Qu'on se le dise, Eugène Lapierre n'est pas candidat au poste de président de Tennis Canada, laissé vacant par le départ de Michael Downey. «Ma valeur est ici», explique le directeur de la manche montréalaise de la Coupe Rogers.

La saison qui s'achève a été remarquable pour le tennis canadien. «La meilleure de notre histoire, estime Lapierre. Si tu m'avais dit il y a 10 ans qu'on atteindrait la demi-finale de la Coupe Davis, j'aurais eu peine à le croire...»

Cette performance, couplée aux succès individuels de Milos Raonic, Vasek Pospisil et Eugenie Bouchard, a été remarquée sur la scène internationale. Résultat, la Lawn Tennis Association, l'équivalent de Tennis Canada en Angleterre, a embauché Michael Downey comme grand patron.

Selon les médias londoniens, Downey sera payé 300 000 livres (environ 500 000 $ CAN), en plus d'être admissible à un boni de 30 pour cent. Il occupera son nouveau poste dès le 6 janvier prochain.

Ancien des Raptors de Toronto et des brasseries Molson, Downey rejoint d'autres Canadiens occupant des postes prestigieux à Londres après avoir bâti leur crédibilité ici: Normand Boivin (aéroport de Heathrow), Moya Greene (Royal Mail) et Mark Carney (Banque d'Angleterre).

Downey a été au coeur des récents succès de Tennis Canada. Son départ laissera un vide. En août dernier, j'ai discuté avec lui durant la Coupe Rogers. Sa vision claire du développement du sport m'a impressionné.

«On est dans une business de résultats. Essayer fort ne suffit pas...», m'avait-il dit, ajoutant que même si Tennis Canada était un organisme sans but lucratif, il devait être géré comme une business.

Downey a appuyé le développement du Centre national d'entraînement de Montréal. Il a repensé les stratégies et les structures de Tennis Canada, en plus de se montrer très habile dans la collecte de fonds. La personne qui lui succédera devra être aussi efficace sur ce plan.

«Aller chercher les gros sous et m'occuper de politique, ce n'est pas vraiment mon profil», ajoute Lapierre, qui souhaite plutôt travailler à la hausse de la participation chez les jeunes. «On n'a pas assez de joueurs qui font de la compétition sérieuse.»

Peu importe le successeur de Downey, il faudra s'assurer que Montréal demeure un pôle majeur du tennis canadien.

«À l'époque où j'ai commencé avec Richard Legendre, on était une poignée d'employés, ajoute Lapierre. Aujourd'hui, une centaine de personnes travaillent à Tennis Canada, 50 à Toronto et 50 à Montréal. On a tiré la couverte sur notre bord. Je veux continuer sur cette lancée.»

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Bon, reprenons les faits, juste pour s'assurer de bien comprendre.

Patrick Kaleta, des Sabres, est suspendu pour dix matchs en raison d'une mise en échec à la tête de Jack Johnson, des Blue Jackets. Les images sont éloquentes: le coup est terrible, la tête, clairement visée.

Il s'agit d'un geste dangereux de la part d'un récidiviste. Comme le note Brendan Shanahan dans sa vidéo explicative, Kaleta a été sanctionné six fois au cours des quatre dernières saisons (trois amendes et trois suspensions).

L'Association des joueurs (AJLNH), au nom de Kaleta, annonce ensuite qu'elle portera cette décision en appel. Jusque-là, tout va bien. Ce droit est une mesure essentielle dans l'administration de la justice, même celle du sport professionnel.

Mais qui entendra l'appel? Je vous le donne en mille: Gary Bettman! En vertu de la convention collective, le commissaire est celui qui tranche. Avouons qu'il s'agit d'une proximité troublante.

Bettman est le patron de Shanahan. S'il allège la suspension, il minera la crédibilité de son préfet de discipline. Et enverra un signal clair que la LNH refuse de lutter sérieusement contre les coups à la tête.

En revanche, s'il la maintient, l'AJLNH et Kaleta auront le droit de s'interroger sur la neutralité du commissaire. La nouvelle convention collective leur permettra néanmoins d'interjeter appel de nouveau, cette fois devant un arbitre indépendant.

Les commissaires des ligues professionnelles aiment s'arroger un maximum de pouvoirs. Mais cet appétit sans fin ne les sert pas toujours. Bettman n'a pas à s'immiscer dans ce processus. Dommage que les joueurs aient consenti à cette mesure. L'appel devrait automatiquement avoir lieu devant une tierce partie.

Remarquez qu'on a vu encore plus troublant en 2012. Bettman a alors réduit de 25 à 21 matchs une suspension à Raffi Torres, des Coyotes de Phoenix, au moment où la LNH était propriétaire de cette équipe.

La LNH n'est pas le seul circuit aux procédures bizarres. Dans la NFL, Roger Goodell a déjà entendu des appels de décisions rendues... par lui-même! Ce fut le cas dans le scandale des primes contre blessures, mettant en cause les Saints de La Nouvelle-Orléans.

Cela dit, je crois que la suspension de Kaleta aurait dû être encore plus longue. Mais dans l'état actuel des choses, où la LNH est très permissive concernant les coups à la tête, Shanahan a frappé aussi fort qu'il le pouvait. C'est tant mieux.

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Regardez-vous les demi-finales du baseball majeur? Du grand spectacle... opposant quatre équipes très riches.

Les Dodgers (216 millions), les Red Sox (151 millions), les Tigers (148 millions) et les Cards (115 millions) occupent les 2e, 4e, 5e et 11e rangs au classement des masses salariales.

Plusieurs équipes dépensant 80 millions ou moins, comme Tampa Bay, Pittsburgh et Oakland, ont participé aux séries. Mais elles sont déjà éliminées.

Conclusion: les organisations à budget modeste se débrouillent souvent bien, mais se rendre jusqu'au bout leur est très difficile.

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En terminant, un mot pour rappeler que l'Union cycliste internationale (UCI) a un nouveau président. Dans une élection tenue à Florence le mois dernier, Pat McQuaid, cet ineffable personnage qui tentait de nous assurer de son sérieux dans la lutte au dopage, a reçu son congé.

Le successeur de McQuaid est un Britannique, Brian Cookson. Il veut «rétablir la réputation» de l'UCI et a repris contact avec l'Agence mondiale antidopage.

Travis Tygardt, le grand patron de l'organisme américain ayant coincé Lance Armstrong, a salué ce changement. Il a rappelé que l'ancienne administration de l'UCI «avait tenté de nuire» à son enquête. «Et lorsque notre rapport a été dévoilé, elle n'a entrepris aucune action pour nettoyer le sport», a-t-il ajouté.

Une nouvelle ère pour le cyclisme? On verra bien. Mais l'avenir est plus prometteur.