Le défilé des athlètes n'était pas encore commencé que les doutes étaient dissipés. Dans un spectacle haut en couleur, où l'histoire, l'humour, la musique et la lumière se sont fondus dans un ensemble percutant, Londres a relevé avec succès le défi de la cérémonie d'ouverture des Jeux olympiques.

Le concepteur de cette extraordinaire présentation, le réalisateur Danny Boyle, a vite compris qu'il avait gagné son pari. Après 90 minutes, sur Twitter, les Britanniques multipliaient les félicitations à son endroit, certains parlant de «fierté retrouvée».

Avec des films comme Trainspotting et Slumdog Millionnaire, Boyle avait déjà montré l'étendue de son talent. Mais la tâche à laquelle il faisait face hier était unique.

Ayant à sa disposition un colossal budget de 42 millions de dollars, Boyle devait proposer à des centaines de millions de téléspectateurs dans le monde un show qui mettrait en valeur la richesse de la culture britannique.

La marge d'erreur était inexistante. Un échec et la fougueuse presse britannique se serait déchaînée contre lui. Et les Jeux de Londres auraient commencé d'une bien mauvaise façon pour le comité organisateur.

Boyle et son équipe ont fait preuve d'une extraordinaire créativité. Comme tous les spectateurs assez chanceux pour occuper une place dans le magnifique stade olympique, j'ai souvent été parcouru de frissons.

Un des premiers tableaux, racontant l'industrialisation de la Grande-Bretagne et la lutte des travailleurs pour leurs droits, était d'une grande puissance d'évocation. Ce mélange d'austérité et de spectaculaire était saisissant.

Boyle a aussi misé à fond sur l'humour qui fait la renommée de ses compatriotes. La reine Élisabeth II a joué le jeu, tournant au palais de Buckingham les premières images d'une séquence mettant en vedette James Bond, incarné par l'acteur Daniel Craig. Les organisateurs étaient fiers de dire qu'à l'âge de 86 ans, la reine a ainsi tenu son premier rôle de comédienne.

De Mr. Bean à Harry Potter, le spectacle a célébré le travail de créateurs qui ont fait la renommée de la Grande-Bretagne. Le riche historique musical des îles britanniques a aussi été célébré avec entrain: Beatles, Rolling Stones, The Who, The Sex Pistols... Sur le plan de la sonorité, le Stade olympique de Londres est dans une classe à part.

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Après 90 minutes de ce spectacle enlevant, le défilé des athlètes a commencé. Malgré sa durée, il s'agit toujours d'un moment fort de la cérémonie d'ouverture.

Comme la tradition le veut, la délégation grecque a été la première à entrer dans le stade, portant des habits sombres comme le moral du pays.

L'équipe canadienne, portant un uniforme conservateur - veste rouge et pantalon beige -, avait à sa tête Simon Whitfield. «Quelle sensation! a dit le triathlète après la cérémonie. C'est un honneur d'être à la tête de tous mes camarades.»

Parmi les porte-drapeaux des autres pays, on retrouvait des champions comme Maria Sharapova (Russie), Novak Djokovic (Serbie) et Usain Bolt (Jamaïque).

Les athlètes de Grande-Bretagne ont clôturé la marche. Leur entrée a été saluée par une ovation, des feux d'artifice et une pluie de confettis. L'ambiance était carrément électrique. Le groupe Artic Monkeys a alors interprété Come Together, une chanson des Beatles.

Une fois les athlètes des 205 pays regroupés au centre du stade, la partie protocolaire a commencé. Comme tout au long de cette belle soirée d'été, les annonces au public ont d'abord été faites en français, puis en anglais.

Les organisateurs des Jeux de Londres semblent vouloir donner au français, une des deux langues officielles du Comité international olympique, une place de choix durant la prochaine quinzaine. Ce ne fut pas le cas de tous leurs prédécesseurs.

Un autre moment fort est survenu lorsque Muhammad Ali a été salué peu avant que le drapeau olympique soit hissé au mât. L'ancien champion éthiopien Haile Gebrselassie et le secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon, ont aussi participé à cette partie de la cérémonie.

La vasque olympique s'est embrasée dans un tableau magnifique, comme si les branches d'un arbre se rejoignaient pour créer une flamme unique. Jamais vu un si grand nombre de spectateurs prendre autant de photos en si peu de temps!

Le spectacle durait alors depuis plus de trois heures et demie. Pourtant, aucun spectateur n'avait quitté son siège. Tout le monde ressentait la même impression: celle d'assister à un événement unique.

Paul McCartney a complété la soirée en entonnant Hey Jude, un des plus célèbres succès des Beatles. Après avoir convié les spectateurs à chanter avec lui, Sir Paul a lancé: «Welcome to London!»

Ce furent les derniers mots de la cérémonie. Il était alors près de 1 h du matin, à Londres. Les Jeux étaient vraiment commencés. Et tous les Britanniques pouvaient pousser un soupir de soulagement. Ils venaient de franchir le premier test avec panache.

À partir d'aujourd'hui, place au sport!