Mesdames et messieurs, voici maintenant les trois étoiles du match d'hier disputé à Toronto entre la Ligue nationale de hockey et l'Association des joueurs.

La première étoile, Gary Bettman!

Gary Bettman, sans l'ombre d'un doute, est le héros du jour. Il lui a fallu à peine une heure pour rejeter non pas une, ni deux, mais trois offres des joueurs afin de mettre fin au lock-out! Du travail expéditif comme on n'en voit pas souvent en relations de travail.

Avant de filer vers l'aéroport pour rentrer à New York, Bettman a offert une performance remarquable en conférence de presse. Un peu plus et il versait une larme en expliquant à quel point les contre-propositions des joueurs étaient inadéquates.

Le commissaire a répété tous les clichés de circonstance. Mais il l'a fait avec conviction. Non, a-t-il assuré, la LNH ne peut offrir aux joueurs une meilleure entente que celle déposée mardi. C'est im-pos-si-ble.

«Certaines équipes estiment même qu'on est allé trop loin pour sauver la saison», a-t-il ajouté. Bettman s'est ainsi drapé dans le rôle du gestionnaire raisonnable, capable de tenir tête aux propriétaires les plus butés. Le culot ne lui a jamais manqué.

Bettman mérite aussi une mention pour l'ensemble de sa stratégie depuis mardi. Pour la première fois, il a placé les joueurs sur la défensive. L'idée de partager les revenus à parts égales est, à première vue, un concept attrayant et équitable, susceptible d'emporter l'adhésion des amateurs.

Mais Bettman sait fort bien que cette solution est inacceptable pour les joueurs. La LNH touche des revenus records depuis deux ans. Pourquoi accepteraient-ils une baisse salariale? Pourquoi se résoudraient-ils à une diminution de leurs droits?

En quittant en coup de vent la table de négociations hier, Bettman a démontré ne pas être prêt à échanger sérieusement avec les joueurs.

La LNH souhaite toujours imposer sa solution, comme en 2004-2005. Et Bettman ne veut pas obtenir moins que David Stern, le commissaire de l'Association nationale de basketball (NBA), à l'issue du conflit qui a secoué ce circuit l'an dernier.

Stern est le mentor de Bettman. Et dans la NBA, les joueurs ont vu leur part de revenus chuter de 57 à 50%.

Bettman joue dur. Il fait aussi du théâtre devant les caméras. Et il croit manifestement en ses chances de briser le moral des joueurs.

Vous savez quoi? Il réussira peut-être.

La deuxième étoile, Donald Fehr!

C'est un recul pour Donald Fehr, mon gagnant de la Coupe Molson pour le mois de septembre...

Au fond de lui-même, Fehr ne croyait sans doute pas que Bettman mettrait fin aussi vite aux pourparlers d'hier. Il a sûrement eu quelques explications à fournir à la vingtaine de joueurs présents autour de la table de négociations.

Imaginez un peu leur réaction lorsque Bettman s'est levé, a bouclé son porte-document et quitté la pièce. Les joueurs croyaient dur comme fer que leurs pistes de solution feraient réfléchir les propriétaires. Ils ont été quittes pour une grosse déception.

Les trois contre-offres soumises par Donald Fehr sont logiques. Mais en présentant autant de scénarios, ce qui devient d'ailleurs une habitude chez lui, il complique sa cause. Sous prétexte d'offrir différentes pistes aux propriétaires, l'Association des joueurs semble incapable d'articuler une seule position forte.

Les propriétaires, eux, proposent un concept simple, celui du 50-50. Oui, les modalités d'application sont tordues. Mais sur le plan de l'image, ils ont le mérite de défendre une idée claire.

Pourquoi les joueurs n'ont-ils pas simplement misé sur leur troisième scénario, c'est-à-dire un passage immédiat au partage 50-50, pourvu que les contrats déjà signés soient respectés à leur pleine valeur?

Avec cette idée, les joueurs placent les propriétaires devant leurs propres contradictions. La plus importante: plaider les difficultés financières après avoir consenti des centaines de millions en contrats peu avant le déclenchement du lock-out. C'est pourtant l'approche que les joueurs ont le moins développée.

Fehr mérite néanmoins la deuxième étoile pour son exposé en conférence de presse. Son tour d'horizon des sept dernières années a été bien réussi. La pédagogie est un de ses atouts.

Fehr a soulevé un enjeu essentiel en rappelant que la LNH demeurait incapable d'expliquer pourquoi elle exigeait des concessions de 1,4 milliard des joueurs en six ans.

Avec cette performance, Fehr a sûrement réussi à rallier son groupe. Mais il devra multiplier les efforts pour préserver cette unité.

La troisième étoile, Twitter!

À l'été 2011, les pourparlers dans la Ligue nationale de football ont parfois été surnommés les «négociations Twitter». Le même phénomène se répète cet automne dans la LNH.

Les négociations profitent d'une énorme caisse de résonance sur ce réseau social. Les déclarations des leaders des deux groupes, dirigeants et joueurs, sont immédiatement transmises et analysées.

Plusieurs analystes débattent en direct des offres et les fans donnent leur point de vue. La journée d'hier a été très fertile à ce propos.

Voilà une différence concrète entre les négociations de cet automne et celles tenues en 2004-2005. Chaque partie doit se montrer alerte. La bataille de l'opinion publique est une composante essentielle de ces négos. Et celle-ci se joue en partie sur le web.

Depuis le déclenchement du lock-out, les joueurs ont profité de l'appui populaire. Mais même si leur position est moins solide, Bettman et la LNH effectuent un retour en force.