Robert Sauvé est un bon agent. Il représente bien ses joueurs et sait le faire avec dignité. Mais il connaît les règles de toute négociation. C'est une question de pouvoir. Celui qui a le pistolet dans la main a toujours l'avantage sur celui qui se bat à mains nues. Et la plus belle fille dans un bar a plus de choix que le laideron du coin. C'est peut-être injuste mais c'est comme ça.

Ça s'adonne qu'Alex Tanguay est une belle fille. Et que les gars intéressés à lui offrir un verre sont nombreux. Il y aura deux, trois, cinq, peut-être dix équipes à vouloir convaincre Tanguay et son agent qu'elles sont les meilleurs choix pour un joueur de sa trempe. Le Canadien sera un des soupirants mais sans plus. Le seul avantage étant la valeur culturelle de Montréal et du Québec pour Alex et sa famille. Le reste, va falloir que Bob Gainey ou son successeur offre aussi bien que la concurrence. J'écoutais des experts et des fans y aller d'analyses très savantes. Genre: «Moi, je garde Tanguay. Mais pas à plus que trois millions, trois millions et demi. Et à cause de son épaule, j'y vais avec une offre conditionnelle.»

Bien sûr, grand connaisseur. Pis que se passe-t-il si les Blues de St. Louis ou les Blackhawks de Chicago offrent cinq millions sans condition? Merci beaucoup, ça fait toujours du bien de réfléchir.

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Évidemment que Bob Sauvé prépare ses négociations. Il a ouvert une belle porte à Bob Gainey en lui faisant une fleur hier. Il a noté qu'avec une baisse anticipée du plafond salarial, peut-être que la situation difficile de Gainey sur le marché des joueurs autonomes va se transformer en coup de génie.

Merci Bob, mais pour celle-là, faudra repasser. D'abord, le plafond salarial de la prochaine saison sera établi à partir des revenus de cette saison. Donc, il n'y aura pas de baisse. Il se peut effectivement que dans deux ans, on voie une baisse de quelques millions du plafond. Voulez-vous gager votre chemise que les grosses équipes qui mènent la Ligue nationale comme les Rangers de New York, les Flyers de Philadelphie, les Red Wings de Detroit, les Maple Leafs de Toronto ou le Wild du Minnesota imposeront rapidement une clause grand-père sur les contrats à long terme déjà signés? C'est inévitable pour avoir la paix avec l'Association des joueurs.

Toute la philosophie d'un plafond salarial tient sur une économie en perpétuelle expansion comme on en a connu depuis le début des années 90. Quand ça va commencer à serrer, vous allez voir des mouvements de résistance tant chez les propriétaires mieux nantis que chez l'Association des joueurs.

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Bob Sauvé a cependant raison quand il souligne que c'est à la source que le Canadien doit aller chercher les joueurs francophones qui redonneront au Canadien son identité et son coeur. La façon dont Trevor Timmins a géré le service crucial du repêchage est un vrai scandale. Il a fait preuve d'un manque de jugement et de sensibilité difficilement défendable. Comment Pierre Boivin a-t-il pu fermer les yeux toutes ces années?

Et évidemment que Robert Sauvé a mille fois raison quand il dit qu'il attendra de savoir qui sera propriétaire, président, directeur général et coach de cette organisation à la dérive.

Le problème, c'est que George Gillett espère toujours sauver le Canadien en trouvant des investisseurs qui vont éponger ses dettes pour 400 millions en achetant une participation minoritaire dans son petit empire. Mais hier, en discutant avec un avocat représentant une grande institution financière faisant aux États-Unis le même travail que Jacques Ménard avec la BMO à Montréal, il était évident qu'à moins d'un miracle, Gillett ne trouvera pas ces investisseurs.

Donc, il devra vendre soit Liverpool soit le Canadien. Et à cause de ses problèmes avec Tom Hicks, son partenaire à Liverpool, c'est le Canadien qui va se retrouver à vendre.

Mais quand? On n'achète pas une propriété aussi complexe que le Canadien de Montréal, le Centre Bell, le centre d'entraînement de Brossard et le Groupe de spectacles Gillett en deux semaines. En attendant le dénouement de ces négociations, au mieux le 1er juin selon mes informateurs, c'est donc Bob Gainey qui va diriger la parade. Mais va-t-il oser embaucher un coach qui pourrait être congédié par les nouveaux propriétaires? Et lui, va-t-il ramasser ses deux années de salaire et sacrer le camp ou réussira-t-il à convaincre les nouveaux patrons qu'il est l'homme de la situation?

Si je me pose ces questions de base, soyez assurés que de bons agents comme Robert Sauvé se les posent aussi.

DANS LE CALEPIN

Me Marcel Aubut, président du Comité olympique canadien, est en deuil. Sa mère, Omérine Proulx-Aubut, est décédée mardi. Me Aubut a été dévasté en apprenant la triste nouvelle. Elle laisse quatre enfants. La famille recevra les proches et les amis au salon Lépine Cloutier et les funérailles auront lieu demain, à 14h, à l'église Saint-Charles Garnier à Sillery. Nos condoléances à Me Aubut et à la famille.