Avant toute chose, je dédie ma sortie à vélo de dimanche à tous les météorologues de la province qui prévoyaient depuis le milieu de la semaine que samedi ne serait pas si mal (il a plu toute la journée), mais que dimanche, oh là là! dimanche, quel sale temps mon ami, des trombes de pluie, du vent...

Je ne sais pas chez vous, mais chez moi dimanche a été magnifiquement ensoleillé, une journée radieuse, pas un seul nuage dans un ciel tout bleu, même qu'il faisait presque doux.

Une journée volée à l'hiver est toujours une belle journée, mais qui devient carrément jouissive quand, en plus, tu peux mettre un doigt dans le cumulonimbus de la météorologue qui prédisait que ce serait pourri. Tiens toé.

Mais j'allais surtout vous entretenir de sport. Et d'abord revenir un peu sur les Jeux, vous raconter comment j'ai failli mourir le lendemain de mon retour de Pékin en lisant mon journal.

En mon absence, ma fiancée empile les Presse sur mon bureau. Je les passe au crible à mon retour. J'ai ouvert au hasard le premier que j'ai tiré de la pile, pour tomber sur quoi ? Sur la chronique d'un psy, dont le titre était ce jour-là: Comment battre les Chinois. Comme si ce n'était assez de niaiserie, cette phrase prise aussi au hasard: la pire chose que les athlètes canadiens pourraient faire à Pékin est de croire que les Chinois vont les dominer...

Je me suis mis à gémir.

Où t'as mal? s'est inquiétée ma fiancée.

J'ai mal à mon journal, mon amour.

À part en plongeon, les Chinois ne sont pour strictement rien dans les quelques grandes défaites canadiennes des Jeux: Marie-Hélène Prémont (vélo de montagne), Tyler Christopher (400 mètres), Van Koeverden (kayak), Gary Reed (800 mètres), etc.

Et même en plongeon, Heymans et Despatie n'ont pas été battus « psychologiquement », ils ont été battus sur leur valeur ce jour-là, devancés, ben oui, par des Chinois, il eût été surprenant que ce fût par des Touaregs qui ne pratiquent pas tellement le plongeon.

Si les psys m'indiffèrent la plupart du temps, les psys sportifs me font mourir. J'ai rencontré celui-là, doucereux comme un fakir hindou, à des championnats canadiens de natation il y a quelques années. Il était à l'époque dans l'entourage d'une athlète qui s'est d'ailleurs ratée à Pékin, sûrement pas faute de confiance en elle. C'est bien ce qui me fait hurler : les psys sportifs servent aux athlètes un discours confituré d'estime de soi. Or la plupart des athlètes d'élite savent qu'ils sont les meilleurs depuis qu'ils sont tout petits, sentiment renforcé chaque fois qu'ils sont choisis dans une sélection, pas besoin d'en rajouter, même que souvent un petit doute les aiderait grandement, sinon à gagner, du moins à être moins chiants dans la vie. Je pourrais vous donner des noms.

Un athlète qui dit quatre fois le mot «positif» dans une entrevue de cinq minutes, c'est, premièrement, un athlète qui est suivi de trop près par son psy, et, deuxièmement, c'est un athlète qui va se faire planter à sa prochaine compétition. Combien on gage?

Anyway, il n'est pas inutile de le répéter, malgré quelques défaites inattendues, malgré ce qu'indique leur classement officieux (19e), et malgré les psys, les athlètes canadiens ont très bien fait à Pékin.

LE DIABLE - Le grand truc sportif depuis Pékin a été le marathon de Berlin, le 28 septembre dernier. Gebreselassie a retranché une demi-minute ou presque à son record pour briser la barrière des quatre minutes. 2 h 3 min 59 s.

Vous savez l'admiration que j'ai pour le petit Éthiopien, reste que j'ai applaudi moins fort que d'habitude. Je n'ai pas aimé le show que Gebre nous a fait avant Pékin quand il a dit qu'il ne courrait pas le marathon olympique à cause de la pollution. Pourquoi n'avoir pas dit qu'il était engagé à Berlin un mois plus tard ? On n'est pas nonos, on aurait compris que c'était plus payant à Berlin.

Pour revenir à ce record - 2 h 3 min 59 s -, des fois je me demande si je le verrai passer sous les deux heures de mon vivant. Mettons que le diable me ferait ce marché : tu vas mourir le jour où un marathonien courra sous les deux heures. Signe ici.

Mettons que cela prendrait 20 ans, alors ma dernière chronique sera publiée le 28 octobre 2028, je vous en donne tout de suite le titre : 1 h 59 min 59 s!

LE DIABLE ENCORE - Il faut bien reparler de Armstrong qui s'enligne maintenant sur le Giro. Je risque une explication : Armstrong a un doute sur sa capacité à revenir au niveau où il était quand il a arrêté. Au Giro, où il est assuré de la sympathie des organisateurs, il pourra improviser plus facilement, jouer la gagne s'il a les jambes, jouer la campagne de souscription pour sa fondation contre le cancer s'il est trop juste, et même une troisième option : préparer le Tour de France.

Sans écarter qu'il annule et le Tour et le Giro si son début de saison lui dit qu'il n'est plus dans le coup.

MAXIME - Mon ami Maxime, vous vous rappelez ? Il est retourné au Japon. À Nagoya. Extrait de son dernier courriel...

Nagoya est une ville comme Hull avec 8 000 000 d'habitants. Ma blonde (japonaise) a été transférée là, je l'ai suivie. C'est assez moyen comme vie, je me sens comme un fan des Sénateurs d'Ottawa. J'enseigne l'anglais à des soldats japonais qui vont être envoyés en Irak. Je les prépare comme pour un concours oratoire dans le désert. Ma famille me manque. Mon frère qui travaille. Mon chien qui boite. Ma mère qui pèse sur les boutons du micro-ondes. J'arrête, je vais me mettre à brailler comme une échalote. Maxime.