Ma mission était de déambuler dans les rues Crescent et Peel et vous rapporter ce qui s'y passait dans le cadre du week-end de la F1.

Mais il mouillassait sans arrêt et je me voyais, comble de l'absurde, seul sur le trottoir, tout trempé, l'homme qui déteste le plus la course automobile...

Eh bien, tu écriras qu'il pleuvait, qu'il n'y avait personne et que la journée était ratée, m'a dit mon boss, qui a des pages à remplir, pluie pas pluie.

Sauf que la journée n'était pas ratée du tout. À 16h, il y avait plein de gens qui se laissaient mouiller pour voir ce qu'il y avait à voir. Et les organisateurs y ont mis le paquet cette année. La rue Crescent était fermée à la circulation entre Sainte-Catherine et Sherbrooke et il y avait beaucoup de vie dans cette foire annuelle.

Angle Sainte-Catherine, nous étions accueillis par des employés de la raffinerie Shell, qui distribuaient gentiment des dépliants. Bonne chance, les gars.

Et on marchait parmi les belles voitures et les belles filles. On vous offrait des boissons énergétiques, de la bière, des cartes de crédit en veux-tu en v'là - merci, j'ai déjà donné -, des montres de luxe, des bagels gratuits, une téquila gratuite, 100% agave, offerte par une divine jeune fille qui vous faisait regretter d'être vieux. Vous avez droit à un seul, monsieur... Dommage, mademoiselle...

Si vous vous inscriviez à des concours, vous pouviez gagner une Ferrari ou des mags, qui sont de grosses roues, si j'ai bien compris.

Il y avait une méchante radio, des estrades pour des spectacles live en soirée - il y aura même un combat de boxe présenté par le groupe GYM -, et des fausses voitures avec des écrans vidéo qui vous font croire que vous êtes en piste. Celle de Ferrari, avec écran géant, était très populaire. Hrrriiiiouoummm...

Il y avait aussi un podium où deux pétards terribles tenant deux bouteilles de champagne vous attendaient. Vous vous placiez entre les deux, vous posiez pour la postérité et vous étiez Schumi pendant quelques secondes.

Et puis il y a toujours les freebees, qu'on traduit par cadeaux gratuits, ce qui est un pléonasme, d'après moi.

J'ai ramené une petite trousse de beauté, avec le tout nouveau rasoir Gillette à cinq lames - CINQ! - et une autre de l'autre côté, dite de précision, je ne sais pour quoi, il faudrait que je lise les instructions. Et un petit tube de «lotion fraîcheur intense», un autre de «décrustant thermique pour le visage», un autre «d'écran anti-odeurs», un déodorant «anti-perspirant». Je sens que je vais faire des ravages.

J'ai aussi ramené une boîte de Triscuit, des craquelins 100% grain entier avec basilique et balsamique, que je grignote avec du foie de poulet, pendant que je vous écris et remplis ma mission.

Enfin, un petit canard jaune qui flotte dans le bain, un rubber duckie, comme ils disent, gracieuseté de Ferrari, à condition de s'inscrire à un concours. Ce sera pour mon voisin Sergueï, qui doit avoir environ 3 ans et qui est le plus mignon petit Russe en ville.

Transportons-nous vers la rue Peel, toujours sous la pluie, où là, c'est la bamboula Ferrari. Il semble que tous les propriétaires de Ferrari en ville sont là pour montrer leur beau jouet et faire les frais. Je les trouve tous pareils, les propriétaires comme les voitures, mais il paraît que non.

Tiens, voici un copain qui m'amène sur le coin de Maisonneuve pour me montrer la Tesla, voiture électrique nommée en l'honneur d'un savant tchèque, spécialiste de l'électricité, qui est mort pauvre et oublié. Les grandes compagnies ont acheté tous ses brevets et les ont mis à la poubelle. Ce n'est pas moi qui le dis, c'est mon copain qui est une sorte de savant lui-même.

Une compagnie californienne la fabrique et la jeune Américaine qui l'accompagne me dit que la version course (roadster) a un starting price de 147 000 $. La normale est à 125 000 $. Elle est très jolie.

Voilà, vous savez tout. Vous n'avez même pas besoin d'y aller.

Photo: Bernard Brault, La Presse

Pluie d'activités, malgré la mauvaise température, sur Crescent et Peel, hier après-midi. Un jeune amateur de Formule 1 a tenté de changer un pneu sur un bolide.