On a beau retourner l'affaire dans sa tête mille fois, une seule conclusion s'impose: le Canadien est l'équipe la mieux équilibrée de la LNH.

Pourquoi? Parce que dans une ligue si concurrentielle, où l'écart entre les meilleurs clubs est mince comme un fil, une équipe est dans un sacré pétrin lorsque son meilleur gardien est blessé.

En séries éliminatoires, la perte de ce joueur-clé est, en théorie, un ticket vers les abîmes, là où les plus beaux espoirs d'une organisation s'évanouissent.

Carey Price a connu une saison formidable et ses prouesses ont permis à l'équipe d'atteindre la demi-finale de la Coupe Stanley. Plus vite il reviendra dans la formation, mieux ce sera. Mais en son absence, le Canadien n'a pas piqué du nez. Cela témoigne de la solidité et de la pugnacité du groupe.

À l'évidence, il existe une méthode CH qui fonctionne malgré la mise en touche de son meilleur joueur. Aux quatre coins de la LNH, cette révélation constitue une immense surprise.

Tenez, rappelez-vous les paroles de Claude Julien, l'entraîneur-chef des Bruins de Boston, après la victoire du Canadien au deuxième tour. «Une des clés de leur succès, c'est la performance de Carey Price, avait-il estimé. Il leur a donné une chance de gagner chaque match. Ses performances ont fourni beaucoup de confiance à son équipe.»

Personne n'oserait contredire Julien là-dessus. Sauf que la suite logique de ses propos ne s'est pas confirmée. Sans Price, la confiance du Canadien devait fondre comme neige au soleil. Ce ne fut pas le cas.

Résultat, le Canadien est toujours en vie. Et ce soir, au Madison Square Garden, il pourrait porter un terrible coup au moral des Rangers en forçant la présentation d'un match décisif à Montréal, samedi.

Qui l'aurait pensé, la semaine dernière, lorsque Michel Therrien a annoncé l'absence de Price jusqu'à la fin de cette série? Tenir le coup avec Dustin Tokarski, un jeune homme toujours vert devant le filet, semblait un défi irréaliste.

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Le Canadien a montré de la ténacité contre les Bruins. Sa victoire dans le septième match, au TD Garden, est un moment fort de la saison.

Mais sa performance de mardi, au Centre Bell, a été encore plus impressionnante. Parce que les joueurs ont conservé le moral même si Dustin Tokarski a connu un match ordinaire; même si les Rangers de New York ont marqué trois buts rapides pour créer l'égalité en deuxième période; même si, après la défaite cruelle en prolongation deux jours plus tôt à New York, ils semblaient au bout du rouleau.

Pour réussir tout ça, il faut du ressort. Imaginez: le Canadien a même sorti du match Henrik Lundqvist, un as parmi les as. Tout ça avec une attaque qui ne compte ni de Sidney Crosby, ni d'Anze Kopitar. Alors, comment expliquer ce succès?

D'abord, il y a P.K. Subban. Ce gars-là est le moteur du Canadien. Encore une fois mardi, il a été dominant, comme ce fut le cas depuis le début des séries éliminatoires. Subban patine comme un gagnant du trophée Norris, la distinction qu'il a reçue en 2012-2013.

Mardi, Subban a joué 29 minutes. Cela s'ajoute à ses 33 minutes du match précédent. Il est le socle du Canadien. Son calme sur la patinoire, ses passes précises, sa fougue et ses tirs foudroyants sont inspirants. On n'a pas vu un joueur comme lui à Montréal depuis les beaux jours de Guy Lafleur.

Il faut aussi écouter les commentaires de Subban pour comprendre à quel point il est devenu un leader de l'équipe. C'est lui qui donne le pouls, c'est lui, le porte-parole. Et il possède cette formidable capacité de garder confiance malgré un revers crève-coeur.

Ainsi, après la pénible défaite en prolongation dimanche, Subban n'était pas abattu. «Non, ce n'est pas frustrant, a-t-il dit. En séries, il faut avoir la mémoire courte. Tu mets les choses derrière toi et tu penses à la prochaine rencontre.»

Une heure plus tard, sur son compte Twitter, Subban lançait un appel au ralliement des fans en rappelant un concept simple: «Un match à la fois».

Et puis, il y a Brendan Gallagher, une bougie d'allumage. L'autre jour, à New York, des collègues l'ont interrogé sur sa carrière. Il a raconté avoir eu, dès l'âge de 10 ans, la conviction d'atteindre un jour la LNH. Au retour d'un tournoi, des amis lui en avaient fait la prédiction. «L'idée ne m'a jamais quitté par la suite...»

Le jour du repêchage, en 2010, Gallagher mangeait un grilled cheese lorsqu'il a appris qu'il avait été choisi par le Canadien. «Ma mère l'a annoncé à tout le voisinage!»

Gallagher, malgré sa jeunesse, est d'une étonnante maturité. «On est incroyablement chanceux de jouer au hockey...»

Enfin, la relation entre les jeunes de l'équipe (Gallagher, Galchenyuk, Eller...) et les vétérans (Gorges, Gionta, Plekanec...) est excellente. C'est cela, la «chimie» d'une équipe. Cet esprit de camaraderie n'est pas toujours facile à développer.

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Michel Therrien mentionne souvent «l'attitude» comme clé du succès de son équipe. Il a entièrement raison. Pour lutter avant autant d'abandon en l'absence de Carey Price et sans l'apport espéré de Thomas Vanek, il faut avoir foi en ses moyens.

Résultat, ce soir, au Madison Square Garden, la pression sera sur Henrik Lundqvist et les Rangers. Ce sera à eux de ne pas rater cette chance unique de se qualifier, devant leurs partisans, pour la finale de la Coupe Stanley.

Mais pour cela, les Rangers devront vaincre la méthode CH, basée sur la solidarité. Sans cet atout, le Canadien n'aurait pas comblé l'absence de Price. Rester debout après avoir reçu un tel coup de massue démontre beaucoup de fortitude.

Pour le bien du Canadien, souhaitons que Price revienne au plus vite. Car on ignore si Tokarski a encore beaucoup de miracles en réserve. Il n'empêche qu'en l'absence de son grand numéro 31, en demi-finale de la Coupe Stanley par-dessus le marché, le Canadien a montré du nerf.

Avantage de la glace

Imaginons que les joueurs de Michel Therrien éliminent les Rangers. Et qu'ils affrontent les Kings de Los Angeles en finale de la Coupe Stanley. Vous savez quoi? Le CH profiterait de l'avantage de la glace. Et le premier match serait disputé au Centre Bell mercredi prochain.

Le Canadien et les Kings ont une fiche identique cette saison. Pour briser cette égalité, la LNH a recours au nombre de victoires obtenues en temps réglementaire et en prolongation (les gains en tirs de barrage sont exclus). Le Canadien en a obtenu 40 et les Kings, 38.