Laissons le couple Galchenyuk-Leszczynski régler ses problèmes et la justice faire son travail. Mais pour le Canadien, cette affaire représente une autre tuile dans une saison où rien ne tourne rond après un départ canon.

Les quatre jours de congé après le revers de samedi contre Pittsburgh devaient être une occasion pour le CH de s'énergiser, de retrouver son entrain après la glissade des dernières semaines. Michel Therrien avait hâte de diriger des entraînements dynamiques susceptibles de relancer ses joueurs.

Mais voilà que ce plan, comme bien d'autres depuis plusieurs mois, a été bousillé. Le ton acéré de P.K. Subban après la dernière rencontre a causé une mini-tempête, accentuée par le regard étonné de Max Pacioretty au moment où son coéquipier vidait son sac. Même si les deux hommes ont nié l'existence d'un différend, l'image laissée n'était pas celle d'une équipe solidaire dans la victoire comme dans la défaite.

Mais tout cela état banal à côté de la nouvelle publiée mardi dans La Presse +. Peu importe les circonstances exactes ayant mené à la visite des policiers à la résidence d'Alex Galchenyuk et à l'arrestation de sa copine, cet événement constitue un autre pépin pour le CH.

Le jeune homme n'est pas le dernier venu au sein de l'équipe. Il fait partie du petit groupe de joueurs capable de donner une formidable impulsion au club. Son talent ne fait aucun doute. Mais pour le développer à son maximum, la discipline et la rigueur, même les jours de congé, est essentielle.

Pour briller au plus haut niveau, les athlètes doivent soigner leur préparation. L'écart entre le succès et l'échec tient à peu de choses. Voilà pourquoi ils sont entourés de nombreux spécialistes: thérapeutes sportifs, nutritionnistes et psychologues. Parce que rien ne doit être laissé au hasard. La concurrence est trop forte pour tourner les coins ronds.

Pour certains jeunes athlètes, l'apprentissage de cette réalité est plus difficile. Malheureusement, le Canadien l'a expérimenté trop souvent cette saison.

Avant l'affaire de dimanche matin, à laquelle Devante Smith-Pelly est aussi mêlé, le Canadien a composé avec les ennuis personnels de Zack Kassian, pourtant considéré comme un pari prometteur durant l'été. Il y a aussi eu la diffusion d'une vidéo peu flatteuse pour Nathan Beaulieu et Christian Thomas le mois dernier.

Tout cela commence à constituer une liste inquiétante. Marc Bergevin et Michel Therrien sont sûrement préoccupés. Peu importe les circonstances, leurs jeunes joueurs se retrouvent trop souvent dans des situations controversées.

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Les événements des derniers jours mettent rudement à l'épreuve le leadership de la direction. Bien sûr, un directeur général et un entraîneur-chef détestent les problèmes semblables et préfèrent mille fois commenter les ennuis du jeu de puissance ou le manque de punch en attaque. Mais réagir à des situations délicates fait partie de leur métier.

Dans le passé, Serge Savard, Jean Perron et Pat Burns ont eu à composer avec ce défi. Car si l'histoire du Canadien est remplie d'épopées légendaires, elle recèle aussi quelques épisodes moins glorieux.

Hélas, Bergevin et Therrien ont laissé les coéquipiers de Galchenyuk et Smith-Pelly répondre seuls aux questions des journalistes, mardi. Les deux patrons n'étaient pas disponibles pour s'entretenir avec les médias. Paradoxalement, ils se ainsi assurés que cette histoire alimente les conversations au moins 24 heures de plus. Ce n'était pas la meilleure idée.

Dans ce contexte, des gars comme Max Pacioretty et Brendan Gallagher se sont bien débrouillés. Impossible de ne pas être impressionné par leur sang-froid et leur patience. Mais ils n'auraient pas dû être les seuls à s'exprimer. Le rôle des supérieurs hiérarchiques est d'assumer la communication lorsque la soupe est chaude, pas de la sous-traiter à leurs employés.

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Si la tendance se poursuit, le Canadien vivra avec le danger d'une saison horribilis, pour reprendre l'expression rendue célèbre par la souveraine. Mardi, beaucoup d'observateurs ont dressé un rapprochement avec le calendrier 2008-09, marqué par les frasques des frères Kostitsyn.

Faut-il rappeler que cette saison-là, le Canadien, après s'être qualifié de justesse pour les séries éliminatoires, a été lessivé dès le premier tour en quatre matchs consécutifs par les Bruins de Boston?

Bien sûr, le pire n'est pas toujours sûr et le Canadien peut se raplomber. Compte tenu de ses récents ennuis en attaque et de ses malchances (les blessures de Brendan Gallagher et Carey Price), l'équipe peut se réjouir d'être toujours en position acceptable au classement.

Si Price revient au jeu avant longtemps, si Bergevin obtient du renfort et si tous les joueurs mettent l'épaule à la roue, tout est possible. Mais avouons que beaucoup d'éléments devront tomber en place correctement pour transformer en réussite la deuxième moitié de saison. La marge d'erreur est mince.

Un club professionnel est un organisme fragile. Un événement extérieur à la patinoire comme celui impliquant Galchenyuk et Smith-Pelly, qui force la direction à faire le point avec les joueurs avant un entraînement, n'est pas de nature à favoriser le succès. La concentration des joueurs en est affectée. Et l'histoire nourrit immanquablement les conversations au sein et autour de l'équipe.

Pour retrouver leurs marques, et oublier les ennuis des derniers jours, les joueurs du Canadien devront adopter la philosophie de Gallagher.

«On doit éliminer les distractions de sa tête et se concentrer sur ce qu'il faut faire, dit-il. Le plus bel atout en sport, c'est d'avoir une mémoire de courte durée. Les meilleurs athlètes ont cette capacité. Peu importe le résultat du match précédent, tu te prépares pour le prochain. Dans notre cas, ça signifie penser à l'affrontement de jeudi contre les Blackhawks de Chicago.»

Gallagher, malgré la période sombre du CH, garde le moral. «J'aime jouer pour le Canadien, je pense que c'est un immense honneur. À chaque matin, quand je me réveille, je me sens plutôt chanceux de faire ce que je fais dans la vie.»

Avec cette attitude, on ne s'étonnera guère que sa carrière professionnelle soit si bien engagée.

Le huard en baisse

Même si la tendance se dessine depuis plusieurs semaines, un seuil psychologique a été franchi mardi. Durant la journée, le dollar canadien a chuté sous les 70 cents US, sa plus faible valeur depuis avril 2003.

La nouvelle a des impacts majeurs dans le sport professionnel. Pour les joueurs de la LNH établis au Canada, cette chute se traduit par une augmentation de salaire significative, puisqu'ils sont rémunérés en devises américaines. À la même époque il y a trois ans, les deux monnaies étaient au pair.

En revanche, pour les dirigeants des sept équipes canadiennes du circuit, la tendance est inquiétante, d'autant plus que rien ne laisse présager un rebond à court terme. Ils paient leurs joueurs en dollars US mais touchent la majeure partie de leurs revenus en dollars canadiens.

Dans la LNH, personne ne veut revivre la situation du début des années 2000, lorsque le huard a chuté sous les 62 cents US. Cela a mis beaucoup de pression sur les organisations.

Les clubs canadiens ne sont cependant pas les seuls touchés par la baisse actuelle du huard, liée au dévissage du prix du pétrole. Toute la LNH en subit les contrecoups puisque, contrairement aux autres ligues professionnelles nord-américaines, la LNH touche beaucoup de ses revenus en devises canadiennes.

Les équipes du pays engrangent en effet d'excellentes recettes aux guichets et détiennent de lucratives ententes de télé locale. Cela augmente les «revenus hockey» de tout le circuit. Quant aux contrats nationaux de télé négociés par la LNH, la valeur de l'entente au Canada avec Rogers/TVA (12 ans et 5,2 milliards) est très largement supérieure à celle avec NBC aux États-Unis (10 ans et 2 milliards).

Au cours des dernières semaines, et ce fut de nouveau le cas à Calgary lundi, Gary Bettman a minimisé les problèmes potentiels que la LNH pourrait connaître en raison de cette baisse. Il a rappelé que notre dollar a beaucoup fluctué au fil des ans. C'est vrai. Mais il n'en reste pas moins qu'une période difficile de bonne durée se profile à l'horizon.

Autre question: quel sera l'impact de cette chute sur le processus d'expansion? À chaque baisse du dollar canadien, le coût de l'éventuel retour des Nordiques augmente. La baisse du huard rend aussi plus risquée les chances de succès d'une équipe à Québec, ce qui pourrait inquiéter certains proprios. Bref, au moment où la LNH s'apprête à trancher, cet élément n'est pas à négliger.

On peut dresser le même constat à propos du retour éventuel des Expos. Mais la situation est moins critique pour deux raisons.

D'abord, le dossier n'est pas très avancé. Le baseball majeur ne prendra sans doute pas de décision avant quelques années. Ensuite, les équipes obtiennent chacune des dizaines de millions US par année grâce au partage des revenus. Voilà pourquoi la situation actuelle est moins dommageable pour les Blue Jays de Toronto que pour les clubs canadiens de la LNH.