3-5.

«Cette année, il y a toujours Laval comme équipe à battre et les autres sont à peu près tous de la même force, a analysé Collin. Quelques équipes ont perdu des vétérans importants, elles sont en baisse, alors que les Redmen sont en progression. J'ai confiance. On s'en va en séries éliminatoires et tous mes coéquipiers le pensent.»

Pédagogie

Jonathan étudie en pédagogie. Il veut enseigner l'histoire et la géographie. Son premier stage dans une école primaire, l'an dernier, n'a pas été concluant.

«J'ai compris que les tout petits, ce n'est pas pour moi. Heureusement que je mesure 6'4. Parfois il fallait que je me lève et que je dise hey! pour reprendre le contrôle. Je pense que je serai plus à ma place dans une école secondaire le printemps prochain.»

À titre d'ex-sportif universitaire, je recommande toujours aux jeunes de quitter papa-maman et de voler de leurs propres ailes. Jonathan Collin aurait pu demeurer chez ses parents à Greenfield Park, mais il vit dans ce qu'on appelle toujours le ghetto McGill, un quartier très pittoresque qui longe le campus. Il partage un logement avec sa copine de New York, Lena, étudiante elle aussi.

«Je ne regrette pas mon choix. Un campus universitaire dans le centre-ville de Montréal, wow! On a une vie sociale incroyable!»

Jonathan s'entraînait en fin d'après-midi et il pensait déjà à la chaleur accablante qui l'attendait.

«Hier, il faisait vraiment chaud et humide. Les entraîneurs nous accordaient des pauses, on buvait beaucoup d'eau...»

Non, on n'aurait pas aimé porter un uniforme de football hier...

Il reste que voilà un garçon à surveiller cet automne et peut-être pendant plusieurs années à venir.