Ce jour-là, Brett Favre, alors quart-arrière des Vikings du Minnesota, a encaissé des coups d'une violence inouïe.

À chaque occasion, la défensive des Saints de La Nouvelle-Orléans l'a frappé avec brutalité. Bien sûr, l'enjeu était important: une participation au Super Bowl. N'empêche que l'acharnement de ses adversaires dépassait les bornes. Comme si le fair-play, la plus belle marque de respect entre deux rivaux, avait disparu.

En fin de match, épuisé par ce traitement, Favre a commis une erreur coûteuse et son équipe a perdu le match. On ignorait alors que les Saints avaient perdu tout repère éthique. Et que, sous la direction de leurs entraîneurs, ils avaient érigé un système nauséabond: récompenser en argent leurs joueurs qui blessaient un adversaire.

Tenez, avant ce fameux affrontement de janvier 2010, Jonathan Vilma, capitaine de l'unité défensive des Saints, avait promis 10 000 $ à celui de ses camarades qui sortirait Favre du match.

Ce n'était rien de nouveau pour les Saints. Selon Sports Illustrated, Greg Williams, leur coordonnateur défensif, distribuait chaque semaine des enveloppes pleines de dollars aux joueurs ayant blessé un rival. Parmi les autres cibles des Saints, on retrouvait des vedettes comme Aaron Rodgers (Green Bay), Cam Newton (Caroline) et Kurt Warner (Arizona).

Peu à peu, la direction de la NFL a découvert que quelque chose sentait mauvais chez les Saints. Une enquête a été ouverte. Des langues se sont déliées. Et hier, le commissaire Roger Goodell a rendu une sentence exemplaire.

Sean Payton, l'entraîneur-chef des Saints et jusque-là un héros de la planète NFL, est suspendu pour toute la saison 2012. Il ne touchera pas son salaire de 8 millions.

Gregg Williams, qui venait de signer un contrat avec les Rams de St-Louis, est suspendu indéfiniment. Son cas sera réévalué dans un an. Le directeur général Mickey Loomis est suspendu jusqu'au neuvième match de la saison et un entraîneur adjoint, Joe Vitt, jusqu'au sixième. Tous sans salaire.

Les Saints perdent aussi leur choix de deuxième ronde au repêchage de 2012 et 2013, en plus de recevoir une amende de 500 000 $. Des joueurs impliqués dans l'affaire seront sanctionnés plus tard.

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Selon le réseau NBC, Sean Payton s'attendait à une suspension de quatre matchs. La décision de Goodell l'a stupéfait.

De son côté, le quart-arrière des Saints, Drew Brees, s'est dit «sans voix» à l'annonce du jugement. Sur Twitter, il a écrit: «Sean Payton est un grand homme, entraîneur et mentor. J'attends une explication pour expliquer cette punition.»

Les faits parlent pourtant d'eux-mêmes! Les Saints ont bafoué la règle la plus élémentaire de l'esprit sportif. Jouer dur, oui; blesser consciemment un rival, non.

Payton a empiré son cas en niant les allégations durant l'enquête. La preuve a plutôt démontré qu'il s'est assuré que ses adjoints et lui donnent la même version des faits aux autorités du circuit. Selon la NFL, il s'agit d'un «effort délibéré pour cacher l'existence de ce programme aux enquêteurs.»

Goodell devait agir avec fermeté. Il a assumé ses responsabilités et son circuit a démontré une extraordinaire transparence.

Conscient que le cas des Saints n'est peut-être pas unique, il a demandé aux autres équipes de garantir par écrit qu'elles ne s'adonnaient pas à cette pratique.

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Un autre facteur explique la sévérité de Goodell. La NFL est poursuivie par des dizaines d'anciens joueurs qui réclament des millions en dédommagements à la suite des commotions cérébrales subies durant leur carrière.

Ce dossier sera très chaud au cours des prochaines années. Goodell a sûrement voulu envoyer un message fort, conforme aux prétentions de la NFL devant les tribunaux: la sécurité des joueurs a toujours été la priorité, hier comme aujourd'hui.

Même s'il n'est pas évident que cette prétention résistera à l'analyse des faits, la NFL n'a pas tort de jouer cette carte.

Si Goodell a frappé dur, il a épargné Tom Benson, propriétaire des Saints. Ayant eu vent des allégations à l'endroit de son équipe, Benson a ordonné à son DG Mickey Loomis de s'assurer que ces primes aux blessures n'existaient pas.

Benson n'a pas effectué de suivi sérieux. Pour le premier officier de l'organisation, il s'agit d'un manquement à ses responsabilités. En voilà un qui s'en tire bien.

Le verdict de Goodell a eu l'effet d'une bombe dans la NFL. Compte tenu des sommes énormes dont seront privés les entraîneurs suspendus, on peut croire que les sanctions feront réfléchir.

Goodell vient de hausser la barre au niveau de la sécurité des joueurs. Les autres circuits professionnels, dont la LNH, devront en prendre acte lorsqu'ils seront devront faire face à des gestes violents sur la surface de jeu.

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Sources: Sports Illustrated, NFL.com, ProFootball Talk (NBC.com), ESPN.com et Los Angeles Times.

Photo: Reuters

Sean Payton, entraîneur-chef des Saints de La Nouvelle-Orléans, a été suspendu sans salaire pour un an.