Richard Legendre a un truc infaillible pour savoir si des joueurs de renom seront heureux chez l'Impact: «Ils doivent quasiment être contents lorsque le mercure est à moins 20 degrés!», lance-t-il avec humour.

Dans une salle de réunion du stade Saputo, Legendre dresse l'état de l'équipe à quelques heures de l'ouverture du camp d'entraînement, qui commence ce matin. Lucide face aux défis de l'organisation, le vice-président exécutif de l'Impact affiche néanmoins beaucoup d'enthousiasme à la veille de cette quatrième saison en Major League Soccer (MLS).

«Nous sommes revenus dans le groupe d'équipes pouvant atteindre les séries éliminatoires, soutient-il. Tout le personnel technique est crinqué et super motivé. On tourne la page sur 2014. L'année qui commence est une année de grandes possibilités.»

À l'évidence, les nombreux changements apportés à la formation au cours des derniers mois offrent un contraste saisissant avec l'immobilisme ayant précédé la dernière campagne.

Cette fois, l'Impact ne s'est pas cru au-dessus de la mêlée. Et il a compris que la concurrence est impitoyable dans le sport professionnel. En ce sens, l'année 2014, poliment qualifiée «d'anomalie» par Legendre, aura surtout été un électrochoc.

La défense a été renforcée avec l'ajout du Malien Bakary Soumare et du Belge Laurent Ciman qui, s'exprimant en français, deviendront d'importants porte-parole de l'équipe. Leur apport raffermira les liens avec les partisans. En plus de soulager Patrice Bernier, qui a beaucoup donné, la saison dernière.

«Le dénominateur commun de tous nos nouveaux joueurs, c'est qu'ils veulent être à Montréal, ajoute Legendre. C'est important qu'ils aient ce préjugé favorable, qu'ils veuillent participer au rebond de l'équipe. C'est la façon de développer la bonne chimie au sein du club.»

Legendre a raison. Pour que le projet sportif de l'Impact réussisse, les joueurs doivent d'abord être fiers de porter le maillot bleu-blanc-noir. Même si le camp d'entraînement commence au moment des grands froids de l'hiver...

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L'Impact n'a pas simplement fait du surplace, la saison dernière. Il a régressé et les partisans n'ont pas été dupes.

Au stade Saputo, on a surtout vu du soccer sans inspiration, avec un entraîneur à court d'idées. Frank Klopas a néanmoins conservé son poste et amorce une deuxième saison aux commandes de la formation. Pour l'instant, l'Impact préfère la stabilité au régime de portes tournantes si profondément inscrit dans son ADN.

L'équipe devra cependant reconquérir son public. Les sièges vides ont été nombreux, durant les mois d'été, pourtant la période la plus propice aux matchs disputés à guichets fermés. La morosité a succédé à l'ambiance électrisante de 2013.

Ce constat suggère une question clé: s'agit-il d'un accident de parcours ou d'une tendance lourde?

Les prochaines semaines éclairciront la situation. À première vue, la côte à remonter est abrupte. Ainsi, le taux de renouvellement des abonnements saisonniers - il y en avait environ 8000 en 2014 - est actuellement de 60%. Ce n'est ni un succès ni une surprise. Les amateurs veulent d'abord savoir à quoi l'équipe ressemblera, cette saison, avant de s'engager.

Heureusement pour l'Impact, il reste encore plusieurs semaines avant le début des matchs à Montréal, le 28 mars prochain. Et l'organisation a prouvé dans le passé qu'elle arrivait à faire le plein de spectateurs avec la vente de billets individuels et de groupe. À condition, bien sûr, que l'équipe soit concurrentielle.

Cette manière d'engranger les revenus augmente cependant la pression sur l'organisation, qui préférerait compter sur l'assurance financière que vaut une solide base d'abonnements saisonniers. Mais les étapes devront être franchies une à la fois.

«Il faut reconnecter avec les gens, admet Legendre. On veut trouver de nouveaux partisans, mais aussi reconquérir ceux qu'on a moins vus l'an dernier. Il faut miser sur l'expérience vécue au stade Saputo, créer une ambiance qui donnera le goût aux amateurs d'arriver tôt aux matchs et de profiter du moment. À notre slogan "Tous pour gagner", j'ajouterais les mots "dans un stade plein!".»

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Pour vite recréer un buzz à Montréal, l'Impact compte sur un atout: sa participation à la ronde des quarts de finale de la Ligue des Champions CONCACAF, qui regroupe les clubs d'Amérique du Nord, d'Amérique centrale et des Caraïbes.

Le tournoi, amorcé la saison dernière, se poursuit le mois prochain. L'Impact sera au Mexique pour affronter l'équipe de Pachuca le 24 février. Le match retour aura lieu une semaine plus tard au Stade olympique.

Richard Legendre souhaite que la foule soit au rendez-vous, comme ce fut le cas en 2009: 55 000 personnes étaient venues encourager l'Impact lors d'un affrontement semblable.

L'organisation sait fort bien qu'une pareille occasion de mettre ses joueurs en valeur n'est pas fréquente. Un match important avant même le début de la saison de la MLS est un événement rare. Si Ignacio Piatti, le meilleur joueur de l'équipe, émerveillait les partisans et conduisait l'Impact à la victoire, cela marquerait une rupture nette avec la triste saison 2014.

Mais nous n'en sommes pas là. Et l'Impact a encore du temps pour dénicher un attaquant avec du flair autour de la cage adverse. Mais il n'y aura pas de coup d'éclat semblable à celui du Toronto FC, qui vient d'accorder plus de 7 millions par saison à l'Italien Sebastian Giovinco.

«Joey Saputo l'a toujours dit: notre gestion financière sera responsable, rappelle Legendre. Oui à des joueurs désignés, mais pas à n'importe quel prix.»

L'embauche d'une autre vedette serait certainement un atout pour l'Impact. Mais en cette saison charnière, le principal défi de la direction est ailleurs. Elle doit consolider et augmenter le nombre de ses partisans.

Un joueur, si doué soit-il, ne peut remplir à lui seul cette tâche. Il faudra de l'énergie, de la créativité et du travail d'équipe, sur le terrain et dans les bureaux administratifs, pour atteindre ce but.