Le terrain de golf des Jeux de Rio ? Super amusant à jouer, selon Rickie Fowler. « Ils ont accompli un bon boulot pour préserver les habitats naturels. Si j'étais un capybara, j'adorerais vivre au parcours olympique ! »

Oubliez les trappes de sable, les obstacles d'eau et l'herbe longue. Ce que les golfeurs voudront d'abord éviter jeudi, à l'ouverture du tournoi masculin, c'est une rencontre inopinée avec un capybara ou un caïman. La présence de ces rongeurs, dont le poids peut atteindre 65 kg, et de ces reptiles au regard si peu convivial confère déjà au terrain une signature unique. « Je ne voudrais pas me retrouver dans un combat contre un capybara », a ajouté Fowler, sourire aux lèvres.

Pour la première fois depuis les Jeux de St. Louis en 1904, le golf est une discipline olympique à Rio. Ce choix n'a pas fait l'unanimité.

Fallait-il vraiment inclure ce sport jouissant déjà d'un immense retentissement ? Et dont les têtes d'affiche, des athlètes multimillionnaires, profitent d'une notoriété hors du commun ? Pourquoi ne pas avoir plutôt opté pour le squash ou le karaté, qui souhaitaient aussi obtenir cette chance ?

Le débat s'est accentué au cours des dernières semaines lorsque quatre des meilleurs joueurs du monde (Jason Day, Rory McIlroy, Jordan Spieth et Dustin Johnson) ont fait l'impasse sur Rio, invoquant le danger représenté par le virus Zika. Mais il est clair que des craintes liées à leur propre sécurité ont aussi influencé leur décision.

Cette tournure inattendue des évènements a déçu les autorités du golf. Leur sport sera des Jeux de Tokyo en 2020, mais le CIO n'a pas encore tranché pour la suite. Les commentaires égocentriques de McIlroy, qui a expliqué ne ressentir aucune responsabilité par rapport à l'essor de son sport dans le monde, ont aussi fait mal. Comme si la nouvelle génération de golfeurs, si habituée à recevoir, ne savait pas comment donner.

En revanche, tous les golfeurs n'ont pas cette approche. Hier après-midi, les quatre membres de l'équipe américaine ont exprimé leur plaisir d'être à Rio. Aux côtés de Fowler, on retrouvait Bubba Watson, Patrick Reed et Matt Kuchar. Ils ont tous été intéressants, mais Fowler a dégagé une autorité naturelle.

« J'ai essayé de convaincre Jordan [Spieth] de venir à Rio, a-t-il expliqué. Cela dit, on respecte les décisions de chacun, peu importe si elles sont motivées par des raisons d'horaire, de santé ou de sécurité. »

« Personnellement, je me sens en sécurité, que ce soit au village des athlètes, dans les sites de compétition ou dans les transports. Quant aux moustiques, j'en ai vu un ou deux, mais rien d'exceptionnel », a dit Rickie Fowler.

Patrick Reed a ajouté : « Peu importe où on joue dans le monde, il faut mettre de la crème solaire et du chasse-moustiques, en plus de bien s'hydrater. C'est la norme ».

Le message à leurs collègues n'ayant pas fait le voyage à Rio, transmis avec gentillesse, avait néanmoins la force d'un puissant coup de départ fendant l'allée. Et Reed a ajouté un roulé de 60 pieds en expliquant à quel point il était important pour lui de contribuer à la popularité du golf sur la scène internationale. « Faire partie des Jeux olympiques, c'est énorme ! a-t-il dit. Je suis excité de jouer pour mon pays et pour mon sport. »

Matt Kuchar était bien d'accord. Sa place à Rio, il la doit au désistement de ses compatriotes mieux classés que lui. « Je croisais secrètement les doigts dans l'espoir que des joueurs se retirent. Participer aux Jeux est un rêve de jeunesse. Je vis une expérience extraordinaire. Et j'ai toujours pensé qu'il y avait de l'exagération avec tout ce qu'on a entendu au cours des derniers mois. Hier, ma femme et moi avons visité la ville et ce fut fantastique. »

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À tous les Jeux, on constate à quel point les athlètes gagnant des millions en pratiquant leur sport vivent des moments fabuleux en côtoyant les autres olympiens. À Sotchi, Carey Price, habituellement si réservé, ne cachait pas son enthousiasme en évoquant ces rencontres. Eugenie Bouchard répète la même chose depuis son arrivée à Rio. Et Rickie Fowler tient maintenant des propos identiques.

«  En attendant de monter dans les autobus pour aller à la cérémonie d'ouverture, j'ai discuté avec des plongeurs, des joueurs de volleyball et des joueuses de basket, a-t-il raconté. On a parlé de nos sports respectifs, de leurs similitudes, de l'importance de la préparation mentale. Ils m'ont posé des questions sur le golf, c'était le fun de discuter avec eux. »

Des ponts sont ainsi créés entre deux univers sportifs qui se rencontrent trop rarement. Cela est très bien, mais ne répond pas à l'enjeu principal.

Le golf a-t-il sa place aux Jeux olympiques ? À mon avis, oui. Il s'agit d'un sport de dimension globale, populaire en Amérique et en Europe, bien sûr, mais aussi en Asie, en Océanie et en Afrique du Sud.

De plus, considérer le tournoi de Rio comme un quasi-échec en raison de l'absence des meilleurs joueurs, et en tirer des conclusions prématurées, fait abstraction d'une importante réalité. Du côté des femmes, dont le tournoi se mettra en branle dans une semaine, les vedettes sont au rendez-vous. Parmi elles, la Canadienne Brooke Henderson qui, à l'âge de 18 ans, est déjà une des meilleures au monde. Le spectacle s'annonce palpitant.

Cela dit, le golf doit maintenant développer sa tradition olympique. Comme le tennis l'a réussi. Après avoir fait partie des Jeux de 1896 à 1924, ce sport a été écarté. C'est seulement en 1988 qu'il est réapparu au programme. Et depuis ce temps, le tournoi olympique est devenu un incontournable pour les joueurs. Les larmes de joie d'Andy Murray après sa conquête de la médaille d'or à Londres en 2012 et la peine de Novak Djokovic après son élimination à Rio l'ont bien démontré.

Le même phénomène se produira inévitablement au golf, si le CIO se montre patient. Et dans 20 ans, on se souviendra que l'aventure a commencé sur un parcours où il fallait garder l'oeil ouvert sur les capybaras et les caïmans.

Los Angeles et l'effet Trump

Dans cette compétition olympique, la médaille ne sera pas donnée à Rio, mais à Lima, au Pérou, le 13 septembre 2017. Ce jour-là, les membres du Comité international olympique choisiront la ville où les Jeux d'été de 2024 seront tenus. Les candidates sont Budapest, Los Angeles, Paris et Rome.

Hier, les membres du comité de Los Angeles ont rencontré les journalistes, comme ceux de Paris l'avaient fait la semaine dernière. Les gens de Budapest et de Rome suivront au cours des prochains jours.

Eric Garcetti, maire de la métropole californienne, était de la partie. Dans une récente entrevue à l'Associated Press, il a évoqué les inquiétudes de certains membres du CIO par rapport à la possibilité que Donald Trump soit élu président des États-Unis.

« Notre candidature ne dépend pas d'une élection. Elle est celle d'une ville connectée aux Jeux olympiques. »

« Mais comme je l'ai dit, une Amérique qui se replie sur elle-même, comme n'importe quel pays agissant ainsi, n'est pas une bonne chose pour la paix dans le monde ou le progrès », a-t-il ajouté, hier.

Los Angeles ira de l'avant avec son projet olympique, peu importe les résultats de l'élection présidentielle de novembre prochain. Mais il est évident qu'une victoire de Donald Trump poserait une énorme difficulté au comité de candidature.

Le maire joue une carte forte en rappelant que presque toutes les installations sont déjà construites : « Au lieu d'angoisser sur les travaux de construction durant sept ans, on pourra se concentrer sur ce qui est important : les athlètes et les compétitions ».

Le dossier de Los Angeles semble bien ficelé. Mais la partie est loin d'être gagnée, malgré le rôle majeur des États-Unis dans les affaires olympiques.

Photo Andrew Boyers, Reuters

La présence de capybaras, rongeurs dont le poids peut atteindre 65 kg, confère déjà au parcours de golf de Rio une signature unique.

Photo Andrew Boyers, Reuters

L’Américain Rickie Fowler a tenu des propos intéressants, hier, à propos de sa présence à Rio.