Il y a eu l'affaire George Parros. Il y a eu les coups vicieux assenés par Patrick Kaleta, Cody McLeod et plusieurs autres.

Il y a eu la dégoûtante attaque du gardien des Flyers Ray Emery sur son vis-à-vis des Capitals, Braden Holtby.

Tous ces incidents dangereux et absurdes, en plus de ternir l'image de la Ligue nationale, ont provoqué blessures ou commotions cérébrales. Les directeurs généraux des 30 équipes, réunis cette semaine à Toronto, auraient dû discuter en priorité des manières de stopper ces comportements délinquants.

Mais non!

À les entendre, le plus grave problème dont souffre la LNH, celui qui domine tous les autres et nécessite une réflexion urgente, est le trop grand nombre de matchs nécessitant des tirs de barrage.

Il faut se pincer pour le croire. Les tirs de barrage, un extraordinaire moment de tension à la fin d'un match, dont les amateurs raffolent! Franchement...

Hélas, il ne faut pas s'en étonner. Le grand patron de la LNH, Gary Bettman, avait préparé le terrain avant la rencontre des DG. Dans des propos tenus lundi et rapportés par La Presse Canadienne, il s'est assuré que les dirigeants d'équipes demeurent dans le droit chemin, celui du conformisme et du passéisme.

En clair, Bettman estime qu'on parle trop des bagarres: «Je crois que parfois un incident, aussi rare soit-il, peut attirer l'attention de manière disproportionnée».

Après pareille mise en garde, les DG auraient été mal venus de consacrer le coeur de leurs discussions aux enjeux liés à la violence, qui est devenue un point comme les autres à l'ordre du jour. Et ils ont beaucoup parlé des tirs de barrage et de prolongation.

Voilà un sujet d'ordre purement sportif, sans conséquences éthiques ou juridiques, qui n'intéressera ni les associations de médecins, ni les spécialistes des commotions cérébrales, ni les politiciens (sauf peut-être Denis Coderre). Bref, voilà un sujet au goût du commissaire.

«Nous ne serions probablement pas en train d'avoir cette discussion sur les bagarres s'il n'y avait pas eu cet incident bizarre avec George Parros qui perd son équilibre et tombe», a dit le commissaire.

Cette analyse, commode lorsqu'on refuse de regarder les problèmes en face, est maintenant la position officielle de la LNH. À Montréal, elle a déjà été défendue par Geoff Molson et Michel Therrien. L'affaire Parros n'est qu'un malheureux coup du sort, croient-ils, et non pas la démonstration que ces bagarres abjectes font mal au hockey.

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J'aurais souhaité entendre un discours plus progressiste de Bettman. Ses déclarations sont néanmoins intéressantes parce qu'elles lèvent le voile sur le fond de sa pensée.

Dans le passé, Bettman a souvent expliqué que le jeu émotif et la nécessité d'une soupape pour évacuer un surplus d'agressivité expliquaient les bagarres. Il a aussi répété que le hockey était un sport en évolution et qu'il gardait l'oeil ouvert sur ce dossier.

Cette fois, Bettman est allé plus loin. On sait maintenant qu'il voit un côté positif aux combats. Évoquant les coups de poing récemment échangés par Vincent Lecavalier et Jarome Iginla, il a dit: «Je préfère qu'ils se battent plutôt que se donner des coups de bâton.»

Comme si l'abolition des combats allait inévitablement conduire à une recrudescence des coups de hockey! Si les uns comme les autres sont sanctionnés par des suspensions significatives, et que les arbitres appliquent les règlements avec la même rigueur qu'au football, ces deux fléaux du hockey diminueront sensiblement.

Ironiquement, Bettman en a lui-même donné la preuve en racontant une anecdote à propos de Ray Emery. Lors d'un récent entretien, il lui a demandé: «Si, de façon hypothétique, un règlement stipulait qu'un gardien traversant la ligne rouge pour s'en prendre à un autre gardien écopait d'une suspension de 10 matchs, l'aurais-tu fait?» Réponse d'Emery: «Quoi? Es-tu malade?»

C'est bien la preuve que des sanctions dures auraient un immense impact sur le comportement des joueurs. Encore faudrait-il avoir le courage de les imposer. Encore faudrait-il que l'Association des joueurs, toujours plus prompte à défendre les intérêts des coupables plutôt que des victimes, accepte de collaborer.

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Une équipe de chercheurs de l'Université d'Ottawa, guidée par le professeur Blaine Hoshizak, a démontré une vérité simple: les combats sont dangereux pour la santé des joueurs.

Un des motifs: les bagarreurs ont amélioré leur technique. Cette spécialisation leur permet de faire encore plus mal à leur rival et, conséquemment, d'augmenter le risque de choc au cerveau.

Bref, en justifiant les bagarres, Bettman affaiblit la crédibilité de la LNH, qui soutient lutter agressivement contre les commotions cérébrales.

Si les DG montrent un peu de sens commun, ils proposeront à tout le moins une solution pour éviter des incidents à la Ray Emery, durant leur réunion de mars prochain. Il s'agirait d'un pas dans la bonne direction. Mais gardons nos attentes modestes.

Quelle curieuse ligue, tout de même, plus encline à réduire la fréquence des tirs de barrage que celle des bagarres.

Le retour de Pat LaFontaine

Il est trop tôt pour savoir si Pat LaFontaine redonnera du tonus aux Sabres de Buffalo. Mais son retour au sein de l'organisation donne espoir à leurs partisans. S'il s'entoure bien, il connaîtra du succès.

LaFontaine devrait enrichir la discussion à propos des commotions cérébrales. Il en connaît les dangers, puisqu'elles ont mis fin à sa carrière. À ce chapitre, la LNH a besoin d'agents de changement. Si LaFontaine tient ce rôle, ce sera une excellente nouvelle.