Non, Andrew Shaw n'est pas le chaînon manquant à l'attaque du Canadien. Mais son arrivée représente une bouffée d'air frais. Pourquoi? D'abord et avant tout parce qu'elle constitue le premier coup d'envergure de Marc Bergevin en 15 mois.

Il faut en effet remonter au 2 mars 2015 pour repérer son précédent geste significatif. Ce jour-là, le DG du Canadien a acquis un des joueurs les plus convoités en cette date limite des transactions, Jeff Petry, des Oilers d'Edmonton.

Bergevin a ensuite été moins efficace. Il s'est activé, bien sûr, mais ses tentatives n'ont pas donné les résultats espérés (Alexander Semin, Zack Kassian) ou n'ont servi qu'à ajouter du personnel de soutien (Paul Byron, Ben Scrivens et quelques autres...). À moins, bien sûr, que Phillip Danault ne se démarque plus tard.

Dans la transaction de vendredi, j'ai revu le Bergevin qui m'avait impressionné à ses trois premières années à Montréal. Il a mené de manière concomitante les échanges avec les Blackhawks de Chicago (obtention de Shaw) et les Capitals de Washington (départ d'Eller), évitant ainsi d'alourdir sa masse salariale et conservant le même nombre de choix au repêchage. Du travail bien fait, avouons-le!

Cela dit, le Canadien a encore besoin d'aide en vue de la prochaine saison. L'arrivée de Shaw colmate des brèches sur la glace et dans le vestiaire, mais ce n'est pas suffisant. Voilà pourquoi Bergevin ne doit pas ériger en dogme ses réserves à propos du marché des joueurs autonomes.

Oui, les contrats de trop longue durée pèsent parfois lourd sur une organisation. Mais le 1er juillet demeure le moment idéal de renforcer une équipe sans céder d'actifs en retour.

C'est encore plus vrai pour le Canadien, une équipe profitant de sa «fenêtre d'opportunité» pour réussir un bon parcours en séries éliminatoires. Ses têtes d'affiche (Carey Price, P.K. Subban et Max Pacioretty) étant de jeunes vétérans, l'avenir est maintenant.

Souhaitons que Bergevin montre la même audace après-demain que vendredi dernier.

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Les rondes 2 à 7 du repêchage illustrent de nouveau combien le monopole du Canadien au Québec ne sert pas les intérêts de notre hockey. L'organisation n'a sélectionné aucun joueur de la Ligue junior majeure du Québec durant cette séance. Même dans les dernières rondes, il y avait, semble-t-il, toujours de meilleurs candidats disponibles...

Le moment le plus révélateur est survenu en fin de séance. Le Canadien a conclu une transaction avec les Jets de Winnipeg pour obtenir un choix de septième ronde. L'organisation a sélectionné un défenseur suédois, Arvid Henrikson.

Pourquoi? Réponse de Trevor Timmins au 98,5 FM: «Notre dépisteur suédois, qui a passé beaucoup de temps à l'observer, est venu à la table pour nous supplier d'aller chercher un autre choix afin de le repêcher...»

Tant mieux pour Henrikson. Et souhaitons qu'il connaisse une belle carrière.

Mais si le dépisteur suédois du Canadien agit ainsi, s'il se bat pour «ses» joueurs, pourquoi ses collègues surveillant la LHJMQ ne le font-ils pas? Sont-ils moins convaincants quand vient le temps de vendre à leurs patrons les joueurs qu'ils aiment? À moins que leurs «supplications» ne tombent dans l'oreille de sourds...

Mais pourquoi s'en faire avec ça? Après tout, nous dit Timmins, le petit nombre de joueurs québécois repêchés est un «phénomène cyclique»... J'imagine que c'est le même «cycle» qui a empêché le Canadien de choisir Anthony Duclair, toujours disponible lors de la troisième ronde de 2013. Ou d'oublier le prometteur Anthony Beauvillier en fin de première ronde l'an dernier.

Si les Nordiques étaient toujours dans la LNH, le Canadien - n'en doutez pas une seule seconde - serait beaucoup plus sensible à l'importance de choisir quelques joueurs d'ici. Peut-être même que Marc Bergevin aurait réalisé une transaction additionnelle pour mettre la main sur le défenseur Samuel Girard, de peur qu'il ne soit ensuite réclamé par les Bleus...

Cette insensibilité n'empêchera pas le Canadien de se décerner de nouveau une médaille au cours des prochains jours en annonçant que plusieurs joueurs québécois seront «invités» à son camp d'évaluation estival.

Québec et les Hurricanes

Maintenant qu'une équipe de l'expansion n'est plus dans les cartes pour Québec, les partisans du retour des Nordiques espèrent un éventuel transfert des Hurricanes de la Caroline dans la capitale nationale.

Ce scénario est-il crédible? Les difficultés des Hurricanes à attirer de bonnes foules à Raleigh, le désir de leur propriétaire Peter Karmanos de vendre une partie de ses actions et la querelle financière l'opposant à trois de ses enfants nourrissent les attentes des plus optimistes.

Tout est possible, évidemment. Mais l'exemple des Coyotes de l'Arizona me fait croire que cela ne se produira pas.

Pendant des années, les Coyotes ont été dans un état beaucoup plus grave que les Hurricanes aujourd'hui. La LNH a même administré la concession pendant quatre saisons, cherchant désespérément un acheteur. Tout cela pour éviter un transfert dans une autre ville.

Si Gary Bettman s'est donné tout ce mal pour maintenir les Coyotes en vie, pourquoi agirait-il autrement avec les Hurricanes ? Eux aussi font partie de son plan de développement dans le sud des États-Unis.

Aujourd'hui, Bettman peut se féliciter de s'être battu pour les Coyotes. Les nouveaux propriétaires sont solides, un projet de nouvel amphithéâtre est dans les cartons et, sur le plan sportif, l'équipe est sur la lancée. La patience du commissaire est récompensée. Il l'a d'ailleurs souligné à sa façon la semaine dernière, rappelant que la présence des Coyotes avait permis à Auston Matthews, le premier choix du dernier repêchage, de découvrir le hockey.

Bref, compte tenu de la tournure des événements en Arizona, il serait étonnant que Bettman abandonne le marché de la Caroline du Nord à court ou moyen terme.

Dans les circonstances, Québec peut-il espérer le retour des Nordiques? Le défi est plus grand que jamais. Pierre Dion, le PDG de Québecor, a raison de dire que les choses changent vite dans le sport professionnel. Mais puisque Bettman déteste les transferts d'équipe et que cette ronde d'expansion est maintenant terminée, l'avenir n'est pas encourageant.

Quant au dollar canadien, dont la valeur a manifestement inquiété Québecor, une remontée appréciable ne semble pas dans les cartes pour un bon moment. Le Brexit a stoppé le mouvement à la hausse des dernières semaines.

Québecor aurait aussi avantage à dénicher un partenaire pour maintenir le projet en vie. Le risque lié à l'exploitation d'une équipe de la LNH à Québec, compte tenu du coût d'acquisition d'une concession, ne diminuera pas. Le partager avec une autre société pourrait être une solution bienvenue.

Cela dit, les partisans du retour des Nordiques devront s'armer de beaucoup de patience.



Photo James Guillory, Archives USA TODAY Sports

Alors qu’ils viennent de rater les séries éliminatoires pour la septième année de suite, les Hurricanes de la Caroline peinent à attirer des bonnes foules à Raleigh.

Pendant ce temps, à HNIC...

Beaucoup d'encre a coulé à propos du départ de George Stroumboulopoulos et du retour de Ron MacLean à titre d'animateur de Hockey Night in Canada (HNIC). Certains y ont vu un exemple du conservatisme de la LNH.

D'un côté, Stroumboulopoulos, un animateur branché, au style vestimentaire contemporain et au ton différent de celui des animateurs de sport traditionnels; de l'autre, MacLean, un vétéran fiable, mais qui ne renouvelle pas le genre.

MacLean a trop souvent laissé le champ libre à Don Cherry durant leur segment hebdomadaire pour être à l'abri de tout reproche. Mais n'oublions pas une chose: il a parfois poussé Gary Bettman dans ses derniers retranchements dans des entrevues télévisées, lui posant des questions directes à propos de la situation économique de certaines équipes et des négociations en vue de renouveler la convention collective des joueurs.

Lorsque MacLean a perdu son poste en 2014, certains observateurs ont évoqué ces entrevues comme cause possible du changement.

Quant à Stroumboulopoulos, je l'ai entendu interroger Bettman dans une de ses émissions avant qu'il n'obtienne son poste à HNIC: ton trop amical et questions difficiles inexistantes.

À son retour à l'avant-scène, on verra si MacLean conservera son mordant lorsque Bettman s'arrêtera sur son plateau.