Mine de rien, la pression s'accentue sur la LNH et l'Association des joueurs afin de trouver un règlement pour mettre fin au lock-out.

La semaine dernière, la société CBC/Radio-Canada s'est inquiétée de l'impact du conflit sur ses revenus publicitaires. La diffusion des matchs constitue une source de profits fiable pour le réseau anglais, surtout en séries éliminatoires.

Dans l'ensemble de ses activités, le diffuseur public prévoit un manque à gagner de 200 millions au cours des trois prochaines années. Chaque dollar compte et l'absence du hockey compliquera l'atteinte de l'équilibre budgétaire.

Puis hier, on apprenait que les cotes d'écoute de NBC Sports Network, le partenaire national de la LNH aux États-Unis, sont catastrophiques. Depuis la fin des Jeux olympiques, les auditoires sont minuscules. Un exemple: à la fin du mois d'août, un match de la Major League Soccer n'a attiré que 40 000 téléspectateurs.

Selon le Sports Business Journal, qui dévoile cette nouvelle dans son numéro de cette semaine, NBC Sports Network souffrira de l'annulation des matchs réguliers de la LNH. Le réseau sera incapable de bâtir une grille horaire attrayante parce qu'elle ne compte pas assez de contenu de qualité dans les autres sports.

Voici donc deux partenaires majeurs de la LNH qui craignent les répercussions d'un conflit prolongé. NBC Sports Network verse près de 190 millions par année pour les droits des matchs; CBC/Radio-Canada paie près de 100 millions.

Bien sûr, le conflit leur vaudra d'économiser ces paiements, ainsi que les coûts de production. Mais leur association avec la LNH leur permet aussi d'améliorer leur positionnement et de joindre un public prisé des annonceurs. Leur investissement ne se résume donc pas à la seule recherche de profits.

À court terme, NBC Sports Network souffrira davantage que CBC/Radio-Canada, qui ne présente qu'un seul match par semaine en saison régulière. L'impact sur les profits de la société d'État n'est sûrement pas majeur. En revanche, l'annulation éventuelle des séries éliminatoires serait plus dommageable.

Pendant que les réseaux de télévision s'inquiètent de l'absence du hockey, deux membres du Sénat américain, Robert Menendez et Frank Lautenberg, ont fait part de leurs inquiétudes à Gary Bettman et Donald Fehr.

Les deux démocrates du New Jersey évoquent les impacts négatifs du lock-out sur l'économie de Newark, la ville où les Devils sont établis.

Dans une lettre transmise hier, ils rappellent que le Congrès américain détient l'autorité sur le commerce entre les États et qu'ils surveilleront de près les négociations.

Voilà un avertissement que la LNH et les joueurs ne peuvent ignorer. Les ligues professionnelles de sport détestent que les politiciens s'intéressent à leurs affaires... sauf pour financer de nouveaux stades et amphithéâtres.

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Le ton de Gary Bettman était triomphant lorsqu'il a annoncé la conclusion d'une entente avec NBC Sports Network à l'automne 2011. Il a souligné à quel point le réseau mettrait en valeur les matchs grâce à une production de haute qualité.

On peut croire que NBC n'apprécie guère la situation actuelle, pas plus que CBC/Radio Canada. La LNH confirmera cette semaine l'annulation des premiers matchs du calendrier régulier. Même si l'annonce ne surprendra personne, il s'agira d'une étape majeure dans le conflit.

Les pourparlers du week-end dernier à New York n'auront rassuré aucun des partenaires majeurs de la LNH. Sans parler de poudre aux yeux, admettons que cet exercice n'a pas fait progresser le dossier sur l'enjeu essentiel.

Cet enjeu, évidemment, c'est le partage de la tarte de 3,3 milliards de revenus.

On retrouve ensuite une deuxième catégorie de points chauds: durée des contrats, nombre de saisons requises pour atteindre l'autonomie complète, arbitrage salarial et bonis d'engagement.

Enfin, des sujets comme la couverture médicale et les tests antidopage occupent le bas de l'échelle. C'est essentiellement de cela que les parties ont parlé ce week-end. Elles ont aussi discuté de la définition des revenus liés au hockey, mais pas de leur partage.

En fait, les discussions ont été si peu importantes que Gary Bettman et Donald Fehr n'étaient pas à la table de négociations dimanche! Leur absence envoie malheureusement un message clair aux amateurs: une guerre d'usure est enclenchée et personne n'est sur le point de céder. Le conflit s'annonce long.

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On entend beaucoup un argument ces jours-ci: lorsque les joueurs rateront leurs premiers chèques de paie, leur solidarité sera mise à rude épreuve. Je n'en suis pas si convaincu.

D'abord, ils recevront le 15 octobre une somme représentant environ 9% de leur salaire de l'an dernier. Cette somme a été mise en fiducie en attendant que les revenus de la LNH en 2011-2012 soient vérifiés. Cette mesure assure qu'ils touchent véritablement leur part de 57% prévue à la convention collective aujourd'hui expirée.

«Ça fait un bon coussin, dit Mathieu Darche. Ça change la donne par rapport à 2004.»

Plus important encore, les joueurs sont convaincus que les propriétaires ne jouent pas franc jeu avec eux. Ceux-ci ont obtenu le système qu'ils souhaitaient en 2004, mais exigent encore davantage.

«En 2004, nous avons accepté une baisse de salaire importante pour aider la ligue, rappelle Darche. Aujourd'hui, au moment où les revenus atteignent un niveau record, les propriétaires font encore des demandes.»

Il est aussi évident que le conflit se personnalise. La crédibilité de Gary Bettman auprès des joueurs est en chute libre. Et leur confiance en Donald Fehr ne fait aucun doute.

Peut-on sauver la saison 2011-2012? Oui. Mais les propriétaires devront déposer des demandes plus réalistes. La pression des réseaux de télévision, de leurs autres partenaires majeurs et des sénateurs américains les incitera peut-être à revoir leur stratégie.

Au fait, verra-t-on un jour un élu aux Parlements de Québec ou d'Ottawa dénoncer la situation actuelle? Ce serait tout de même triste que seuls des politiciens américains défendent l'intérêt des amateurs. Il s'agit de notre sport national, après tout.