En quelle année la Confédération canadienne est-elle née? J'ai hésité. C'était la première des 33 questions du quiz CROP-La Presse qui s'amusait mardi à évaluer la culture générale des Québécois. Celle-là était facile pour vous, un truc de la petite école, sauf que je ne suis pas allé à votre petite école (ni à la grande). Vous savez, vous, en quelle année l'Italie est devenue l'Italie? Ah.

À la fin du quiz, je vous ai quand même dépassés, mais rien pour se péter les bretelles, 42% pour vous 57% pour moi. Je me suis même planté dans les questions sportives, qui sont pourtant ma culture refuge. Par exemple, hier soir, plutôt que de suivre les résultats des élections de mi-mandat, j'ai suivi ceux de la NBA, guère moins déprimants. Mes nouveaux amis, les Cav's de LeBron, se sont fait royalement planter par les Blazers.

57%. Non seulement je n'ai pas honte, mais j'ai ri comme un fou à certaines questions, par exemple: Que veut dire le mot «kébec» en algonquin? Euh... Là où on se gèle le cul?

Je ne me trouve pas nono non plus de ne pas savoir que Spielberg n'a pas fait La guerre des étoiles ni que Arcand a fait la série Duplessis. La culture culturelle, c'est la plus difficile. L'autre jour, mon journal faisait sa une avec le chanteur qui a tout gagné au gala de l'ADISQ. Croiriez-vous que je n'avais jamais entendu son nom? Cette définition samedi dans la Grille des mordus: «A fait fuir Séraphin Lampion du château de Moulinsart», croiriez-vous que j'ai cherché (en vain!) Moulinsart et Lampion dans le Larousse?

Si je ne sais rien de Tintin, je savais par contre que c'est à Sarajevo que le prince héritier de l'empire austro-hongrois a été assassiné. Mais c'est pas parce que je suis intelligent, c'est parce que j'étais là.

J'était bien content aussi de ne pas savoir quel était le deuxième exportateur de pétrole au monde; je me suis trouvé un peu bête de ne pas reconnaître la formule de la vitesse de la lumière, et j'ai sacré une seule fois, c'était à la question: Quel athlète canadien parmi les suivants a gagné le plus de médailles olympiques?

La réponse est Clara Hughes. Comme tout le monde, j'aime bien Clara, mais je me crisse totalement de savoir qu'elle a gagné six médailles et Marc Gagnon, seulement cinq. Cette question donne la mesure anecdotique du quiz. Si on avait voulu toucher à la culture sportive, la question aurait pu être celle-ci: Clara Hughes est l'athlète canadienne qui a gagné le plus de médailles olympiques. Dites dans quelles disciplines. Ou plus culture-sport encore: Dans quelles épreuves?

Anecdotique donc. La seconde des 33 questions: Qui de Platon, Socrate, Aristote, Diogène, Euclide est tenu pour le fondateur de la philosophie occidentale? Mettons qu'on est bien ici dans la culture. Fallait-il ajouter: il est mort en buvant de la ciguë? Ciguë-Socrate, tout le monde fait le lien, on vient de quitter la culture pour le fait divers, pour la série HBO. (Au fait, pourquoi Socrate? Pourquoi pas Platon? Tout ce qu'on sait de Socrate, c'est Platon qui nous l'a dit.)

Sommes-nous cultivés? C'était la question que posait mon journal. La mauvaise nouvelle, c'est que les 863 personnes auxquelles on a fait passer le test se sont assez lamentablement plantées.

L'autre plus mauvaise nouvelle encore, c'est que ce n'était même pas un test de culture. Si c'en avait été un, un vrai, hé madame!

La bonne nouvelle, c'est que non. Sur sa lancée, La Presse ne fera pas passer de test de lecture à ses lecteurs pour évaluer leur niveau de littératie. (L'Organisation de coopération et de développement économique (OCDE) relevait en octobre l'an dernier que 53% des Québécois avaient du mal à lire correctement).

FAUT-IL QU'UN PONT FASSE RÊVER? - On continue dans la culture, celle des ponts. Votre amour pour Samuel de Champlain ces jours-ci m'impressionne beaucoup. Je ne vous savais pas si attaché à ce monsieur qui, de retour en France après avoir exploré le Saint-Laurent, publia un récit de son voyage sous le titre: Des sauvages. Je viens de le relever dans Le Petit Robert des noms propres. Ne faut-il pas plutôt dire «des autochtones» ?

Je crains d'être aussi nul en explorateurs qu'en chanteurs populaires. Durant le Tour de France 1997, qui faisait étape ce jour-là à Marennes, j'avais trouvé à me loger juste à côté, dans le très curieux village de Brouage chez une dame qui habitait devant le bureau de tabac, il m'en souvient, rue du Québec. Vous êtes ici en pays de connaissance, m'avait-elle éclairé, c'est d'ici, de Brouage, que vient «votre» Samuel de Champlain... et devant mon air ahuri: Champlain enfin, Champlain! Vous y êtes?

Euh... oui bien sûr, le pont!

Franchement, je connais mieux Maurice Richard. Je suis même allé chez lui une ou deux fois pour des entrevues. Mon accent lui rebroussait le poil: t'es Françâ? J'aimais mieux son épouse, Lucille. Ne pourrait-on pas donner plutôt le nom de son épouse au pont?

Ou pourquoi pas, comme on le fait si élégamment pour les édifices à vocation sportive, pourquoi pas le nom d'un généreux commanditaire: le pont Uniprix. Le pont Brault-et-Martineau. Le pont Urgel-Bourgie.

Le pont qui enjambe la Rivière aux brochets dans la petite ville de Bedford, où je fais mes courses s'appelle, formidablement je trouve, le pont Zéphyr-Falcon, que j'ai rebaptisé juste pour moi, juste pour sourire chaque fois que je passe dessus: Zéphir-Falpont.

Vous pourriez l'emprunter pour votre nouveau pont Champlain, les gens de Bedford en seraient fiers; c'était leur capitaine des pompiers comme Maurice était capitaine du Canadien.