Il s'est chanté deux grands-messes hier pour les adieux à Pat Burns. Une à la cathédrale Marie-Reine-du-Monde, avec le cardinal Jean-Claude Turcotte, le premier ministre du Québec, Jean Charest, le président du Comité olympique canadien, Marcel Aubut, et des dizaines de dignitaires et de personnalités bien connues.

Ce fut long, solennel, parfois empesé quand les curés s'éternisaient au micro et très émouvant quand les hommes et les femmes qui ont vécu avec le bouillant Pat ont parlé avec leur coeur. Je pense à Lou Lamoriello et à Robin Burns, qui ont fait mouiller quelques yeux et arraché de nombreux sourires en parlant de «leur» Pat.

Puis il y a eu la deuxième messe, chantée et célébrée à l'Irish Embassy Pub, rue Bishop - «évêque» en anglais, nom prédestiné pour une messe à la bière, on en conviendra. C'est là que les amis et proches de Pat Burns s'étaient donné rendez-vous pour célébrer le départ de leur chum après les funérailles à la cathédrale.

Il y avait un buffet où les bikers de la Pennsylvanie et de la Nouvelle-Angletterre, membres du Road Dawgs Club, s'étaient regroupés autour de quelques bouteilles de bière irlandaise. Joe Walsh, de Strenton, avait roulé plus de 550 km par 0° pour venir se recueillir sur les cendres de Pat Burns. Il couchait à l'hôtel pour repartir aujourd'hui aux États-Unis: «Pat aimait rouler avec nous tous. Il méritait qu'on vienne, il n'y a pas d'autre explication», a-t-il dit.

Pat Brisson et Luc Robitaille avaient retrouvé leur sourire. Les deux ont joué pour Burns et les deux avaient gardé des liens étroits avec leur ancien coach: «Je l'appelais régulièrement. On discutait de hockey, il avait l'oeil aussi alerte à la fin malgré la maladie», de dire Brisson.

Michel Tremblay, le directeur des programmes à CKAC, était de la «fête». Mario Cecchini, le président de Corus, devenu ami personnel de Pat et de Line Gignac, Mme Burns et ancienne de CKAC, était songeur mais il gardait sa bonne humeur en conversant avec Monique Arsenault, autre amie intime de Line Gignac. Le pub était plein. Pat Burns aurait pu s'asseoir à chacune des tables et on aurait entendu des éclats de rire.

Il y avait des policiers, des hommes de hockey, de la famille, des proches. Après 18 h, quand Line Gignac est arrivée, on s'est remis à se raconter de belles et bonnes histoires à propos de Pat. Pour la faire sourire un peu.

En buvant une bonne irlandaise...

Dans le fond, l'âme de Pat était aussi bien dans le pub que dans la cathédrale.

* * *

C'est quand même hors du commun. Cet homme bourru au grand coeur, né à Saint-Henri, le quartier le plus défavorisé de Montréal, devenu policier à Gatineau puis, par une suite victorieuse, coach dans le junior avant de devenir entraîneur du prestigieux Canadien de Montréal, des prestigieux Maple Leafs de Toronto, des prestigieux Bruins de Boston et des prestigieux Devils du New Jersey, a eu droit aux plus grands honneurs à sa mort. Et j'emploie le mot prestigieux à dessein puisque Montréal, Toronto, Boston et même les Devils font partie des équipes les plus crédibles du hockey.

Pensez-y, ce chaleureux matou de ruelle a eu droit à une messe célébrée par le plus haut dignitaire religieux au Québec, le cardinal Jean-Claude Turcotte. On est à un pas du pape, il faut le réaliser. Puis, dans la nef, il y avait le premier ministre du Québec, Jean Charest, la plus haute autorité politique. Également présents, la plus haute autorité du hockey professionnel au monde, Gary Bettman, et l'autorité suprême dans le sport au Canada, le président du Comité olympique canadien, Marcel Aubut.

Il y avait aussi celui qui a reçu la plus belle bordée d'injures de l'histoire télévisée du hockey au Québec, Shayne Corson, à qui Pat Burns, en colère, avait dit devant les caméras de «manger de la marde». Corson s'est fait tout discret pendant la messe... et il a versé une larme. Il était comme tous les autres, incapable de garder rancune à cet homme qui se levait la nuit pour aller le sortir d'un autre pétrin dans lequel il s'était fourvoyé.

Il y avait environ 1100 personnes dans la cathédrale. Dehors, les médias ont fait le pied de grue pendant plus de deux heures. Les gens venaient saluer les vedettes du petit écran et raconter leurs souvenirs de Pat. Une douce magie du temps des Fêtes régnait sur le parvis de la cathédrale et, pourtant, ce n'était pas Noël, c'était les funérailles de M. Patrick Burns, homme de son état. Juste un homme. Parfaitement imparfait.

C'est pour ça qu'on l'aimait tant.