Quand Achour Dermoune a dit à sa mère qu'il faisait du cheerleading, elle lui a demandé s'il aimait encore les filles...

Achour est l'un des sept garçons membres de l'équipe de cheerleading des Carabins de l'Université de Montréal. Le Québec est la première province à se doter d'une ligue interuniversitaire de cheerleading, un sport qui n'a rien à voir avec les jupettes et les décolletés des meneuses de claque des Alouettes.

Achour est aussi un costaud secondeur des Carabins au football. Il passe l'été avec les cheerleaders avant de rejoindre l'équipe de Marc Santerre.

«Contrairement à ce que vous devez penser, je ne suis pas ici parce qu'il y a beaucoup de filles... J'ai promis à une amie d'essayer son sport. J'ai aimé tout de suite. Ce n'est pas facile. Il faut beaucoup de travail pour que ça soit beau devant les spectateurs. C'est pas mal plus dur que ce que je pensais.»

«L'important, c'est la stabilité», nous explique Cindy Charbonneau, l'entraîneuse-chef, une vraie de vraie qui sera, avec son équipe civile, les Spririx de Montréal, aux Championnats mondiaux qui auront lieu en avril à Orlando, en Floride.

«Une pyramide qui chambranle, ça vous fait perdre des points. Même une personne sur les épaules d'une autre qui chambranle... Quelqu'un qui doit mettre la main au sol pour se stabiliser fait perdre des points.»

George W. Bush

Cinq équipes formeront la nouvelle ligue québécoise: UdeM, Laval, Sherbrooke, UQAM et UQTR. Curieusement, ce sont toutes des universités francophones, alors que le cheerleading est énorme aux États-Unis. Les universités américaines accordent des bourses d'études aux cheerleaders. Le plus célèbre cheerleader universitaire américain: George W. Bush...

«Il y a des équipes en Ontario, elles sont très fortes, mais il n'y a pas d'association. Nous sommes les premières.»

Alors vous vous présentez à la compétition avec vos 36 équipiers, équipières et quelques substituts.

«Il y a plusieurs disciplines, certaines à quatre personnes. Comme les gars sont plutôt rares, on adapte le tournoi. Certaines équipes, comme l'UQAM, n'en ont aucun.»

Et si je me présentais avec une équipe entièrement composée de garçons?

«Ça serait accepté, poursuit Cindy, sauf que celui qui doit faire les figures et prendre des poses en haut de la pyramide aurait l'air un peu fou... Notre sport est un mélange de danse et d'acrobatie. Je viens du milieu de la danse, d'autres viennent de la gymnastique, du plongeon...

«En général, les gars sont moins doués pour la danse. Ils sont là surtout pour leurs bras. Un gars qui ne serait pas plus fort qu'une fille aurait du mal à mériter un poste.»

Sécurité d'abord

Surtout que lorsqu'on lance une jeune fille à 10 mètres du sol, il faut la rattraper... Le cheerleading a eu des problèmes dans le passé. De trop nombreuses blessures, certaines graves, ont failli le faire interdire.

Cindy Charbonneau: «Il y a maintenant un organisme qui régit le cheerleading aux États-Unis. Nous suivons ses directives. Certains mouvements dangereux ont été interdits. Il faut toujours, par exemple, avoir ce qu'on appelle des spots, quelqu'un près de la pyramide en cas de chute...»

Cindy montre les ecchymoses sur ses bras. «On a toujours des bleus un peu partout.»

Les Carabins s'entraînent deux fois par semaine pendant trois heures. Ils doivent aussi faire trois heures de musculation dans leurs temps libres. Leur première saison régulière commencera en septembre. En mai, ils participeront à un premier tournoi.

«Ça fait changement du football, nous dit Achour Dermoune, un étudiant en éducation physique qui s'y connaît en musculation. On travaille fort, c'est sérieux, mais plus relax, moins agressif qu'un match de football...»

Ses entraîneurs Guy Girard et Claudia Prévost lui ont vite appris: «Notre sport est sérieux. Commence par apprendre à suivre la musique...»

Les gars et les filles des Carabins ont offert de me lancer en l'air pour me faire découvrir une nouvelle expérience. Non, merci. J'ai une petite grippe. Peut-être une autre fois.

Même chose pour mon collègue photographe Bob Skinner. Non, merci.

Enfin, sachez que Cindy Charbonneau travaille sur une thèse de doctorat en génie biomédical, comme quoi on peut pratiquer le sport à fond et réussir ses études...

Photo: Robert Skinner, La Presse

Une nouvelle ligue universitaire de cheerleading a vu le jour au Québec. Les représentantes et représentants des Carabins de l'Université de Montréal s'entraînent sérieusement dans ce sport qui allie danse et acrobatie.