Au cours des dernières années, j'ai eu à quelques reprises à me rendre au CLSC ou à l'hôpital pour recevoir une piqûre de ceci ou cela tous les matins, pendant une ou deux semaines d'affilée, voire un mois. La dernière fois, un beau matin, l'infirmière me dit comme ça: vous savez que vous pourriez très bien vous faire vous-même cette piqûre?

Ah oui?

Vous voulez qu'on essaie? C'est enfantin. Vous vous pincez le gras du ventre pour faire un bourrelet. Et couic.

Couic?

Absolument. Sortez le petit tampon alcoolisé de son enveloppe. Frottez ici.

Ici?

Ou là. C'est correct aussi. Attendez deux secondes que l'alcool s'évapore, pour ne pas que ça chauffe quand vous entrerez l'aiguille. O.K., on est prêt? La seringue doit faire un angle droit avec le ventre. Un petit coup sec dans le bourrelet. Couic. Et voilà, vous savez faire une piqûre.

Je l'ai appelée madame Couic. Grâce à elle, je n'ai plus peur d'être malade. Je vais me soigner tout seul.

Et cela m'a donné une idée pour la vaccination massive contre la grippe A(H1N1) qui cause tant de tracas aux services de santé publique. Pourquoi ne pas envoyer le vaccin à tous les citoyens par la poste? Un petit kit avec le tampon et la seringue. Et voilà. On passe à autre chose.

J'ai appelé au ministère de la Santé pour leur donner mon truc. Je suis tombé sur un ostineux: ça peut pas marcher! Avec cette voix traînante du gars pas vite mais en même temps tellement content de te le cracher: ça peut pas marcher!

Ah non? Pourquoi?

Parce qu'il faut garder le vaccin au froid.

Et alors? J'ai un frigo.

Ces gens-là sont des boulets. Sauf que moi, les boulets, je cours avec, je fonce pareil. Je suis né comme ça, sous le signe du progrès et de l'innovation. Anyway, j'ai trouvé une meilleure solution encore. Entièrement sécuritaire. Voici. On convoque les gens au Centre Bell, ou au Stade olympique. Quand ils arrivent, au lieu de leur donner un coupon à la con, pis de les faire revenir trois heures après, on leur donne directement le petit kit, le tampon antiseptique, la seringue. Ils vont s'asseoir. Quand les gradins sont pleins, on ferme les portes. Une infirmière apparaît sur une estrade centrale bien en vue de tout le monde et, un peu à la manière dont les hôtesses de l'air miment les consignes de sécurité dans l'allée de l'avion, l'infirmière montre aux 40 000 personnes assises dans les gradins comment procéder.

Sortez le petit tampon alcoolisé de son enveloppe. Frottez ici. On attend deux secondes que l'alcool s'évapore. On se pince un petit bourrelet. La seringue doit faire un angle droit avec le ventre, comme ceci. O.K., tout le monde est prêt? Couic.

Ça a pris quoi? Une minute et demie pour vacciner 40000 personnes en même temps. On les fait sortir. En sortant, ils jettent la seringue dans un conteneur (ou ils la gardent en souvenir, c'est comme ils veulent). On en fait entrer 40000 autres. À midi, c'est fini. Avec une infirmière, UNE seule, on a vacciné toute la province dans la matinée.

Ne me remerciez pas.

ON RESTE CALME - Devant le besoin pressant d'infirmières, un CSSS de Montréal a rappelé au début de la semaine ses infirmières enceintes en retrait préventif, pour leur confier des tâches en relation avec la A(H1N1), mais sans danger, comme donner de l'information au téléphone.

Sauf que le besoin se faisant plus pressant, ce lundi, il a été décidé que les infirmières enceintes iraient vacciner sur le terrain. Après qu'elles aient reçu elles-mêmes le vaccin, bien entendu.

Sauf que le besoin se faisant encore plus pressant, on leur a commandé d'y aller immédiatement.

Comment cela? Le vaccin n'est-il pas effectif que 15 jours après avoir été donné?

Tout de suite, qu'on vous dit.

Ce n'est que jeudi qu'on s'est avisé de la folie de la chose. Une seule des 15 était déjà sur le terrain quand la directive interne a été abandonnée.

Au même moment où les services de santé publique enjoignent à la population de rester calme, certains d'entre eux, comme ce CSSS, donnent des signes d'affolement.

C'est pas une bonne idée de nous dire qu'il y a pas le feu, pis d'envoyer au front des pompiers enceintes jusqu'aux yeux. Parlant d'incendie, vous savez ce qui arrive quand le feu pogne dans un endroit où il y a beaucoup, beaucoup, beaucoup de monde et peu d'issues? Le monde ne meurt pas du feu. Le monde meurt piétiné.

CLICHÉ - Dites-moi, cet Éric Caire qui ne veut plus être député de l'ADQ, est-ce celui-là qui, pendant la récente campagne au leadership de l'ADQ, se vantait, dans son CV, d'un diplôme qu'il n'a jamais obtenu? Son adversaire le sommant de s'expliquer, il a raconté que c'était la faute d'un mauvais prof qui donnait un cours magistral à l'ancienne, un cours qui ne convenait pas à sa forme d'intelligence, à lui, Éric Caire. Il a donc abandonné ce cours. Mais bon, n'eût été de ce prof rétrograde et peut-être même socialiste, il aurait obtenu ce diplôme sans problème. Une formalité. C'est pourquoi il s'était permis de l'ajouter à son CV.

L'extraordinaire dans cette histoire, c'est que l'opinion publique et une bonne partie des médias ont volé à son secours, trouvant son adversaire bien malveillant et chipoteux.

C'est un cliché, certes, mais il se vérifie ici avec une formidable acuité: on a les politiciens qu'on mérite. Et peut-être bien les journalistes aussi.

LE BIEN ET LE MAL - Ça tombe mal: l'officier de l'armée américaine qui a tué 13 soldats américains et en a blessé 30 autres à la base de Fort Hood au Texas, jeudi, se déclare contre la guerre au terrorisme.

Ça tombe encore plus mal: musulman pratiquant, il se dit «a Muslim first and an American second».

Un fou? Ah, cette fois, ça tombe très bien: il est psy.