Il y en a encore qui essaient de diminuer l'importance de la Marche bleue de samedi à Québec.

Juste pour établir un comparatif, comme le disent les agents de joueurs, il y avait eu 221 personnes à la manif organisée par Alain Creton pour sauver le Grand Prix du Canada. C'était un samedi matin.

Quelques années plus tôt, on était environ 2500 ou 3000 personnes au Complexe Desjardins lors d'une «grande» manifestation pour garder les Expos à Montréal. Gary Carter avait été très bon, mais il n'était pas arrivé à la cheville de Peter Stastny à Québec.

Entre les 10 000 spectateurs (mauvaise foi de RDI) et les 100 000 claironnés par certaines stations de radio, il y a les 50 000 à 60 000 personnes qui ont envahi les plaines d'Abraham. Il y avait la quantité, mais aussi la qualité: quels sens de la joie et de la classe démontrés par ces partisans des Nordiques. Et par ceux qui soutiennent les efforts pour que Québec puisse enfin compter sur un édifice moderne pour mieux servir sa population et celle des régions de l'est du Québec.

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Le maire Régis Labeaume et le premier ministre Jean Charest doivent maintenant convaincre Stephen Harper d'investir à son tour. C'est humiliant de devoir quérir auprès d'un étranger les millions que l'on a déjà versés en impôts et en taxes. Mais c'est la loi de ce système politique et il faut s'y conformer tant qu'il n'aura pas été changé.

Les chances de revoir les Nordiques à Québec sont beaucoup plus sérieuses qu'on aurait pu l'imaginer il y a quelques années. Il y a des équipes à vendre, même si le commissaire Gary Bettman veut sauver la face de façon désespérée. Et ce n'est pas un contrat de télé avec ESPN qui va faire une différence. Bettman est celui qui quête le retour d'ESPN et il n'est pas dans une situation pour exiger des centaines de millions du diffuseur américain. Rien qui ne puisse sauver les équipes moribondes.

Québec est même passé devant Winnipeg dans la course pour l'obtention d'une équipe de la LNH à cause de son propriétaire. Quebecor peut se contenter de boucler le budget avec une équipe qui devient un produit pour ses réseaux de télévision, son internet, ses magazines et surtout ses portables de toutes sortes. Les profits seront dans l'exploitation du produit et Quebecor excelle dans ce domaine.

En fait, il ne manque que l'engagement du fédéral dans la construction du stade multifonctionnel pour que Pierre Karl Péladeau puisse passer en mode grande action dans le dossier. Il y aura toujours moyen de jouer quelques saisons dans le vieux Colisée en attendant la terre promise.

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La Marche bleue envoie surtout un message politique très puissant. Les conservateurs sont absents du Québec... sauf dans la grande région de Québec et du Saguenay-Lac-Saint-Jean, clientèle des Nordiques. Quand bien même les électeurs de Montréal seraient défavorables à la construction d'une patinoire à Québec, ils ne feront pas perdre une seule circonscription aux conservateurs. Alors qu'il suffira de placarder un poster géant des députés et ministres conservateurs dans leur chandail des Nordiques avec la mention «grands parleurs, petits faiseurs» pour que Stephen Harper perde les circonscriptions qui lui donnent le pouvoir à Ottawa. Et il suffit de se promener à Québec pour réaliser que les gens ordinaires ne plieront pas devant l'autre machine bleue. Ça va être dehors si on ne «livre pas la marchandise».

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Dans les années 80, on avait eu droit à une guerre entre O'Keefe et Molson. Cette fois, ce qui se dessine est une guerre féroce entre Bell, copropriétaire du Canadien et propriétaire de RDS, et Quebecor et Vidéotron qui seraient propriétaires des Nordiques et de TVA et TVA Sports. Centre Bell contre Centre Vidéotron.

C'est pour ça que je suis loin d'être rassuré sur une supposée neutralité du Canadien dans l'histoire. Les mêmes causes provoquent les mêmes effets. Molson avait tenté de torpiller l'entrée des Nordiques dans la Ligue nationale, j'ai peur que Bell ne fasse le même coup avec les nouveaux Nordiques. Ça doit jouer du poignard dans les couloirs.

DANS LE CALEPIN - Des fois... Il y a un prof de philosophie au cégep François-Xavier-Garneau, dans la région de Québec, qui a ânonné tellement de grossièretés devant la caméra complaisante de RDI, samedi vers 18h15, que j'en étais inquiet. Il était rendu avec un projet d'un milliard, avec des centaines de millions investis par le public pour acheter une concession de la Ligue nationale et l'autre, le micro complaisant, laissait aller. J'étais angoissé à l'idée de ce que ce type pouvait faire dire à Aristote, Socrate, saint Thomas, Descartes, Sartre, Marx et compagnie.

Photo: Martin Martel, Le Soleil

Les partisans des Nordiques ont démontré de la joie et de la classe au cours de la Marche bleue, samedi.