Le jour où madame Marois a annoncé son Conseil des ministres, j'étais sur un chemin de terre au Vermont. Quand je suis revenu à la maison, j'ai posé mes questions habituelles: des téléphones? De la visite? Les minous sont bien? Puis ça m'est revenu d'un coup: c'est vrai, Mme Marois annonçait son Conseil des ministres cet après-midi... Alors? C'est qui le nouveau ministre de...

Tiens, juste pour s'amuser, de quel ministère m'inquiétais-je si spontanément? De la Santé? Vous êtes drôles, vous. Des Ressources naturelles? Là, vous vous moquez. De la Culture, bien sûr.

C'est qui, le nouveau ministre de la Culture, mon amour?

Maka Kotto. T'es content?

J'eusse été content de toute façon puisque ce ne serait plus Mme Christine St-Pierre. Maka Kotto? Franchement, tout ce que je savais de lui, c'est qu'il était le mari de la mairesse de Longueuil. Depuis, j'ai lu l'article tiède et dubitatif de ma collègue Nathalie Petrowski dans notre journal d'hier; on me rapporte aussi que, dans une autre salle de rédaction, une autre collègue culturelle faisait les cent pas en attendant l'annonce de Mme Marois en marmonnant: j'espère que ce ne sera pas Maka Kotto, j'espère que ce ne sera pas Maka Kotto.

Eh bien, c'est lui. Franchement, cela ne me fait pas un pli. Je viens de me rendre compte que un: tout le monde s'en fout, et deux: que je me suis toujours mépris sur ce que devrait être un ministre de la Culture.

J'ai toujours cru qu'un ministre de la Culture se devait d'être culturel, familier des Lettres et des Beaux-Arts - notez les majuscules et ma naïveté. Je me disais est-ce que l'on nommerait un coiffeur pour dames aux Finances? Un éleveur de chiens à la Santé? Alors pourquoi nomme-t-on toujours à la Culture quelque béotien, béotienne, comédien, comédienne, journaliste, journaliste qui n'a rien lu, qui ne sait rien de la littérature d'ici et d'ailleurs, et pire que pire, qui confond culture et industrie du divertissement, et qui prend les produits de cette culture pour des oeuvres.

Je comprends bien qu'un ministère de la Culture doit avoir pour objectif de faciliter l'accès du public aux oeuvres et vice-versa: de donner aux artistes de la visibilité et les moyens de créer. Mais je croyais aussi - très naïvement, je le répète - qu'un ministre de la Culture était d'abord ministre de... la culture, pas seulement de la diffusion, de la promotion de la culture, et qu'il n'était pas seulement gardien des lieux culturels (musées, etc.), pas seulement ministre des environs de la culture, pas seulement ministre de la consommation culturelle, mais bien ministre de la chose elle-même: la culture.

Ministre du goût, du jugement, du sens critique, je veux dire ministre des politiques, des dispositions qui permettent de former le goût, le jugement, le sens critique.

Je confonds avec le ministre de l'Éducation?

Je vois quand même une petite différence. Le ministère de l'Éducation élabore des stratégies pour former des analphabètes fonctionnels. Le ministère de la Culture s'emploie à garder ceux qui savent lire dans un illettrisme culturel, très fonctionnel aussi. Faut pas dramatiser, ça n'empêche pas de twitter, de bloguer, de iPader, de facebooker et de comprendre toutes les blagues au Festival de l'humour.

RETROUVAILLES - C'était samedi matin. Il y avait les Italiens, Marinoni, Meco, Filippin, Mori. Il y avait Robert Van den Eynde, Yves Landry, le docteur Éric Magnoux, Gilles Larose, Aboud Ahkem, Pierre Dumais, Roger Filion descendu d'Alma. Il y avait les jumeaux Lessard, Noël et Jean - c'est Jean qui a trouvé le parcours, mais c'est Gilles Durand qui a eu l'idée de battre le rappel d'une partie du peloton des années 70 pour une randonnée souvenir d'une cinquantaine de kilomètres, départ et arrivée à l'Euro Spa à Saint-Ignace. C'est chez moi, mes routes, mes paysages, c'est mon peloton aussi. Pas comme coureur, je ne l'ai jamais été, mais comme journaliste, j'ai couvert les courses de ces gars-là pendant des années.

Je ne les aurais pas reconnus dans la rue, pour la plupart la mi-soixantaine, plusieurs ont des petites bedaines. Je me suis dit tiens, tiens, j'aurai pas de misère à les suivre, je pourrai dire qu'une fois dans ma vie, j'ai tenu la roue des meilleurs coureurs cyclistes qu'a comptés le Québec...

Les crisses! M'ont lâché au bout d'un demi-kilomètre!

Manquaient quelques gros noms: Jules Béland, Marcel Roy, qui étaient des Jeux olympiques de Mexico avec Yves Landry en 1968; manquaient Marc Blouin, Pierre Dandre; manquait surtout un de mes préférés de toujours, Magella Tremblay, trop malade pour rouler, je crois même pour marcher, un garçon adorable. Salut, Magella, prends soin de toi.

PÉPÉ-LA-VIRGULE, BIS -

Mardi, je disais que le problème n'est pas la prolifération des fautes [publiques] - affiches, pancartes, pub -, mais notre indifférence à ces fautes.

Il vient de m'arriver cette illustration parfaite. Bell orchestre en ce moment une campagne de pub articulée autour des cinq raisons pour lesquelles nous devrions choisir Bell. Ces jours-ci, dans les quotidiens de la province, ce titre qui court sur deux pages: 5 raisons pourquoi tant de Québécois choisissent Bell...

Une faute de mauvais élève de 2 e secondaire. Il fallait écrire bien sûr 5 raisons pour lesquelles; cinq raisons pourquoi, c'est du moldave. Pire, c'est de l'anglais, calvaire: 5 reasons why...

Il y a eu le traducteur de l'agence de pub qui a fait la faute. Il y a eu son boss qui ne l'a pas vue. Il y a eu les gens de Bell qui l'ont approuvée. Il y a eu les gens des médias qui l'ont imprimée sans sourciller. Il y a eu surtout des dizaines de milliers de lecteurs qui ne s'en sont même pas aperçus. Et enfin, il y a tous ceux qui, en ce moment, me lisent et disent: il est bien énervé, c'est pas si grave que ça.

Ça l'en fait du monde qui devrait refaire sa 2 e secondaire.