À Sotchi, le Canada a remporté une médaille de moins qu'aux Jeux de Vancouver, en 2010. C'est la première fois depuis Lake Placid, en 1980, que le pays n'améliore pas sa récolte.

Faut-il y voir un signe inquiétant? Non, même si l'ajout de 12 nouvelles épreuves a augmenté de 36 les médailles à l'enjeu. D'autres pays ont connu des reculs plus importants. C'est le cas de l'Allemagne (-11) et des États-Unis (-9). En revanche, la Russie (+18) et les Pays-Bas (+16) ont beaucoup progressé.

À Vancouver, le Canada a terminé à 11 médailles du sommet. À Sotchi, l'écart avec les meneurs est tombé à huit.

«La compétition n'a jamais été aussi féroce, dit Marcel Aubut. Notre objectif était de lutter pour la première place au classement des médailles et nous terminons dans le groupe de tête.»

En fait, le but du Canada était de gagner ces Jeux. Aubut, président du Comité olympique canadien (COC), avait été très clair à ce sujet en décembre dernier. Mais il s'agissait d'un défi un peu fou.

Avant le début des compétitions, le chef de mission Steve Podborski a d'ailleurs diminué les attentes, déclarant que le Canada dominerait un jour le tableau des médailles, mais sans doute pas cette année.

Pour demeurer parmi les meilleurs, le Canada devra poursuivre ses investissements dans le sport d'élite. Parce que l'opposition vient de partout. Le cas du patinage de vitesse sur courte piste en constitue un excellent exemple.

Nos patineurs s'attendaient à faire le plein de médailles à Sotchi. Ce ne fut pas le cas. La malchance explique en partie cette déception. Mais l'émergence d'autres pays a aussi modifié la donne.

Ainsi, l'équipe italienne, dirigée par le Québécois Éric Bédard, est montée trois fois sur le podium, une performance inattendue.

Les patineurs italiens ont profité du soutien technique de l'écurie Ferrari. Voilà le signe qu'aux quatre coins du monde, des initiatives originales sont lancées pour soutenir les athlètes d'élite.

«Les autres pays investissent plus que jamais, ajoute Aubut. Nous devons faire la même chose. C'est la seule façon de rester au sommet.»

À ce chapitre, une mesure du dernier budget fédéral a constitué une bonne nouvelle. Le gouvernement a intégré à son cadre fiscal une subvention annuelle de 11 millions pour les sports d'hiver. Cela a pour effet de la rendre permanente. Puisque le programme venait à échéance l'an prochain, l'incertitude sur son renouvellement est levée.

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En dressant le bilan des Jeux, Aubut a réitéré un de ses rêves: intéresser une ville canadienne à soumettre sa candidature pour les Jeux d'hiver ou d'été.

«J'aimerais mettre la machine en marche avant la fin de mon mandat au COC, dit-il. Mais il faut qu'un maire dise oui. Régis Labeaume n'est pas prêt pour l'instant. Mais je sais qu'au fond de son coeur, il le sera un jour.»

Aubut a-t-il raison? J'en doute. Le maire de Québec a été tenté un moment par l'aventure olympique, mais cela ne fait plus partie de ses plans. La construction du nouvel amphithéâtre et l'espoir d'attirer une équipe de la LNH sont déjà des projets majeurs pour la capitale.

La possibilité de voir Toronto tenter sa chance pour les Jeux d'été intrigue aussi Aubut. Mais compte tenu de la situation à la mairie de cette ville, le dossier ne progressera pas à court terme.

Quant à Montréal, le maire Denis Coderre n'est pas intéressé aux Jeux olympiques, peu importe qu'il s'agisse de ceux d'été ou d'hiver. Il espère plutôt convaincre la Fédération internationale de football de présenter un jour la Coupe du monde au Canada, avec des matchs à Montréal. Le rêve me semble peu réaliste.

Cela dit, si le maire Labeaume change un jour d'idée, l'absence d'une montagne pour accueillir la descente de ski alpin ne constituerait pas un handicap majeur. Des habitués des coulisses du Comité international olympique (CIO), comme le Québécois Walter Sieber, ont toujours cru possible de présenter un certain nombre d'épreuves ailleurs.

Aubut ajoute: «Jacques Rogge, l'ancien président du CIO, m'a déjà dit que si le mouvement olympique a le goût d'aller dans une ville, tout se négocie. Parce qu'aucun endroit n'est parfait.»

La facture de 51 milliards des Jeux de Sotchi, comme je l'expliquais dimanche dans ma chronique de La Presse+, fait cependant très mal au mouvement olympique.

Pas étonnant que les citoyens de Davos/Saint-Moritz et de Munich aient repoussé par référendum l'idée que leur ville soit candidate aux Jeux d'hiver de 2022. Pas sûr que les citoyens de Québec ou de Toronto penseraient différemment.

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Les bobeuses Kaillie Humphries et Heather Moyse, qui ont défendu avec succès leur médaille d'or des Jeux de Vancouver, ont porté le drapeau du Canada à la cérémonie de clôture.

Les deux filles étaient très fières de leur sélection. Malgré tout, je ne crois pas que leur exploit ait eu le même retentissement au Canada que la conquête de la médaille d'or par l'équipe de hockey féminin.

C'était d'ailleurs intéressant d'entendre France St-Louis, la chef de mission adjointe, expliquer dimanche à quel point ce match contre les États-Unis avait fait vibrer le pays tout entier. Elle a rappelé que plus de 13 millions de Canadiens l'ont regardé en tout ou en partie.

«Ce fut une rencontre historique, a-t-elle dit. C'est un scénario digne d'Hollywood et tout le Canada a été interpellé par cette médaille d'or.»

Les bobeuses méritent leur honneur. Mais Marie-Philip Poulin, qui a permis aux Canadiennes de remporter ce match, aurait aussi constitué un excellent choix.