Sur toute la ligne, ce lock-out aura été néfaste pour le Canadien.

Sur le plan des relations publiques, il a stoppé net et sec le vent de fraîcheur provoqué par l'embauche de Marc Bergevin. La fébrilité du printemps dernier, lorsque le visage de l'équipe a été transformé, a disparu.

Sur le plan du hockey, la nouvelle convention collective est conçue pour protéger les intérêts des équipes à bas revenus. La baisse du plafond salarial n'est pas un atout pour le Canadien, une organisation en mesure de dépenser.

Ce n'est pas tout: le calendrier écourté diminue les chances de l'équipe d'atteindre son objectif, une participation aux séries éliminatoires.

Dans ce sprint de 48 matchs, les organisations ayant subi le moins de changements seront avantagées. Michel Therrien aurait besoin de temps pour implanter son système de jeu. Les circonstances le priveront de ce luxe.

Bref, c'est peut-être à tout cela que pensait Geoff Molson lorsqu'il a commenté la fin du lock-out, hier.

«Le commissaire représente 30 équipes, a-t-il rappelé. Elles évoluent dans des marchés de taille différente et n'ont pas toutes les mêmes priorités. Ce n'est pas facile de satisfaire complètement tout le monde.»

Malgré tout, Geoff Molson estime que Bettman s'est bien débrouillé dans les circonstances.

Le règlement intervenu dimanche a soulagé le président du Canadien. Il souhaitait depuis longtemps un accord. Personne ne sera plus heureux que lui de revoir les joueurs sur la patinoire.

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De cette rentrée publique des dirigeants de l'équipe, je retiens d'abord l'énergie et le sourire de Michel Therrien.

«J'ai vu quelques joueurs ce matin et ils étaient tellement excités, a-t-il dit. Une équipe de hockey, c'est une famille. Et la famille était un peu séparée depuis quelque temps. C'est encourageant de la voir se réunir.»

Therrien croit fermement aux chances du Canadien de participer aux séries, première étape de la relance de l'équipe.

Lorsque je lui ai rappelé que le court calendrier ne favoriserait pas son équipe, il a répliqué d'un seul trait: «Dans un contexte comme celui-là, le gardien de but compte pour beaucoup. Et on en a un bon!»

L'entraîneur du Canadien est plein d'optimisme. L'ambiance autour de l'équipe, si lourde la saison dernière, s'annonce plus sereine. Le changement sera bienvenu.

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La nomination de Marc Bergevin en mai dernier a amorcé la reconstruction du Canadien.

Mais ce n'est pas seulement sur le plan du hockey que l'organisation pourrait changer au cours des prochaines années. Geoff Molson devrait aussi occuper, peu à peu, un rôle plus important au sein de la LNH.

À l'évidence, l'influence de l'équipe a diminué au cours des dernières années. Les départs de George Gillett et Bob Gainey, qui comptaient parmi les décideurs du circuit, ont provoqué cette situation.

Aux commandes de l'équipe depuis trois ans, Geoff Molson a ironiquement profité du lock-out pour mieux comprendre le fonctionnement de la LNH, un environnement où la qualité des liens personnels joue un rôle décisif.

«Je connais beaucoup mieux les autres propriétaires, dit-il. Le Canadien représente une équipe très importante pour la LNH et les gens le reconnaissent.»

En matière de revenus, de cotes d'écoute à la télévision et de popularité dans son marché, le Canadien compte parmi les premiers de classe du circuit. Son modèle d'affaires et sa réussite financière en font une organisation modèle malgré ses insuccès sur la glace.

En revanche, ces atouts ne sont pas suffisants pour influencer la prise de décision. Les pourparlers en vue de renouveler la convention collective l'ont clairement démontré.

Ainsi, lorsque Gary Bettman a réuni un groupe de propriétaires pour négocier avec les joueurs en décembre dernier, Geoff Molson n'a pas été invité. Ses collègues des Maple Leafs de Toronto et des Penguins de Pittsburgh ont plutôt représenté les formations riches.

Le président du Canadien n'est pas davantage membre du comité exécutif de la LNH, ce petit groupe de propriétaires qui entourent le commissaire.

En mars 2011, dans la foulée de l'affaire Chara-Pacioretty, Geoff Molson avait dénoncé la décision de la LNH de blanchir le défenseur des Bruins de Boston. Cette sortie très vive a-t-elle miné sa relation avec Bettman?

«Pas du tout, répond-il. Gary savait que j'écrirais cette lettre aux partisans. Et je crois qu'elle a eu un gros impact. Des décisions ont été prises pour contrer les coups à la tête et renforcer les sanctions disciplinaires.

«Cela dit, à l'époque, je n'ai pas été le seul à donner mon avis là-dessus. Les Penguins de Pittsburgh, entre autres, ont aussi dénoncé ces coups.»

Geoff Molson ajoute que la recherche d'une influence prépondérante au sein de la LNH ne compte pas parmi ses premiers objectifs. Il laissera le temps au temps.

Pour l'instant, il se satisfait de savoir que le Canadien représente une composante essentielle de la LNH. Et il estime avoir transmis sans détour son point de vue durant les récentes négociations.

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Beaucoup de travail attend la direction du Canadien au cours des prochains jours. Bien comprendre la nouvelle convention collective compte parmi les tâches prioritaires.

Il faudra aussi reconquérir le coeur des partisans. Et pour cela, rien ne vaut les victoires.

Geoff Molson aura un oeil sur le classement, mais aussi sur les cotes d'écoute des matchs à la télévision. Elles fourniront en effet le meilleur indicateur sur les conséquences réelles du lock-out.